Avec son histoire pittoresque, ses chansons vibrantes et ses messages retentissants, le nouveau film Wicked (Partie I) réveille la nostalgie chez les fans de longue date, tout en suscitant l’intérêt des nouveaux arrivants du fandom. De par son lien étroit avec le Magicien d’Oz, il touche également plusieurs générations : penchons-nous sur l’histoire et l’impact saisissant de Wicked, en attendant la sortie de la seconde partie !

Au commencement : les débuts du Pays d’Oz

L’histoire légendaire d’Oz voit le jour dès 1900 avec un classique de la littérature américaine, « Le Magicien d’Oz ». Créé par l’auteur américain Lyman Frank Baum, ce conte pour enfants est le tout premier livre d’une longue série : quatorze au total, notamment « The Emerald City of Oz » et « The Lost Princess of Oz ». L’écrivain y relate l’épopée de Dorothy Gale, jeune campagnarde enjouée originaire du Kansas, et soudainement transportée par un cyclone au Pays d’Oz, un lieu magique où elle fait la connaissance des personnages notables d’Oz : l’épouvantail, le lion peureux et le bûcheron en fer blanc. Au cours de ses tribulations dans l’unique but de retourner chez elle, le lecteur suit ses aventures tumultueuses en terres inconnues, en sachant que seul le Grand Magicien de la Cité d’Émeraude pourra lui venir en aide. Si « Le Magicien d’Oz » a fait l’objet d’un grand nombre d’adaptations, l’une en particulier retiendra l’attention du monde entier.

Cynthia Erivo, la Méchante sorcière de l’Ouest © Universal Pictures

Jalon intemporel dans l’histoire d’Hollywood, « Le Magicien d’Oz », sorti en 1939, est un film musical basé sur le roman original (1900) qui a véritablement façonné et marqué l’imaginaire collectif du monde d’Oz. Tout le monde a une image du film en tête ou une chanson fredonnée de temps en temps, la plus célèbre étant sans conteste l‘émouvante « Somewhere Over the Rainbow ».

Un angle inédit : Wicked, le roman

Dans les livre et film originaux, nous avions déjà l’opportunité de rencontrer la Méchante Sorcière de l’Ouest, antagoniste principale du film, ainsi que Glinda la Bonne Sorcière, qui accueille et guide Dorothy à travers son périple.

« Wicked : La Véritable Histoire de la méchante sorcière de l’Ouest », ouvrage paru en 1995 et écrit par l’auteur américain Gregory Maguire, est le premier livre de la série The Wicked Years et vise à faire pivoter l’angle de vue sur la méchante sorcière, à l’origine représentée comme l’ennemie principale de Dorothy et ses amis en 1900 et 1939, que l‘écrivain nomme « Elphaba » en hommage à L. Frank Baum (ses initiales étant LFB). De manière ingénieuse et non-conventionnelle, l’auteur offre une perspective innovante et complexe, explorant une interprétation plus obscure de la méchante sorcière, esquissant ses épreuves, obstacles et sa vie de paria.

Cynthia Erivo © Universal Pictures

À travers elle, Maguire questionne la nature du mal et propose une version plus mûre et glaçante de l’intrigue originale, cette dernière exhibant déjà des thématiques assez sombres. De fil en aiguille, la frontière se dressant entre les deux sorcières s’estompe progressivement : la Méchante Sorcière en devient avenante et simplement incomprise, et la Bonne Sorcière paraît opportuniste et arbitraire.

La chronique de Maguire en chanson : Wicked se rend à Broadway

« Wicked, L’histoire inédite des sorcières d’Oz », dont la première a eu lieu en 2003, est une comédie musicale et une adaptation du roman de Maguire de 1995, « Wicked : La Véritable Histoire de la méchante sorcière de l’Ouest ». La trame est retracée du point de vue des deux sorcières Elphaba (la Méchante Sorcière de l’Ouest) et Galinda (Glinda la Bonne Sorcière), bien avant l’arrivée de Dorothy. Opposées à tous les niveaux, Elphaba et Glinda commencent par se détester mais finissent par former une amitié exceptionnellement unique et sincère, entrecoupée par les interrogations d’Elphaba sur les inégalités sociales, sa différence et son désir inébranlable de justice.

Ariana Grande-Butero et Cynthia Erivo © Universal Pictures

La comédie musicale met en scène Idina Menzel dans le rôle d’Elphaba et Kristin Chenoweth, interprétant Galinda, et offre un éventail de chansons intenses et ensorcelantes, dont la plus prééminente constitue sans aucun doute « Defying Gravity ».

Aujourd’hui encore, Wicked (ou « La Méchante ») est l’une des comédies musicales les plus acclamées de Broadway, ayant remporté de nombreuses récompenses, dont les Drama Desk Awards de la meilleure comédie musicale et des meilleures paroles dans une comédie musicale, ainsi que le Grammy Award du meilleur album de comédie musicale.

Enfin ! Wicked sur le grand écran

Réalisé par le producteur américain Jon M. Chu et adapté du roman Wicked de Maguire, et par extension du « Magicien d’Oz », le film Wicked,sorti en novembre 2024, est déjà l’adaptation cinématographique d’une comédie musicale de Broadway la plus rentable. Avec Cynthia Erivo dans le rôle d’Elphaba et Ariana Grande dans celui de Galinda, cette nouvelle fantaisie musicale est le premier chapitre d’un film confectionné en deux parties, présentant les péripéties énigmatiques d’Elphaba depuis sa naissance et amenant l’histoire inédite des sorcières d’Oz au grand écran.

Ariana Grande-Butero, la Bonne Glinda © Universal Pictures

Grâce à ses talents en sorcellerie, Elphaba, née avec une différence majeure, sa peau verte, et ostracisée par beaucoup durant sa vie entière, est immédiatement repérée par Madame Morrible (Michelle Yeoh), directrice de l’université de Shiz, l’établissement que Nessarose, la sœur d’Elphaba, envisage d’intégrer. Elphaba se heurte rapidement à Galinda, une étudiante pétillante, exubérante et populaire, avec laquelle elle est obligée de partager sa chambre. Si leur relation s’avère instable de prime abord, elle se développe promptement en une amitié fervente et attachante…

Personnifier le sens ambigu du mal

« Les gens naissent-ils méchants – ou la méchanceté leur est-elle imposée ? »

Dès les premières répliques, le film soumet un aperçu de ce que l’intrigue véhicule. Comme le suggèrent l’œuvre de Maguire et la représentation de Broadway, les prises de position et les choix d’Elphaba se révèlent compréhensibles, voire louables, tandis que Galinda semble être engloutie par le même système fragmenté qu’Elphaba tente tant bien que mal à démanteler, presque par intérêt, plutôt qu’à son insu.

Ariana Grande-Butero et Cynthia Erivo © Universal Pictures

Sous son apparence candide, Wicked dissimule des notions cruciales telles que les préjugés raciaux, les différences de classes, la maltraitance animale, l’abus de pouvoir, la corruption et le harcèlement. Contre toute attente, Oz semble criblé d’idées préconçues et de discrimination en tous genres, et le parcours d’Elphaba pour devenir la méchante sorcière aboutit finalement à un acte de rébellion contre la tyrannie d’Oz. Et si le pays d’Oz et sa magie effarante n’étaient qu’une façade en fin de compte ?

Ce fil de pensée conduit le spectateur à s’interpeller sur le vrai visage du mal : chaque être est potentiellement malveillant dans le récit d’autrui et, dans certaines circonstances tragiques, la fin justifie parfois les moyens. Dans ce monde dichotomique rendu paradoxal, l’évidence ne coule pas toujours de source, et les éléments superflus des on-dit prennent souvent plus le dessus que nécessaire.

Ariana Grande-Butero et Cynthia Erivo © Universal Pictures

Dans la chronologie grandiose du monde d’Oz, le traitement injuste envers la Méchante Sorcière de l’Ouest, déjà subtilement perceptible dans le scénario original, devient la vie entière d’Elphaba, à tel point que les rôles s’inversent aux yeux du spectateur : c’est à présent elle qui est révérée par le public, et Glinda presque diabolisée. D’ailleurs, le livre de Maguire renforce cette idée, là où la comédie musicale et le film de 2024 dessinent plutôt un portrait plaisant de Glinda, la peignant sous un jour plus favorable.

Conclusion : aucune fausse note !

En tant que fan inconditionnelle de l’univers d’Oz et de Wicked, principalement de la comédie musicale, je me suis surprise à articuler les répliques et les paroles tout le long du film. Les performances de Cynthia Erivo et d’Ariana Grande, leur talent et le dévouement dont elles font preuve dans leurs rôles respectifs sont admirables et riches en émotions : difficile de ne pas verser de larmes lors du visionnage ! Imaginer comment le récit se traduirait au cinéma n’était pas une mince affaire, mais les décors, les couleurs et les paysages de rêve m’ont époustouflée et ont largement dépassé mes attentes.

Le Magicien d’Oz, 1939, avec Margaret Hamilton et Judy Garland © Wikipedia Commons

En conservant les excentricités et célèbres répliques de la représentation originale dans le scénario, le nouveau film reste fidèle à la version de Broadway, mais le script a également été modernisé pour mieux s’adapter au grand écran. Avant tout, l’intrigue prodigieuse et les rebondissements tiennent le public en haleine jusqu’à la dernière seconde. Quant au « Magicien d’Oz » (1939), il est vrai que l’original vaut le détour, afin de mieux se familiariser avec l’atmosphère et le cadre, surtout compte tenu de la corrélation omniprésente entre les deux œuvres, mais il n’est pas indispensable pour apprécier Wicked. La deuxième partie, « Wicked: For Good », sortira en novembre 2025, presque exactement un an après la partie I. Somme toute, la meilleure façon de terminer l’année sur une bonne note !

Wicked – Bande-annonce officielle VF :


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