Donjons et Dragons, l’honneur des voleurs
Que le plus vieux jeu de rôle de la culture pop ait droit à une adaptation au cinéma, vous aussi ça vous surprend ? Examinons plus avant la surprenante production Goldstein & Daley.
D&D pour les intimes, est un jeu de rôle, ou Role Player Game (R.P.G) élaboré et commercialisé depuis les années 50-70. Pratiqué avec modestie à ses débuts, ce jeu dont le style s’est répandu à l’échelle mondiale est LE classique du genre. L’objectif ? Pendant quelques heures, se perdre dans un univers fantastique interprété et organisé par le Maître du Jeu (ou M.J) en interprétant un personnage créé.
Abordons la partie intéressante ; D&D est sans doute le précurseur en matière de jeu actualisé. C’est-à-dire que les règles, le contenu historique (ou Lore) et le matériel requis pour participer sont mis à jour depuis l’époque de Gary Gygax et Dave Arneson, les deux créateurs de ce loisir. Autrement dit, les joueurs modernes peuvent confortablement s’asseoir sur sept décennies d’expérience de jeu, de gameplay et d’écriture scénaristique laissée à leur intention par leurs prédécesseurs. Une immense banque de données dans laquelle puiser les éléments d’un long-métrage n’a donc rien d’irréalisable.
Un film strictement pour les geeks ?
Tout le monde s’est posé la question en voyant paraître le trailer dépeignant les personnages de la barbare Holga (Michelle Rodriguez), du mage Simon (Justice Smith), du paladin Xenk (René-Jean Page), de la druidesse Doric (Sophia Lillis) et du barde Edgin (Chris Pine) aux prises avec le monde fantastique plusieurs fois adapté en jeux vidéos. Soyons honnête ; il est vrai qu’il y a de quoi décourager les non-habitués.
Développons ce point ; durant les cent-trente-six minutes que dure ce long métrage, le spectateur est plongé dans une aventure où se mêlent trahisons, plans d’intrusions et d’évasions improbables, bagarres de légendes et relations sociales compliquées. Niveau décor, on explore tour à tour une prison au milieu des glaces, un village d’elfes sylvains, une arène mécanique, et même un monde souterrain hanté par un dragon rouge obèse (oui oui, Themberchaud fait lui aussi partie du Lore). Ajoutez à cela les innombrables races et créatures étranges tirées du manuel des monstres de D&D et vous obtenez un cocktail surchargé qui a de quoi perdre n’importe quel néophyte.
Et pourtant, ça marche !
Fluide et bien narré, ce film ne laisse pas au spectateur le temps de souffler et est somme toute facile à suivre. Le pitch tient en quelques lignes, l’humour est au rendez-vous et les épreuves individuelles attendant de façon très prévisible les héros sont tournées avec adresse et originalité. Tourné par le duo créateurs des films Comment tuer son boss et Game Night, Donjons et Dragons : L’Honneur des Voleurs remonte sans peine la pente dégringolée par ses trois prédécesseurs, parfois sexistes, et se révèle une véritable pépite pour distraire, faire sourire et amuser.
Au final, est-ce un film de qualité ?
Répondons à cette question par une autre question ; qu’est-ce qu’un film de qualité ? Si par là, vous sous-entendez une production à la Good Will Hunting, Intouchable ou Twelve Years A Slave, avec rebondissement, écriture scénaristique fine et rôles délicats interprétés d’une main de maître pour toucher le spectateur en plein cœur, la réponse est non.
Comme spécifié plus haut, il s’agit d’un film Heroic Fantasy, et quand bien même le genre a connu des œuvres majeures au succès universel (Game Of Thrones, Le Seigneur des Anneaux, Conan le Barbare), l’objectif premier est l’évasion. En ce premier quart de 21e siècle durablement marqué par la culture geek, les petits écrans et les séries, observons que s’évader hors des tracas de notre quotidien est devenu une science à part entière. Il y a l’embarras du choix : jeux (tous supports confondus), activités physiques, séries, activités plastiques et bien sûr cinéma.
D&D : l’Honneur des Voleurs s’inscrit dans cette veine et entraîne le spectateur loin de son seau de pop-corn, dans un monde vert et vaste, empli de magie et d’humour, et doté de plusieurs niveaux de lecture. En se basant sur ces critères parfaitement assumés par ses créateurs, n’ayons pas peur d’affirmer que le film est très bon et très original.
À visionner entre amis ou avec vos enfants, un film qui fait sourire !