Les romans d’Armel Job, quand on y prend goût, on ne peut plus s’en passer. Et cette année encore, Le meurtre du Docteur Vanloo ne déroge pas à la tradition.

Le meurtre du Docteur Vanloo(2023), Armel Job, Robert Laffont, 342 pages

Les personnages sont soigneusement décrits. Du côté de la justice, la jeune Sophie Lebrun affronte sa première grande affaire criminelle et elle ne veut pas torpiller sa carrière, la juge d’instruction, suit ses a priori et n’en démord pas. Gênant dans son métier, d’autant qu’elle attend ses (très) prochaines vacances et veut boucler l’affaire au plus vite. Son comportement condescendant avec sa jeune collègue ne la rend pas sympathique. Le commissaire Demaret, expérimenté, suit la méthode du rond-point. Il explore chaque piste jusqu’à tomber à l’impasse qui l’oblige à tenter une autre sortie.

Lisse mais perspicace, il cogite, mais garde ses réflexions pour lui. Il obéit à la juge d’instruction et accède à toutes ses demandes sans faire de vagues, mais garde un esprit clair, vif. Il n’attaque personne de front, ne semble pas s’offusquer des mensonges, mais arrive toujours à pousser son interlocuteur à s’empêtrer dans ses contradictions.

Et en face, les villageois. Le riche Éric Vanloo, chirurgien aux Luxembourg, tout proche. Tout le monde le croit célibataire. Don Juan impénitent, il collectionne les conquêtes qu’il reçoit dans le presbytère qu’il habite. Il s’attire une sourde animosité le jour où il séduit Lynn, épouse du vétérinaire Mathias Warland, dérangeant ainsi l’ordre apparent de la région. Mathias, justement, mari cocu mais amoureux, il attend stoïquement de retrouver sa femme. Maureen, baby-sitter des enfants Warland, la tenancière de l’hôtel-restaurant du coin voit beaucoup et entend tout. 

Et puis, à la mort du chirurgien, on apprend stupéfait qu’il est marié à Candice. Sa femme vit à Bruxelles n’attendant que le divorce pour vivre son amour de jeunesse avec un jeune photographe sans le sou. En effet Candice a été mariée à Éric Vanloo et ce mariage a été arrangé entre son père et le père du chirurgien.

Au fil des pages, le lecteur avance dans un véritable labyrinthe de relations complexes, que ce soit du côté de la justice, ou de l’entourage proche et moins proche du médecin. Les personnages interagissent directement, et agissent à leur guise ou comme ils peuvent …

On essaie de découvrir des indices, on se trompe, on suppute, on n’est pas plus avancé … Le roman défile à toute allure, de rebondissement en rebondissement, jusqu’à l’extrême fin du livre.

Une fois encore, Armel Job nous fait profiter d’un style ardent, vif, incisif. Même si on participe au cheminement de pensée des personnages, bien malin qui pourra les anticiper.

Et tout cela dans un décor ardennais que l’auteur dépeint si bien. Les paysages s’animent sous nos yeux, et les personnages du roman font naître une kyrielle de sentiments que l’on ressent avec plaisir, intérêt. 

Une nouvelle réussite d’un tout grand écrivain de notre pays.

À propos de l’auteur

©Frédéric Raevens

Armel Job est né en 1948 à Heyd. Après des études secondaires classiques, il poursuit son cursus et obtient une licence en philologie classique à l’Université de Liège. Après avoir enseigné le grec et le latin pendant 23 ans, il occupe différents postes de direction de 1993 à 2010. Il quitte ensuite la direction pour se consacrer à sa carrière d’écrivain. Auteur d’une vingtaine de romans, il a obtenu également de nombreuses récompenses dont le Prix René-Fallet du premier roman en 2001, pour La Femme manquée, le Prix Victor-Rossel des jeunes en 2002, pour Héléna Vannek, le Prix des lycéens en 2003 pour Héléna Vannek, le Prix du jury Giono en 2005 pour Les Fausses Innocences, un roman qui se déroule dans la partie germanophone de la Belgique, le Prix de la personnalité Richelieu en 2007, le Prix Simenon en 2010 pour Tu ne jugeras point, le Prix des lycéens en 2011, où il reçoit les deux prix (égalant ainsi Bernard Tirtiaux), et enfin le Prix Marcel Thiry de la Ville de Liège pour Dans la gueule de la bête.

Il est officier du Mérite wallon depuis 2011 et Chevalier de la Pléiade.


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