« Nous avions besoin de prendre l’air, et c’est comme ça que nous avons quitté la ville. Mais comme nous ne pouvions pas aller ailleurs, nous l’avons quittée de l’intérieur. » Au Diamant Palace, vieux théâtre abandonné, l’animateur d’une radio pirate décompte les jours passés entre ces murs et nous emmène dans son univers particulier.
Diamant Palace est la nouvelle production du Biais Vert, un docufiction qui aborde d’une manière nouvelle les enjeux écologiques d’aujourd’hui. Cette websérie de six épisodes a été écrite et réalisée par Félicien Bogaerts, Elias Sanhaji et Ilyas Sfar, en co-production avec Clair-obscur Productions et Synchrone Medias. Dans le cadre du Biais Vert dont ils sont les investigateurs, Félicien, Elias et Ilyas ont déjà produit toute une série de vidéos de sensibilisation et de vulgarisation autour des enjeux politiques et sociaux qui découlent des questions environnementales. Avec Diamant Palace, ils ont décidé de mélanger les différents médiums qu’ils ont pu développer durant les plus de quatre ans d’existence du Biais Vert : le reportage, la chronique et la fiction.
Animés par une volonté d’aller plus loin et de développer plus en détails des sujets et enjeux dont on ne parle pas assez aujourd’hui, comme l’urbanisme et l’aménagement du territoire, l’équipe du Biais Vert s’est entourée d’invités pointus dans les domaines abordés à travers les épisodes de la série.
Dans le premier épisode, nous retrouvons Philippe Descola, anthropologue et Rachel Devresse, activiste et zadiste. On y aborde le sujet de l’anthropocentrisme et on nous y parle de ZAD (zone à défendre). Philippe Descola nous y dit également que « la nature n’existe pas », qu’elle « est une abstraction philosophique que nous avons inventée, nous les modernes », la notion de nature créant alors une séparation entre l’humanité et le reste du monde vivant ; avec d’un côté la nature et de l’autre les humains, alors qu’en réalité il s’agit d’un tout interdépendant.
Dans le deuxième épisode, on nous parle de greenwashing et de l’anthropocène, « l’ère de l’humain ». Christophe Laurens, architecte et paysagiste et Tanella Boni, philosophe et poétesse nous parlent de fragmentation des territoires, de métropolisation, d’urbanisation et de colonisation.
Le troisième épisode aborde le sujet de la technologie et des robots, nous présentant les trois lois de la robotique formulées par l’écrivain de science-fiction Isaac Asimov. Alain Damasio, écrivain et Vinciane Despret, philosophe discutent de la technologie et de ce qu’elle représente aujourd’hui, de sa place dans notre avenir, des jeux de pouvoirs qu’elle implique et de notre dépendance à celle-ci.
La structure récurrente que l’on retrouve dans chaque épisode fonctionne bien : on retrouve Félicien à l’antenne de la radio pirate alors qu’il introduit le sujet général de l’épisode, nous donne quelques clés de compréhension, pour ensuite nous laisser entre les mains des experts qui poussent les notions introduites plus loin. Le tout sera entremêlé de moments de fiction parfois poétiques, parfois drôles, parfois simplement figuratifs ou illustratifs, apportant un peu de légèreté. Le scénario a été élaboré de manière à se reposer sur les forces qu’ils ont pu développer durant leurs quelques années de productions du Biais vert : des textes bien travaillés, accessibles mais toujours enrichissants.
Même dans les nuits les plus sombres, il n’est pas impossible de déceler au loin quelques lumières, ou du moins quelques lucioles. Quand le monde que nous connaissons semble se défaire dans un grand fracas, certains, discrètement, sont déjà en train d’inventer d’autres mondes.
La scénographie et la mise en scène sont très travaillées et permettent une immersion aisée et immédiate dans le monde de Diamant Palace. Les décors aux allures oniriques font parfois penser aux décors de films post-apocalyptiques, pourtant la série nous donne des éléments de réflexion pour penser notre société autrement et justement éviter cette apocalypse écologique qui pèse au-dessus de nos têtes.
Je ne peux que vous recommander de découvrir les trois premiers épisodes de Diamant Place, et de vous abonner à la chaîne YouTube du Biais Vert pour ne pas manquer les trois épisodes qui sortiront dans les mois à venir.