La sacrifiée du Vercors et les larmes du Reich de François Médéline : les relents acides de la seconde guerre mondiale
François Médéline est né le 10 septembre 1977 à Tassin-la-Demi-Lune, dans la banlieue ouest de Lyon. Il passe son enfance dans l’Isère et fait ses études supérieures à l’Institut d’Études Politiques de Lyon. Après un doctorat en sciences politiques, il exercera différents postes dans ce domaine. Petit-fils de deux grands-pères résistants, il a été marqué par son histoire familiale, au point de s’inspirer de la deuxième guerre mondiale pour planter le décor de ses deux derniers romans parus aux Éditions 10/18.
La sacrifiée du Vercors
10 septembre 1944 (est-ce un hasard), le commissaire à l’épuration, le commissaire Georges Duroy, ancien résistant, roule en direction du Vercors, encore largement traumatisé par les exactions commises par les Allemands, rendus plus agressifs encore par le débarquement et la défaite qui se profile. Sa mission est de prendre en charge la baronne Ehrlich, une espionne ennemie qu’il doit remettre dans les mains de ses supérieurs afin de les juger. Mais, arrivé à Saint-Martin-en-Vercors, il se heurte à l’un des chefs du maquis, qui met une mauvaise volonté évidente à signer l’ordre de transfert.
Pendant qu’il est dans son bureau, on prévient le chef du maquis (Choranche) qu’un crime vient de se commettre. Plantant là son visiteur, il se rend sur les lieux. Duroy retarde sa mission pour se rendre lui aussi sur les lieux du crime, en compagnie d’une jeune photographe juive américaine sur le point de suivre les troupes américaines qui vont délivrer les camps de concentration.
Dans une clairière, Duroy, Judith, Choranche et quelques résistants découvrent le corps martyrisé d’une jeune femme, violée, torturée et tondue. Le groupe de jeunes FFI ont tôt fait d’accuser des émigrés italiens qui vivent non loin de là… Mais sont-ils vraiment les coupables de l’assassinat de la jeune Marie Valette, fille et sœur de résistants, mais dont le passé trouble appelle un tombereau de questions …
Georges et Judith se lancent alors dans une enquête qui est en fait le prétexte pour décrire la France à peine libérée, en proie aux règlements de compte, aux luttes d’influence, aux heurts et rancœurs engendrées par 5 années de guerre.
Pas de blanc et noir dans cette histoire. François Médéline dépeint la région du Vercors, martyrisée, où chaque être humain a souffert quel que fut son camp. Quant au commissaire Duroy, fidèle à sa mission, il n’en est pas moins l’un des protagonistes les plus torturés.
Un roman sombre, qui dépeint une époque qui nous parle toujours. L’écriture de François Médéline est nette, coupante, efficace. Ses phrases courtes plantent un décor qui s’invite dans notre imagination. Chaque personnage prend vie, leurs sentiments s’animent, et le style de l’auteur nous emmène dans un passé que la plupart d’entre nous ne regretterons pas de ne pas avoir connu…La richesse de ce roman n’est pas dans le dénouement, mais dans ces tourbillons de sentiments et d’états d’âme qui nous rappellent qu’en matière de psyché humaine, rien n’est jamais simple.
Les larmes du Reich
1951, la guerre s’éloigne et pourtant …
L’intrigant inspecteur Michel, de la brigade criminelle de Lyon débarque dans la vallée de la Drôme, dans la petite ville de Crest. Son vélo, car il se déplace en vélo, le conduit sur une scène de crime, la ferme des époux Delhomme. Ceux-ci ont été sauvagement assassinés et leur fille de 11 ans, Juliette, a mystérieusement disparu.
Inspecteur improbable, Michel pédale sur les routes, voyage léger, tisse de curieux liens avec les témoins qu’il interroge.
Très vite, on ressent de façon diffuse que les protagonistes de l’histoire ne sont pas vraiment de ce dont ils ont l’air. La trame de l’intrigue se développe petit à petit, et le lecteur glane çà et là, des indices qui le poussent à extrapoler la suite. On se dit « Je parie que … ». Sauf que les chemins sont aussi tortueux que les routes avalées par le braquet de l’inspecteur.
Par touche, le passé historique se (re)découvre. François Médéline évoque des sujets sensibles, que les historiens commencent parfois seulement à explorer, comme les bordels installés au sein des camps de concentration. Mais au travers des yeux de l’inspecteur Michel, on approche le drame des enfants juifs cachés, mais qui dans certains cas n’ont pas été rendus, convertis de force, sans respect pour leurs racines.
L’auteur évoque l’affaire Finaly qui a secoué la France de 1946 à 1953.
Pendant tout le roman, on suit l’inspecteur, dont on ne peut deviner aucune pensée, aucune motivation. C’est au lecteur d’essayer de décrypter les comportements, le cheminement …
Différent de la Sacrifiée du Vercors, qui était essentiellement un roman d’ambiance, qui se déroulait en une seule journée, ici, avec Les larmes du Reich, on est dans le vrai thriller historique, qui prend aux tripes.
L’histoire est addictive, il est impossible de lâcher le livre avant la fin. Doit-on regretter que l’histoire des personnages soit juste effleurée (et pourtant on a assez de détails pour comprendre l’intrigue), ou, comme moi, adorer toute la liberté laissée à l’imagination du lecteur ?
Il faut maintenant attendre (avec quelle impatience !) le prochain roman de François Médéline, pour savoir vers quoi il nous emmènera la prochaine fois.
Avec l’aimable participation des Éditions 10/18, un exemplaire de chacun de ces romans sera offert aux vainqueurs de notre concours à venir. Restez connectés à Culturius pour ne pas rater le lancement du concours !