Patrice Laffont, le dilettante de haut vol
« Je suis un peu dilettante et un peu paresseux. Je me suis laissé vivre », avait confié Patrice Laffont à Marc-Olivier Fogiel. Une modestie que sa grande carrière télévisuelle dément.
Patrice Laffont est malheureusement décédé aujourd’hui d’une crise cardiaque. Si nul ne connaît ni l’heure ni le lieu, pour lui qui était un hypocondriaque affirmé, cela n’est pas une mauvaise solution. Tout plutôt que la souffrance et l’agonie d’une longue maladie. Nous n’aurons pas hélas le plaisir d’aller l’applaudir sur les planche en septembre avec Olivier Minne, comme il le prévoyait. Octogénaire en pleine forme, plein de projets, né sous le signe du lion, il allait avoir quatre-vingt-cinq ans dans deux semaines.
Il a été victime d’un accident cardiaque dans sa maison d’Oppède, charmant village moyenâgeux du Vaucluse qui a abrité une communauté d’artistes pendant la guerre, dont Consuelo de Saint-Exupéry, la femme de l’écrivain. La ministre de la culture Rachida Dati a rappelé « sa bienveillance et son espièglerie qui ont enchanté des générations de téléspectateurs ».
Patrice Laffont était un octogénaire en pleine forme © AFP
Patrice Laffont était le fils du célèbre éditeur Robert Laffont. Il avait une voie toute tracée dans l’édition, mais il a préféré suivre son propre chemin, plus aventureux, comme il le déclare en 1975 dans L’Écho Républicain de la Beauce et du Perche : « Je suis ce qu’on pourrait appeler un fils de famille. Mon père est l’éditeur Robert Laffont. J’ai donc bénéficié d’une vie, d’une atmosphère confortables, et j’aurais pu faire sans difficultés une belle carrière dans l’édition avec l’aide de « papa ». Mais le problème, c’est que je n’avais pas envie qu’on dise « normal, c’est le fils de… ». Orgueil de ma part, ou simplement envie de me prouver, mais j’ai préféré assumer mon propre destin. »
Dans Le Gendarme à Saint-Tropez, il apparaît dans la décapotable, avec le t-shirt noir:
Il s’essaie d’abord au cinéma et fait quelques apparitions dans plusieurs films dès 1962, notamment en 1964 dans Le Gendarme de Saint-Tropez. Et aussi au théâtre dès 1966 dans La bouteille à l’encre. Il poursuivra ces apparitions cinématographiques ou théâtrales toute sa vie, mais c’est évidemment la télévision qui le rendra célèbre avec ses émissions phare qui sont Des Chiffres et des Lettres, Fort Boyard et Pyramide.
Une de ses émissions phare: Fort Boyard © DR
Il en gardait de bons souvenirs mais aussi un regard critique, comme il le confiait à Télé-Loisirs : « Je ne veux pas faire le vieux con, mais à mon époque, il y avait un côté plus mystérieux, plus légendaire. Le père Fouras était dans sa vigie, les stars étaient intimidées en le voyant. Aujourd’hui, on se croirait dans un jeu vidéo. Je trouve que ça a perdu de son mystère. » Récemment il a avait été rappelé pour les 35 ans de l’émission. À cette occasion il confiait toujours à télé-Loisirs : « Pour dire la vérité, j’ai été très flatté que la production pense à moi. Quand ils m’ont expliqué que mon personnage allait sortir d’un placard où il se trouvait depuis vingt ans, qu’il pensait être toujours l’animateur de Fort Boyard, ça m’a fait marrer. Cet endroit, ce jeu, c’est une grande partie de ma vie, je n’ai donc pas hésité une seconde. » Cette émission sera diffusée le 14 août prochain.
La première émission de Des Chiffres et des Lettres en 1972 :