Kaos, la colère des dieux
Netflix a eu la brillante idée récemment de remettre au goût du jour les mythes grecs avec la série Kaos. Le produit fini donne un joyeux feu d’artifices d’imagination de subtilité et de culot. Bienvenue au Royaume des dieux.
Dans une ville fictive occidentale du XXIe siècle, gît Crète, cité théocratique dirigée par Minos, un tyran manipulé par la volonté des dieux, avide d’adoration et d’immortalité.
Au milieu de cet ordre établi, Eurydice (Riddy), n’a pas le courage de quitter son petit ami Orphée, chanteur à succès, mais lorsqu’elle décide d’en avoir le courage, elle est victime d’un accident de la route et fini aux enfers. Dionysos, demi-dieu en conflit avec son père, Zeus, décide de renverser la toute-puissance du Roi des dieux en aidant Orphée à accomplir l’impossible : ramener sa femme du Royaume des morts.
Eurydice jouée par Aurora Perrinneau © Photo IMDb
Basée sur plusieurs mythes célèbre de l’Antiquité Grec (qui n’ont aucun rapport entre eux), les créateurs de la série s’inspirent beaucoup des moments forts du XXe siècle tout en jouant avec les enjeux de notre époque. Zeus enfile enfin ses habits de tyran et de tortionnaire, Héra n’est plus une simple déesse vengeresse, mais une femme qui fait de son mieux pour garder un certain contrôle sur sa vie. Ce qui est bien entendu au centre du débat, c’est la question du libre-arbitre face à la destinée et aux prophéties (thème central de la mythologie grecque). Ai-je une quelconque influence sur ma vie, ou bien tout est déjà écris et se passera comme prévu ? Le « pire » dans tout cela, c’est que même les dieux y sont soumis, les personnages les plus puissant sont donc les Moires et les Furies qui « contrôlent » le monde.
Les Furies version motardes © Photo Daniel Escale pour IMDB.
Il est savoureux de voir une tel maîtrise du sujet, et un usage aussi juste des couleurs et de la mise en scène. Là où le monde des humains est coloré, les enfers dirigés par Hadès sont d’un noir et blanc non contrasté, digne des films de Fritz Lang ou du Procès d’Orson Wells.
Les personnages et costumes sont très travaillés, la garde-robe de Dionysos et de Zeus est chatoyante à souhait. Minos semble sortir tout droit du fascisme italien, voire de Franco ou de Salazar, sa fille Ariane ressemble à une ministre ou présentatrice TV.
Hadès, dieu des Enfers, campé par David Thewlis © Photo Justin Downing pour IMDb
Les furies sont inspirées des Hells Angels, et les Moires sont une relecture des 3 Grâce version Rocky Horror Picture Show.
Le casting n’est pas en reste, loin de là, il est agréable de voir Jeff Goldblum (pourtant adorable dans la vraie vie), prendre un malin plaisir à jouer un totalitaire sadique et pleurnichard en même temps, comme un mélange entre le Prince Jean du Robin des Bois de 1973 et Jeoffrey Baratheon de Game of Thrones. Héra, sa femme, subtilement joué par Janet McTeer, n’est autre qu’une version mythologique de Claire Underwood dans House of Cards. Amusant également de voir David Thewlis (Rémus Lupin dans Harry Potter), joué Hadès, Dieu des Enfers, alors qu’il interprétait Arès, dieu de la guerre dans Wonder Woman en 2017.
Nabhaan Rizwan interprète avec brio le demi-dieu Dionysos © IMDb.
Prométhé, le narrateur, n’est campé par nul autre que Stephen Dilllan (Stannis Baratheon dans Game of Thrones) en tenue de sport. La palme revient cependant au casting presque inconnu qui campe les autres personnages : Aurora Perrinneau dans le rôle d’Eurydice, Kylian Scott dans le rôle d’Orphée, Leila Farzad dans le rôle d’Ariadne et surtout Nabhaan Rizwan dans le rôle de Dionysos.
Jeff Goldblum en tout-puissant Zeus © IMDb
Étant donné l’actualité du sujet, l’incrustation parfaitement juste de personnages noirs et trans, ne pouvait que provoquer la colère des conservateurs, mais il n’en fut rien. La série connut un franc succès, hélas, l’absence de véritable publicité ou de promotion de la part de Netflix à l’égard de cette série, a résulté en ‘’moins de vues que prévu et les dirigeant de la plate-forme décidèrent d’annuler la saison deux, pourtant habilement annoncée par le climax du dernier épisode. Espérons que l’engouement populaire puisse éventuellement faire fléchir la décision du conseil de Netflix.
Bande-annonce Kaos en FR :