Le 24 février prochain aura lieu la 48e cérémonie des César qui sera, à partir de 2023, positivement différente. L’Académie des arts et techniques du cinéma a enfin pris la décision d’écarter tout professionnel du 7e art étant mêlé à des affaires de violence. Choix nécessaire, bien que tardif, tant l’événement annuel, célébrant le cinéma français, perdait de sa candeur suite à de nombreux scandales.

Souvenez-vous, en 2020, lorsque la maîtresse de la 45e cérémonie des César, Florence Foresti, a enchaîné les blagues et commentaires cinglants, mais mérités, à l’encontre de l’un des nommés de l’année. « Bonsoir, bienvenue à la cérémonie des taulards… Euh des César, a-t-elle ainsi lancé en préambule de la soirée. Il paraît qu’il y a des gros prédateurs… Euh producteurs dans la salle. Ça tombe bien, je suis bien équipée… pour signer les gros contrats ! Pour le photocall vous ferez attention à poser de face mais aussi de profil, ça peut toujours servir. »  L’indignation de l’humoriste était palpable durant une grande partie de la cérémonie. Et bien qu’elle n’ait jamais prononcé le nom de l’homme qu’elle dépréciait, les références et le contexte étaient suffisants que pour comprendre qu’il s’agissait du réalisateur Roman Polanski, absent lors de la cérémonie. 

12 nominations/accusations

Accusé au même moment d’agressions sexuelles par 12 femmes notamment pour des faits de relations sexuelles illégales sur une mineure en 1977, le réalisateur de « J’accuse » a néanmoins remporté le César de la meilleure réalisation en 2020. Cette annonce a directement entraîné la sortie remarquée de l’actrice Adèle Haenel, suivie d’une dizaine d’autres spectateurs partageant son désaccord. En novembre 2019, Adèle Haenel, nominée du César de la meilleure actrice pour le film « Portrait de la jeune fille en feu » lors de cette 45e cérémonie, avait accusé le réalisateur Christophe Ruggia « d’attouchements répétés ». Investie dans la lutte contre les violences faites aux femmes, Florence Foresti a également quitté la cérémonie dès la récompense décernée.

Les César des agressions françaises

Manifestation contre la nomination de Roman Polanski avant la 45ème cérémonie des César à Paris, le 28 février 2020. © Gwendoline Le Goff / Panoramic / Bestimage

Depuis 1976, les César récompensent des professionnels du cinéma dans diverses catégories pour saluer les meilleures productions françaises. Plusieurs décennies où les compressions du sculpteur César sont décernées, mais également plusieurs décennies emplies d’esclandres. Dix ans après sa création, le premier scandale éclate lorsque Serge Gainsbourg écrase ses lèvres alcoolisées sur celles de sa fille. Alors à peine âgée de 15 ans, Charlotte Gainsbourg y reçoit le César du meilleur espoir féminin pour le film L’effrontée.

En 1994, Fabrice Luchini et la comédienne Clémence Célarié ont eu l’honneur de remettre le César du Meilleur film devant des milliers de spectateurs. En découvrant la tenue de sa partenaire, Luchini a accumulé les coups d’œil vers la poitrine de la comédienne tout en se léchant les lèvres et lui touchant le bras. Scène « hilarante » à l’époque, si on en croit les rires de l’assemblée. Néanmoins, aujourd’hui, l’événement fait réagir.

Bien que fugitif depuis 1977 aux Etats-Unis suite aux accusations portées contre lui, Roman Polanski a été choisi pour présider la 42e cérémonie des César en 2017. Suite à diverses réactions, notamment celle de la ministre du droit des femmes, le réalisateur renonce finalement au poste. Rappelons que 3 ans plus tard, en 2020, il reçoit le César de la meilleure réalisation pour le film « J’accuse »… 

En novembre 2022, un mois après avoir été mis en examen pour « viols et violences sur conjoint », Sofiane Bennacer a été nominé par l’Académie dans la catégorie meilleur espoir de l’année. Alors que nous réserve 2023 ?

L’année de la dernière chance ?

La prochaine cérémonie sera dépoussiérée afin de booster les audiences de cet événement vieillissant et tiré en longueur. Pour la première fois, l’Académie des César a fait le choix de ne plus mettre en lumière les professionnels du cinéma (réalisateurs, acteur, etc.) mis en cause dans des affaires de violence. Cette nouvelle fait plaisir, sauf lorsque l’on lit entre les lignes… « Ne plus mettre en lumière », comprenez par là qu’un. agresseur.euse pourra toujours être récompensé.e du précieux César, mais que le.a gagnant.e ne sera… pas mis.e en lumière. 

De plus, pour cette 48e cérémonie, ce n’est plus un.e maitre.sse de cérémonie qui a été choisi.e, mais bien neuf : Emmanuelle Devos, Léa Drucker, Eye Haïdara, Leïla Bekhti (la soirée est présidée par son compagnon Tahar Rahim), Jérôme Commandeur, Jamel Debbouze, Alex Lutz, Raphaël Personnaz et Ahmed Sylla. À découvrir le 24 février 2023 sur Canal +