« Pirates des Caraïbes 3 » : le Disney le plus ambitieux ?
Personne ne croyait en la réussite de « Pirates des Caraïbes : la malédiction du Black Pearl », en effet, à l’époque, on pensait les films de pirates démodés. Néanmoins, contre toute attente, lors de sa sortie en 2003, le long métrage fut un triomphe, à la fois critique et commercial. Il était évident que les studios Disney n’allaient pas en rester là avec leur nouvelle poule aux œufs d’or.
Ils ont vu les choses en grand et n’ont pas commandé une suite, mais bien deux, qui devaient être tournées en même temps. Le but était d’avoir une période courte entre la sortie des films, afin de capitaliser rapidement sur la popularité naissante de la franchise.
Une oeuvre colossale
C’est à nouveau le cinéaste du premier opus, Gore Verbinski, qui se retrouve à la tête du projet. Sa tâche est ardue, c’est le moins qu’on puisse dire. Il a la charge de réaliser simultanément deux énormes blockbusters, avec un casting important, des effets spéciaux complexes et des lieux de tournages différents, parfois fort éloignés les uns des autres. Il doit aussi élaborer une intrigue, qui durera le temps de deux longs métrages, tout en veillant à ce que ceux-ci se suivent bien, qu’ils soient cohérents et que tous les arcs narratifs ouverts soient refermés.

© Disney
Tout ça en faisant face aux imprévus, comme la météo capricieuse, qui obligera l’équipe à mettre en suspens le tournage. Pour couronner le tout, les studios Disney surveillent de près l’avancement de l’opération. Ils sont catégoriques, il faut que les dates de sorties prévues soient respectées par tous les moyens. Cette consigne sera une très stressante pression pour le réalisateur. Si le script de « Pirates des Caraïbes : le secret du coffre maudit » était presque achevé au moment où il a commencé à être tourné, ce n’était pas du tout le cas du troisième volet « Jusqu’au bout du monde ».

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Gore Verbinski savait dans les grandes lignes ce qu’il voulait pour la conclusion, mais celle-ci n’avait pas encore de forme claire. C’est inévitable, script terminé ou pas, ils sont obligés de mettre en scène les films en même temps. Le scénario de « Pirates des Caraïbes 3 » a donc été écrit au jour le jour. Ils tournaient pendant la journée et écrivaient les scènes du lendemain durant la nuit. Avec tous ces soucis, le projet avait toutes les chances de se casser la figure, mais parfois, les miracles se produisent… Non seulement la date de sortie imposée fut respectée, mais en plus, Verbinski a réussi, malgré l’adversité, son défi de livrer un final satisfaisant, cohérent et époustouflant à son histoire.
La conclusion grandiose d’une brillante trilogie
La qualité de l’œuvre est due au travail acharné de ceux qui l’ont créée, ils avaient envie de bien faire et cela se sent durant chaque minute du long métrage. « Pirates des Caraïbes : jusqu’au bout du monde » est sans hésiter l’épisode le plus ambitieux de la saga, mais aussi l’un des projets les plus imposants que Disney ait produit. Des choix audacieux ont été pris, la première scène le prouve, on y voit un groupe de pirates capturés par la compagnie des Indes sur le point d’être pendus. Parmi eux, un enfant va se mettre à chanter le magnifique air qui accompagnera tout le film « hissons nos couleurs », bientôt suivi par les autres prisonniers. Les chants vont continuer jusqu’à l’exécution de leurs peines.

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Une introduction aussi sombre et dure dans un Disney, c’est un pari risqué et ce n’est plus aujourd’hui qu’on trouvera un passage de cette trempe dans un long métrage du studio. Cette première séquence donne le ton, « Pirates des Caraïbes 3 » va au bout de ses idées et n’a peur de rien. On reproche parfois à l’œuvre d’être trop chargée, en effet, elle est très longue, (plus de 2h30 générique non compris) et énormément de choses se passent à l’écran. Il y a un grand nombre de personnages, qui ne cessent de se trahir et de nombreuses intrigues secondaires, avec des retournements de situations à gogo.

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Je comprends que cela peut sembler beaucoup, la narration de l’œuvre n’est pas parfaite, les contraintes du tournage font qu’il y a peut-être un peu trop d’informations dans un même film. Cependant, Verbinski fait de cette imperfection une force. « Pirates des Caraïbes 3 » c’est la fin d’une grande aventure, l’œuvre désire nous embarquer dans quelque chose de très puissant. Le long métrage est dans la démesure totale et choisi de l’assumer à fond et c’est justement ça qui fait son charme. Après l’avoir visionné, on a l’impression d’avoir assisté à un spectacle hors-normes et qui nous dépasse ! Combien de blockbusters peuvent se vanter de cela ?
Des séquences qui en mettent plein la vue
On peut saluer le fait que malgré tout ce qui se déroule dans l’intrigue, celle-ci parvient à garder une fluidité et surtout à rester cohérente. « Pirates des Caraïbes 3 » est un véritable jeu d’équilibriste, on est constamment au bord de l’overdose, mais sans jamais tomber dedans réellement. C’est d’ailleurs pour cette raison que le kraken n’est plus là, sa présence en plus de tout ce qu’il y a déjà aurait été la goutte de trop. Les séquences d’anthologie s’enchaînent sans s’arrêter. On peut noter le passage chez les pirates de Singapour, l’inversion du navire, la confrérie des pirates et bien sûr l’affrontement final dans le maelström. Cette dernière bataille pousse les curseurs du spectaculaire au maximum. C’est la plus impressionnante que j’ai vue dans un film après celles du « Seigneur des anneaux ».

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Pendant une demi-heure, on va observer le Black Pearl, le Hollandais-volant et les navires de la compagnie des Indes s’opposer dans cette immense tempête provoquée par la déesse Calypso. On va notamment assister au mariage de Will et Elizabeth sur le pont du Black Pearl, au beau milieu d’un violent affrontement. Tout cela s’achève sur les chapeaux de roues avec la mort de Davy Jones et surtout ma séquence préférée, la chute de Beckett. Il est rare de voir un antagoniste mourir aussi dignement. Il accepte son destin et contemple calmement la destruction de son navire en attendant la mort. La scène est visuellement et symboliquement d’une beauté sidérante.
Les musiques composées par Hans Zimmer sont un véritable bonheur pour les oreilles tant elles sont somptueuses. De toute la franchise, c’est « Jusqu’au bout du monde » qui possède la bande originale la plus variée. Les airs vont du romantique à l’épique, en passant par le comique. Les passages clés du film sont magnifiés par ces mélodies.
Un final satisfaisant et visuellement magistral
Tous les personnages ont leurs arcs refermés de façons honorables et jouissent de leurs moments de gloire. On retrouve évidemment à nouveau Jack Sparrow, un protagoniste toujours aussi cocasse, imparfait, souvent tricheur et brillamment intelligent, malgré son apparence de grand guignol. Elizabeth Swann, la femme forte, qui désire échapper à sa condition et qui devient « Roi des pirates ».

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Will Turner, qui va embrocher le cœur de Davy Jones et prendre sa place en tant que capitaine du Hollandais-volant. Il sera condamné à ne voir sa bien-aimée qu’une fois tous les dix ans. Une conclusion douce-amère, mais poignante ! Davy Jones est toujours aussi impressionnant, il est un méchant tragique et torturé par son amour pour la déesse Calypso.
C’est la technologie de la « motion capture » qui lui permet de prendre vie sous nos yeux et le comédien britannique Bill Nighy livre une performance remarquable. On a le retour de Barbossa, ressuscité après sa mort dans le premier opus.Il n’est jamais bon de faire revenir des personnages décédés, mais Barbossa est l’exception qui confirme la règle, tant son charisme et l’excellent jeu de son interprète apportent tellement à l’œuvre. Il est également bluffant de voir que près de vingt ans après, les effets visuels n’ont pas pris une seule ride et au contraire, ils surpassent largement quasiment tout ce qu’on voit dans les grosses productions actuelles.
Vous l’aurez compris, « Pirates des Caraïbes : jusqu’au bout du monde » est à mes yeux un très grand film ! C’est le long métrage qui aurait dû mettre un terme à la saga, hélas l’appât du gain a été trop fort et deux suites inutiles et médiocres ont tout de même vu le jour. s’agit d’une conclusion épique, qui n’est certes pas irréprochable, mais d’une telle ambition et générosité, qu’il est impossible pour moi de ne pas être conquis.
Bande-annonce FR :
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