Le mystérieux « Prieuré de Sion » en partie dévoilé par Jean-Patrick Pourtal
L’écrivain Jean-Patrick Pourtal, passionné de mystères, vient de sortir une enquête sur le Prieuré de Sion, une organisation quasi mythique, que le monde entier a découverte en 2003 lors de la sortie du fameux « Da Vinci Code » de Dan Brown. Fantaisie de romancier ou réelle société secrète ?
Illustration : Un chevalier de l’Ordre de Calatrava au combat, Parador in Alcañiz © Wikipedia
D’autres que lui ont déjà enquêté sur le Prieuré de Sion, et se sont perdus dans l’écheveau labyrinthique de cette histoire. Jean-Patrick Pourtal, lui, a su tirer le fil d’Ariane qui l’a guidé sur le chemin tortueux de cette mystérieuse affaire. Il faut de la persévérance, un esprit ouvert et une méthodologie rigoureuse pour tenter de comprendre les tenants et les aboutissants de ce qui peut semblait, au premier abord, une mystification.

Le nouvel opus passionnant de Jean-Patrick Pourtal © Max Milo éditions
Jean-Patrick Pourtal déroule son enquête sur plus de 200 pages, denses et étayées. Son ouvrage s’intitule Des Templiers au Prieuré de Sion. Difficile de tout relater en quelques mots, aussi vais-je m’attacher plus particulièrement au Prieuré de Sion, qui est certainement moins connu, et ne pas m’attarder sur les Templiers, sujet fantastique mais étudié depuis des siècles par les historiens. Je ne peux que vous conseiller la lecture du livre pour avoir une vision globale sur le sujet.
En plus d’avoir réalisé une enquête sérieuse, l’auteur se mouille et donne ses interprétations et ses opinions personnelles, qu’il annonce comme telles, faisant clairement la part entre le travail historique et les pistes de réflexion qui lui sont propres, ce qui est courageux et passionnant.
La Caverne espagnole et La Crypte
Lorsque les Templiers furent arrêtés en ce fameux vendredi 13 octobre 1307, cet ordre fut anéanti en France, mais pas dans les nombreux autres pays où il était présent. La vindicte du roi Philippe le Bel n’avait pas le pouvoir de se répandre à travers toute l’Europe, et les souverains étrangers ne voyaient pas pourquoi ils auraient dû s’en prendre aux célèbres chevaliers aux blancs manteaux. L’ordre survécut, notamment en Espagne, où il se fondit dans un ordre déjà existant, l’Ordre de Calatrava.

Une autre spécialiste des Templiers, et amie de l’auteur : Patricia Darré, et son livre « La Révélation des Templiers » © Michel Lafon
Cette mystérieuse Caverne espagnole serait un ordre templier secret au sein même de l’Ordre de Calatrava, et qui garderait les connaissances ésotériques des Templiers. Il se serait perpétué jusqu’à nos jours. Un autre nom pour ce groupe ésotérique secret serait La Crypte, une émanation un peu plus visible de la Caverne espagnole, semblable à ce qu’est la pointe émergée d’un iceberg. Mais dès que l’on parle de ces organisations, gardent-elles encore le caractère secret qu’elles sont supposées avoir ? Ou bien leur dévoilement, très partiel, est-il une stratégie justement voulue par elles ? Une autre confrérie templière de cette même galaxie, tout aussi discrète, s’appellerait La Chaîne d’Anne, dont le dernier Grand Maître était Maxime de Roquemaure.
Maxime de Roquemaure, l’homme de l’ombre
Cet érudit, grand ésotériste, aurait été chargé de certaines missions, telles qu’un dévoilement limité et maîtrisé des mystères templiers. Dans la vie profane il travailla dans les services secrets français, négociant discrètement un retour du comte de Paris sur le Trône de France, projet qui se solda par un échec. Cet échec est-il à mettre sur le coup du sort, ou cela arrangeait-il finalement bien le représentant de La Chaîne d’Anne ? Nous le verrons plus loin, en parlant de la lignée royale mérovingienne.

Maxime de Roquemaure (1888-1974), à droite, pendant une mission au Maroc © francaislibres.net
Pour sortir de l’ombre, la Crypte avait besoin d’un homme qui servirait de dirigeant à une résurgence templière. Une première tentative fut faite en 1952 par l’entremise de Jacques Breyer, qui fut enseigné par son mentor Maxime de Roquemaure, et qui fut à l’origine de la « Résurgence d’Arginy ». Mais au bout de quelques années des dissensions se firent jour, des schismes, et à partir de l’année 1956 le projet prit l’eau. Un « plan B » fut alors mis en place à Gisors, sans plus de succès. Un « plan C » arriva ensuite, avec un nouveau candidat prometteur, Pierre Plantard.
Pierre Plantard, manipulateur manipulé ?
Étrange personnage que ce Pierre Plantard, qui dans sa jeunesse flirta avec l’extrême droite, l’Action Française de Charles Maurras, et la collaboration vichyste. Il écrivait dans une revue anti-maçonnique, ce qui ne l’empêcha pas dans l’après-guerre de se faire initier en Franc-Maçonnerie. Épris de reconnaissance sociale et en même temps passionné sincère d’ésotérisme, il était un bon candidat pour une légère manipulation de son égo par Maxime de Roquemaure, qui l’enseigna à son tour. Pierre Plantard créa en 1956 une association Loi 1901 du nom de Prieuré de Sion, et qui se présentait comme une association de défense des intérêts des locataires des HLM… Mais aussi comme un ordre néo-chevaleresque, dont l’origine remonterait à Godefroid de Bouillon. Le message semble brouillé dès le début. À dessein ?


Pierre Plantard (1920-2000) © DR et Gérard de Sède (1921-2004) © Wikipedia
Mais avec le temps sa créature lui échappa, Plantard n’étant pas à une originalité près, une « plantardise ». Par exemple, en forgeant d’étranges documents qu’il déposa à la BNF, dont une liste brillantissime de supposés Grands Maîtres du Prieuré de Sion, peut-être un peu trop prestigieuse pour être vraie. Il se présenta lui-même comme étant le Grand Monarque, prétendant mérovingien au Trône de France. Lorsque l’affaire commença à devenir plus politique, la police française lui demanda de mettre ses ambitions en veilleuse. Plantard influença néanmoins des auteurs à succès comme Gérard de Sède et son célèbre Les Templiers sont parmi nous (1962), ou l’homme de médias anglais Henry Lincoln et son encore plus célèbre L’Énigme Sacrée (1982), qui inspira plus tard le Da Vinci Code (2003) de Dan Brown.
Quel est le véritable but du Prieuré de Sion ?
Le projet de La Crypte, au travers du Prieuré de Sion, était de porter au jour l’idée d’une résurgence mérovingienne, habillée dans les vêtements d’une résurgence de l’Ordre du Temple. C’est un projet politique, dont les démêlés avec le pouvoir en France remontent à plusieurs siècles. Les Templiers avaient-ils des documents sur la lignée mérovingienne qui auraient remis en cause la légitimité de la lignée capétienne ? Est-ce pour cela qu’ils furent anéantis par Philippe le Bel ? Le Masque de Fer, que Louis XIV avait emprisonné, était-il le duc de Guise, dernier descendant légitime de la lignée mérovingienne ? Un danger pour son propre pouvoir ?

L’abbé Saunière (1852-1917), le mystérieux curé de Rennes-le-Château © Wikipedia
Bérenger Saunière, l’abbé de Rennes-le Château, avait-il retrouvé au hasard de travaux de rénovation, des documents de ce type cachés dans son église ? Est-ce de là que venaient ses fonds, envoyés par la duchesse de Chambord, veuve du prétendant capétien au Trône de France ? Pour acheter son silence ? Pourquoi les Habsbourg s’intéressaient-ils à ce simple curé de province d’un village perdu du fin fond de la France ? Jean-Patrick Pourtal a bien des pistes crédibles qu’il développe dans son ouvrage.
Les Mérovingiens, célèbres inconnus
Gérard de Sède les appelle La Race Fabuleuse dans un de ses ouvrages (1973). La raison ? On ne connaît pas bien l’origine des Mérovingiens mais, par des chemins tortueux, ils seraient ni plus ni moins que les descendants de Jésus ! Cette théorie, dont la démonstration laisse à désirer, avait pour but initial dans le chef du Prieuré de Sion, de légitimer leurs prétentions au Trône de France. Mais le public, apprenant cette « information » inouïe, en a décidé autrement. Ne s’attachant pas au projet dynastique et politique derrière ces révélations, les humains de ce début de XXIème siècle se sont pris à rêver d’une descendance du Christ. Une idée qui fait évoluer le rapport actuel à la religion chrétienne.

Marie-Madeleine aux pieds de Jésus, « Noli me tangere ! » ou « Ne me touche pas ! », tableau de Anton Raphael Mengs (1769), Palais Royal de Madrid © Wikipedia
Et pourquoi pas ? Si Jésus était un érudit et un rabbin reconnu en son temps, il aurait été tout à fait normal qu’il soit marié et qu’il ait des enfants. C’était la règle, et elle est toujours d’application aujourd’hui. Sa femme était-elle Sainte Marie-Madeleine ? Les évangiles n’en parlent pas, mais n’oublions pas que nos quatre évangiles ont été choisis dans les premiers temps du Christianisme parmi des dizaines d’évangiles existants. Et encore, trois d’entre eux sont très proches les uns des autres, ce sont les évangiles synoptiques. Seul Saint Jean est un peu différent.
Alors, les Mérovingiens sont-ils les descendants de Jésus ? Pour aller plus loin, lisez Des Templiers au Prieuré de Sion, par Jean-Patrick Pourtal, aux éditions Max Milo, 212 pages, 19,90 €.
Patricia Darré nous dévoile « La Révélation des Templiers »