Le film le plus mystérieux du cinéma, « Goncharov », de l’immense Martin Scorsese, semble échapper à toutes les investigations. Nous avons voulu en savoir plus.

Rares sont les chanceux à avoir vu le cultissime Goncharov de Martin Scorsese, le film-fantôme dont tout le monde parle et que peu ont vu. Tel le furet de la chanson, « il est passé par ici, il repassera par là ».

« Les choses ne sont jamais évidentes. Réfléchissez par vous-même. Faites vos propres recherches. » Oncle Gricha, dans Goncharov

« Winter comes to Naples ». Une métaphore ? © DR

Un film célèbre et pourtant trop rare

Un casting qui fait rêver : Al Pacino, Robert de Niro, Harvey Keitel, Gene Hackman, Cybill Shepherd. Une histoire de gangsters dans la grande veine des classiques du cinéma. Goncharov est un gérant de discothèque, mais il a une double vie. Il est aussi un tueur issu de la mafia russe. Le film se déroule à Naples, où l’on découvre en parallèle les relations incestueuses entre les mafias napolitaine et russe, entre les personnages féminins entre eux, entre les personnalités fortes d’hommes à la double vie. Tout est double dans ce film, il y a comme une seconde couche sous le verni d’un film classique de mafia. Voir au-delà des apparences, voilà un premier message que Scorsese fait magistralement passer. Réfléchir, se questionner. Est-ce donc si dangereux ? En tous les cas le film ne passe pas sur les écrans.

Le château de cartes finit toujours par s’écrouler, quand le souffle de la réflexion vient l’ébranler © DR

« Goncharov » ? Circulez, il n’y a rien à voir !

Il y a peu de chances que vous voyiez Goncharov à la télévision. Et pourtant, on a bien diffusé d’autres films de Martin Scorsese, comme Taxi Driver, Les Affranchis, Aviateur, Les Infiltrés, Le Loup de Wall Street, etc… Alors, pourquoi pas Goncharov ? Quel est le terrible secret qui se cache derrière cet ostracisme ? Ca ne peut pas être les aléas de la programmation, nous ne sommes pas dupes. Un film avec un tel casting qui ne passe pas à la télévision, alors que nous avons droit chaque année à des Le Gendarme et les Gendarmettes? Allons, donc ! Il y a autre chose derrière. Mais quoi ?

Martin Scorsese a 81 ans, dira-t-il bientôt le fin mot de l’histoire ? © DR

On nous parle de droits d’auteurs, de problèmes liés à la production, de procès jamais clôturés, bref, une affaire de gros sous. Et puis le film a été enterré, on est passé à autre chose. Chaque acteur a continué sa brillante carrière, et Scorsese aussi. Circulez, il n’y a rien à voir. Comme si ce film n’avait jamais existé. Vraiment ? En tous cas le film n’est pas crédité à la filmographie de Scorsese sur Wikipedia puisque en dehors des gens qui affirment l’avoir vu à l’époque dans les festivals de cinéma, le film n’a jamais été distribué. Ou alors sous le manteau?

Un film sous influence… russe ?

Un nom revient souvent, chuchoté sous ce même manteau, une gabardine beige claire d’espion, comme un mot de passe pour comprendre les secrets cachés dans le film : « Tolstoï ». Certes, on m’a prévenu : n’en parle pas. Pourquoi ? ai-je demandé à mon interlocuteur bien informé qui veut garder l’anonymat. Je ne sais pas, secret d’État. C’est tout ce que j’ai reçu comme réponse. C’est un peu léger. Et puis je me suis rappelé avoir lu cet été le livre de Sacha Tolstoï, Exil, dont le héros s’appelle « Gontcharov ». Ici avec un « T » comme dans Tolstoï. Hasard ? Coïncidence ? Je ne crois pas.

Greta Garbo dans « Anna Karenine » de Tolstoï : ils sont partout © Metro-Goldwyn-Mayer

Dans Tolstoï il y a 2 « T » et 2 « O », et je ne dis pas ça par ce que ça fait Toto, comme dans les blagues du personnage. Il n’y a rien de drôle dans cette affaire. Et bien sûr la scène absolument tragique de la femme dans le film Goncharov ne doit-elle pas être mise en perspective avec la scène finale de Anna Karenine de Léon Tolstoï ? Mais peut-être j’en dis déjà trop sur un film suffisamment mystérieux comme cela.

Secret caché et Guerre Froide

Rappelons quand même le contexte historique. Quand le film est réalisé en 1973 nous sommes en pleine Guerre Froide. L’opposition des blocs est à son comble. C’est une époque où Russes et Occidentaux ne se parlent pas. Mais certains messages réussissent à passer, camouflés dans des œuvres artistiques. Des tableaux, des livres, des chansons. Des films ? Oui, des films aussi. Alors, Scorsese aurait-il passé des messages secrets au vu et au su de tout le monde, en se cachant sans se cacher ? Certains le pensent, partant de la théorie que rien n’est mieux caché que lorsqu’il est mis sous les yeux de tout le monde. Tout montrer pour tout cacher. Seuls ceux qui ont des yeux pourront voir.

Même l’affiche du film donne à réfléchir © DR

Alors oui, la scène de la bouteille de bière est trop longue, mais est-ce juste une erreur d’un « débutant » comme Scorsese ? Bien sûr que non. Il faut creuser de ce côté-là. Une personne qui a eu la chance de voir le film deux fois m’a fait remarquer que personne ne parle de la bouteille de vodka qui penche sur le comptoir, à 40°. C’est-à-dire le même nombre de degrés que les degrés d’alcool dans la vodka. Suivez des yeux la direction qu’elle indique sur le mur, la bouteille pointe vers quelque chose, ce n’est pas anodin.

« Si non ė vero, ė bene trovato. » Giordano Bruno au sujet de Goncharov

Une vérité qui dérange ?

A l’heure où l’on commence à accepter l’idée que, peut-être, les images de l’alunissage en 1969 étaient fausses et tournées dans des studios sur Terre (voyez le film To The Moon avec Scarlett Johannson sorti cet été), ne serait-il pas temps d’affronter la vérité qui se cache derrière Goncharov ? Mais la question est : cette vérité ne tient-elle pas plus du cauchemar que du rêve ?

11 novembre 1989, la chute du Mur de Berlin © AP Photo/Lionel Cironneau

Les scènes répétées qui montrent des horloges sont-elles juste une métaphore sur le temps, un truc scénaristique pour augmenter la tension ? Ou bien sont-elles un message bien plus subtil ? Est-il vrai que l’addition des heures visibles dans le film donnent la date exacte de la Chute du Mur de Berlin ? Et dans ce cas, comment Scorsese pouvait-il deviner cette date avec 16 années d’avance ? À moins bien sûr que cette date ait été connue depuis longtemps, préparée depuis des années par des personnes qui continuaient à se parler par-delà le Mur. Des gens qui tirent les ficelles dans l’ombre, en accord avec le mouvement des astres. Ce qui est en haut est comme ce qui est bas. Mais ceci est évidemment du pur roman, n’est-ce pas ? Laissons-nous plutôt porter par le rêve de Goncharov, le film fantôme qui sait, mais ne dira rien.

Présentation de Goncharov (1973) en ANGL:


Le complot est partout, on nous dit rien, on nous cache tout. Voyez « To The Moon » actuellement au cinéma