« LE BANANA SPLIT » de LIO repris dans une pub Apple
Le 14 mars 2023, Apple révèle le choix musical du spot de dimension planétaire promouvant le nouvel iPhone 14 jaune : Le Banana Split de Lio !Tel est le titre exact, souvent raccourci en Banana Split. Une nouvelle qui fait l’effet d’une petite bombe…avec grosse polémique possible mais qui sera déminée…!
Le Banana Split est sorti en novembre 1979, d’abord en single (45 tours de deux titres, son tout premier) et sur son premier album : Lio. Vanda Maria Ribeiro Furtado Tavares de Vasconcelos, dite Lio, a enregistré ce tube en 1979, à l’âge de dix-sept ans, et non de seize, en dépit de cette légende reprise sur sa page Wiki. Elle est née le 17 juin 1962 : novembre 1979, faites le compte…
Musique de Jay Alanski et paroles de notre surdoué de très haut vol, l’immense Jacques Duvall, sous son autre surnom d’artiste moins utilisé : Hagen Dierks. On ne connaît pas le montant exact de la transaction mais le producteur et ingénieur du son Dan Lacksman, coproducteur et musicien de Lio à l’époque, précise qu’il y a un montant fixe et un autre variable dépendant du nombre de vues.
Après dix jours, on parlait déjà de huit millions de vues et aujourd’hui, je ne peux en dire plus mais il s’agit d’un immense succès. Et dans ce genre de deal, on tient compte des retombées commerciales énormes qui vont en principe permettre une renaissance gigantesque de ce titre !
Un double lien avec la Belgique
Le spot présente un jeune homme dessiné joyeux, dynamique et dégingandé se baladant dans un décor mêlant animation et décors réels.
L’incrustation de personnages filmés en vues réelles dans des décors de création graphique est monnaie courante dans le cinéma depuis longtemps. Mais l’ancêtre de ce procédé de mélange animation -réalité a été créé par le cinéaste ostendais Raoul Servais, décédé le 17 mars 2023, soit le jour exact où l’info est apparue dans la presse francophone : la servaisgraphie.
Servais a obtenu la toute première Palme d’or belge au festival de Cannes, celle du court métrage, avec son court Harpya, une démonstration de servaisgraphie. Et cela en 1979, l’année du tube Le Banana Split… !
Le surnom Lio est emprunté à une BD érotique de Jean-Claude Forest de 1964 (éditions du Terrain vague), Barbarella. Une œuvre adaptée au cinéma sous le même titre par Roger Vadim, en 1968, avec sa femme de l’époque, Jane Fonda, en égérie sexy…qui allait bientôt impulser une orientation totalement différente à sa vie, dans d’autres genres de films et un rôle de pasionaria politique ne devant rien à sa plastique avantageuse…
Un exemple déjà de femme refusant de n’être qu’un objet de désir et de fantasmes.
Pour en revenir à Lio, selon elle, sa plus grosse vente reste en fait -ce qu’on ne rappelle jamais, curieux angle mort de l’histoire de la chanson française – Amoureux solitaires mais le spot Hello Yellow pourrait renverser tardivement la situation en faveur de Le Banana Split.
Lio et les controverses
Si on suit les commentaires de notre artiste dans les médias, on peut s’interroger sur certains de ceux-ci, flirtant avec l’outrance…Apparemment le premier quotidien francophone à diffuser, le 17 mars, cette info, via Éric Bureau : Aujourd’hui, le grand quotidien français (Le Parisien, édition de Paris). Lio y déclare ce qui suit, repris dans d’autres médias.
«Je suis contente pour le Banana Split et pour ma pomme. On reste dans les fruits. C’est génial, je pense que mon comptable va être content. Ça va mettre du beurre dans les épinards.» Pourtant, elle chantait un tout autre air, il y a quelques mois à peine…Et ses déclarations-là sont graves ou plutôt auraient pu l’être.
Stupeur d’abord : sur la page Wiki de Le Banana Split -Lio (non celle de Lio !), donc ce que tout un chacun peut consulter, on lit ci-dessous le condensé de ce qui suit, les immenses regrets de Lio. « En septembre 2022, Lio révèle qu’elle regrette les paroles de la chanson qui selon elle, a « ouvert la porte aux pédocriminels. » Avec liens pour les sources et version complète de sa diatribe…
Tout en se souvenant que «tout ce qui est excessif est insignifiant», un vieil adage de toujours qui ne fait que gagner en pertinence aveuglante !
Alors l’origine de tout cela : la première mention répertoriée émane encore du quotidien Aujourd’hui –Le Parisien. Qui se contente, le 14 octobre 2022, de reprendre ces déclarations tonitruantes publiées six jours plus tard dans l’ouvrage de la jeune journaliste militante féministe Chloé Thibaud Toutes Pour La Musique (éditions Hugo Image), consacré à plusieurs chanteuses interviewées sous l’angle féministe.
« Contrairement à France Gall, je savais ce que voulait dire Banana Split quand je l’ai chantée. Mais je comprends désormais que je ne le savais pas tant que ça. Je sais que j’ai totalement ouvert la porte aux pédocriminels et que j’ai apporté de l’eau à leur moulin. Je m’en aperçois aujourd’hui.» Elle avoue qu’à cette époque, elle ne s’imaginait pas « complice de ce traitement infâme pour les jeunes femmes et les jeunes filles ».
Un double sens
Mais on peut un peu remonter le temps et reprendre des commentaires de Lio sur ce titre qui déclenche tant de buzz à nouveau, très positif depuis ce spot, après un petit passage par les enfers de la réprobation indignée…
Un intéressant épisode de la série de podcasts d’Arte : Transmission, de Laurence Garcia, est consacré à Lio. Mise en ligne le 9 septembre 2020- interview de 2019. Il n’y a pas si longtemps, son regard d’alors sur Le Banana Split. « Duvall ne s’est jamais foutu de moi. C’était très clair ce que je chantais et c’était partagé. On faisait un binôme ensemble dans le même terrain de jeu, dans la même cour de récré. France Gall a été abusée (note : donc pour Les Sucettes de Gainsbourg). »
Mais la chanteuse a très bien compris que Le Banana Split évoquait un sexe d’homme dans la grande tradition du «double entendre» graveleux-humoristique, tellement présente dans la chanson mais encore plus sans doute dans le blues. Elle insiste de façon…précise : « Pas de pénétration, on est en surface du corps»…enfin il s’agit d’un acte très intime tout de même, on sait lequel… Elle n’avait tout de même pas capté l’allusion à l’éjaculation.
Lio se confie dans ce podcast, juste après avoir évoqué Banana Split : «Cela ne me dérange pas du tout de parler de sexe. Cette idée qu’on ne peut pas parler de ce qui sort de nos corps, c’est une folie.» Comme quoi…que de retournements de situation en si peu d’années, avec sa spectaculaire réhabilitation actuelle du titre renié quelque temps auparavant !
Et également…Gainsbourg !
Voici des déclarations fracassantes dans ce même podcast Arte Transmissions de septembre 2020, reprises avec ferveur par des médias très avides de buzz «clicophiles». Le Point, Huffington Post France, Paris Match et j’en passe.
Lio a fréquenté Gainsbourg, dont elle était fan, à l’époque de la collaboration Alain Chamfort (petit ami de Lio) avec Gainsbourg. Elle a même chanté, après Chamfort et comme Jane Birkin, son Baby Lou. «J’en suis revenue de Gainsbourg, qui est un harceleur, tout simplement.» C’était «…quelqu’un de pas du tout cool avec les filles et qui était un Weinstein de la chanson, d’une certaine manière…».
Libre à chacune et chacun d’être d’accord ou non avec ces propos très durs.
La chanteuse le reconnaît : elle est du genre ingérable. Franche comme l’or, ce que le monde du show-business n’aime pas trop…
Épil(i) ogue !
Pour tuer dans l’œuf toute polémique de bas étage, on s’en tirera par le haut…L’ami Jacques Duvall a eu la grande gentillesse de m’envoyer le 20 mars 2023 deux commentaires sur toute cette affaire. «Lio est revenue à de meilleurs sentiments vis-à-vis de cette chanson. Je crois que c’était plus de l’auto-dépréciation qu’une accusation.» Et le 22 mars 2023, : « Chaque artiste a des rapports compliqués avec ses succès, vécus parfois comme étant réducteurs. Je peux très bien comprendre que Lio ait eu des moments de questionnement, voire de détestation, vis-à-vis de Banana Split…Je vis moi-même ce genre de remise en doute, plutôt fréquemment d’ailleurs.
C’est un des nombreux points communs que nous avons, elle et moi, cette tendance à l’auto-dépréciation (signe d’un grand orgueil, m’a dit mon psy).
Je suis certain de ne pas être mis en cause personnellement et je garde au fond de moi une immense tendresse pour cette aventure magique que nous avons vécue côte à côte. Et qui, en plus, n’est pas terminée puisqu’elle bénéficie actuellement d’un petit rebondissement inattendu avec cette pub pour un téléphone californien de couleur jaune.
Banana na ! Banana na !»