« Le Théorème du vaquita » est un roman graphique sur les combats écologiques de Hugo Clément. Il est co-écrit avec Vincent Ravalec et illustré par Dominique Mermoux. Une lecture édifiante et fluide, éclairée par des illustrations poignantes, qui rendent le propos plus tangible. Si le constat est alarmant, l’objectif de ce livre n’est pas de culpabiliser, mais d’éveiller les consciences et d’amener à réfléchir aux solutions.

Une cause universelle

On ne le présente plus, cependant pour ceux qui seraient passés à côté, Hugo Clément est un journaliste et militant écologiste, ardent défenseur du bien-être animal. Il anime aujourd’hui sur France 2 l’émission documentaire « Sur le front » et dirige le média d’enquête « Vakita ».

Les questions climatiques et la biodiversité, Hugo Clément en a fait son cheval de bataille. Il est entre autres l’auteur du livre « Comment j’ai arrêté de manger les animaux » (2019), dans lequel il partage son parcours personnel vers le végétarisme et explore les enjeux éthiques, environnementaux et sanitaires liés à la consommation de viande. Il a également écrit l’essai « Journal de guerre écologique » (2020) et « Les lapins ne mangent pas de carottes » (2022), un ouvrage qui déconstruit les représentations que nous avons du monde et plus particulièrement des animaux. Et qui nous rappelle notre appartenance à ce règne animal que nous prenons si souvent de haut !

© Romain Rigal

« Le Théorème du vaquita », qu’est-ce que c’est ?

Le titre du livre est inspiré par un petit marsouin du Pacifique appelé le vaquita, un cétacé de la famille des dauphins, au bord de l’extinction. Il est le mammifère marin le plus menacé au monde, puisqu’on en dénombre actuellement entre 6 et 10, peut-être moins, au moment où vous nous lisez.

Et si le vaquita est en danger extrême, c’est en raison de la surpêche illégale dans son habitat naturel, la mer de Cortez, au Mexique. Certains pêcheurs et braconniers le capturent accidentellement dans leurs filets. Ces derniers ciblent en réalité un tout autre animal, le totoaba, dans le but de vendre au marché chinois sa vessie, à laquelle on prête des vertus miraculeuses.

Une jeune vaquita qui sera placée dans un environnement protégé © VaquitaCPR / National Geographic

De façon plus symbolique, le titre « Le théorème du vaquita » figure l’interdépendance entre les êtres humains et les animaux au sein d’un même écosystème. Hugo Clément utilise une métaphore simple et efficace pour illustrer ce concept : celle d’une maison dont chaque brique représente une espèce. La suppression de quelques briques peut sembler anodine, mais à mesure que leur nombre diminue, des fissures apparaissent. Enfin, lorsque des milliers de briques sont retirés, c’est la maison tout entière qui s’effondre. Et si la maison s’écroule, nous périrons tous ensemble. Il est donc impératif de reconnaître notre interconnexion et de réfléchir à des solutions durables.

La surpêche : un désastre écologique

L’un des chapitres du livre est consacré à la surpêche, qui figure parmi les plus graves menaces pesant sur notre planète. La pêche industrielle a des conséquences dévastatrices sur les écosystèmes marins, mais aussi sur la sécurité alimentaire. Des mesures mondiales sont mises en place en faveur d’une pêche durable, toutefois le chemin est encore long. Des millions de tonnes de poissons sont pêchés quotidiennement, et à ce rythme, les ressources marines n’ont pas le temps de se régénérer.

Bateau de pêche © Freepik

Selon WWF, environ 40 % des animaux marins capturés le sont de façon accidentelle. Impropres à la consommation, ils périssent dans une lente agonie, pour finalement être rejetés en mer. C’est le cas aussi hélas de nombreuses espèces protégées, notamment les dauphins et tortues de mer.

Par ailleurs, certaines coutumes ancestrales et barbares ont toujours cours, telles que la chasse traditionnelle des dauphins-globicéphales aux Îles Féroé, qui consiste à tuer l’animal pour le seul plaisir des hommes : celui de chasser une créature monumentale et de la mettre à mort. Les illustrations du livre montrent une mer de sang, et à la surface, des animaux gisants et agonisants.

Élevage Industriel : un regard sur les conditions de vie des animaux

Dans le monde de l’élevage, les animaux sont souvent tenus à l’écart de notre société, à l’exception notable des vaches. En France, environ 95 % des cochons sont élevés dans des bâtiments fermés et privés de lumière naturelle. Ces animaux, au moins aussi intelligents et affables que les chiens, sont ostracisés et maintenus à distance. Ce manque de lien entraîne une absence d’empathie à leur égard.

Heureusement, des organisations telles que L-214 publient de nombreuses vidéos, certes choquantes mais nécessaires, et dénoncent les conditions d’élevage désastreuses. La plupart du temps, les animaux sont entassés dans des hangars surpeuplés et traités avec des antibiotiques. Ces démarches compromettent non seulement le bien-être des animaux, mais posent des risques pour la santé des hommes.

Usine de traite des vaches © Freepik

Un témoignage marquant est aussi évoqué, celui d’un ancien employé d’abattoir à Limoges, qui décrit des conditions de travail inhumaines. Traumatisé par son expérience, il dépeint des procédés choquants exécutés à une cadence infernale, tels que l’aspiration de la moelle épinière des vaches abattues et l’extraction de fœtus.

Ces récits d’une violence inouïe révèlent l’objectisation des animaux et l’abstraction de la souffrance animale par les industries, qui ont pour seul souci leur rentabilité. Ils soulignent l’importance de repenser tout un système ainsi que nos propres habitudes de consommation.

L’exemplarité de l’intelligence animale

En aparté du chapitre sur la chasse « Faire taire les fusils », on peut lire cette citation saisissante du paléontologue Pascal Picq : « L’homme n’est pas le seul animal qui pense. Mais il est le seul à penser qu’il n’est pas un animal ».

Un papillon sur une lavande © Freepix

À l’échelle de l’évolution, l’espèce humaine est aussi jeune que fragile. « Si la terre avait 24 heures, nous apparaitrions juste avant minuit », lit-on en exergue. Une image frappante qui exprime l’illégitimité de l’homme se sentant intrinsèquement supérieur à tout, encore plus aux animaux. Et que ce soit en matière d’ancienneté ou de capacités physiques et cognitives, rien ne justifie cette arrogance humaine, encore moins l’indifférence face à la douleur des animaux et la négation de leur capacité à penser.

On découvre au cœur du livre un bel hommage sur les facultés remarquables des papillons. Leur aptitude à apprendre de nouvelles informations, à s’adapter à leur environnement et à utiliser des stratégies sophistiquées pour leur survie, nous rappellent que l’intelligence n’est pas l’apanage des seuls êtres humains.

Des solutions pour un avenir meilleur

La fonte des glaces, la pollution, la destruction de la biodiversité et l’épuisement des ressources universelles, sont autant de préoccupations cruciales qui participent à la crise écologique.

Le livre de Hugo Clément met en évidence que la planète est malade et ses être-vivants malmenés, mais il est résolument tourné vers l’avenir. Malgré les défis pressants, il offre un message d’espoir et envisage les remèdes. En réduisant notre consommation de viande et de poisson, en soutenant les initiatives de protection, en repensant notre manière d’habiter la Terre, nous pouvons inverser la tendance. Et œuvrer pour un avenir plus durable.

Le cochon Barbapapouille du refuge Groin Groin © Philippe Sueur

Pour finir, si nous devions relever quelques exemples inspirants qui y sont mis en lumière, citons la formidable initiative à l’origine du refuge antispéciste Groin-Groin. Cette ferme, située à Neuvillette-en-Charnie, entre Le Mans et Laval, accueille des animaux le plus souvent sauvés des abattoirs, en particulier des cochons, d’où son nom très parlant, et leur offre une vie digne de ce nom à l’air libre, dans des enclos douillets et des verts pâturages. Celle qu’ils méritent. Il est possible d’y parrainer des animaux afin de contribuer à leur soin, pour cela nous vous invitons à vous rendre sur le site de l’association. Notons aussi la magnifique mesure de sauvegarde en Ouganda des gorilles de la forêt de Bwindi, une espèce très menacée, et qui bénéficie d’une protection et d’une surveillance accrues.

 « Le Théorème du vaquita », œuvre pédagogique et motivée avant tout par un désir de sensibilisation, est plus qu’un simple livre graphique : c’est un appel à l’action, une invitation à réfléchir à notre relation au monde dans lequel on vit, à œuvrer de façon collective pour préserver la diversité et l’avenir de notre planète.


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