Dernière édition du Festival Jazz Des Cinq Continents : une visite musicale des lieux emblématiques de Marseille
Marciac, Vienne, Nantes, Nice, d’Antibes-Juan-les-Pins, Marseille : la dernière de ces villes accueille elle aussi l’un des plus grands festivals de jazz en France. Le festival Jazz des Cinq Continents dont la première édition remonte à l’an 2000 fait la part belle à la pluralité ethnique et culturelle. La ville de Marseille est haute en couleur. Le festival est à l’image de la cité phocéenne qui draine les courants de jazz du monde entier chaque mois de juillet. Depuis vingt-trois ans, les lieux où se jouent les concerts évoluent, permettant aux profanes comme aux amateurs avertis de savourer le jazz dans des écrins atypiques, classés monuments historiques pour certains. À l’honneur cette année, la Vieille Charité, l’Abbaye Saint-Victor, le parc Longchamp, le Mucem, le Fort Saint-Jean, le théâtre Silvain et le conservatoire Pierre Barbizet.
Qui l’eût cru ?
Entre le 8 et le 13 juillet Dhafer Youssef, Koki Nakano, Oxmo Puccino & Yaron Herman ainsi que Brad Mehldau Trio se sont produits entre les murs de l’ancien asile qu’était La vielle Charité. Qui aurait pu croire que cette immense et magnifique bâtisse au cœur du Panier, quartier hautement touristique et très recherché, abritait « les pauvres et indigents » jusqu’à la fin du XIXe siècle ? Désormais hôtesse d’associations culturelles et artistiques, la Vieille Charité doit son architecture au talentueux Pierre Puget et sa réhabilitation à Le Corbusier. Aussi l’édifice sera classé monument historique en 1963.
Sa majesté Saint-Victor
Place maintenant à cette belle et inébranlable Abbaye Saint-Victor vieille de plusieurs siècles. Eh oui, la majestueuse dame date du Ve siècle ! Y planent les fantômes du Martyre Saint-Victor mais aussi ceux de Marie-Madeleine et Lazare : la crypte vaut le détour ! Et c’est dans ce lieu chargé d’histoire qu’un public comblé a pu assister au concert de Ballaké Sissoko le 16 juillet dernier.
Un écrin de verdure
Le parc Longchamp est quant à lui situé à l’arrière du splendide palais Longchamp. Il fait bon s’y promener, découvrir au détour d’une allée un vieux théâtre de marionnettes, une jolie petite fontaine Wallace comme il en existe quelques-unes à Marseille, les statues de Lamartine et de Valère Bernard, une ancienne volière, un kiosque à musique… Le parc Longchamp : rendez-vous incontournable les 25, 26, 27 juillet derniers pour savourer toute une palette d’artistes comme Gilberto Gil & Family par exemple.
Un amour de Jazz
Enfin le Mucem et dans son prolongement le Fort Saint-Jean. Coup de cœur pour les quatre concerts qui ont eu lieu le 19 juillet avec une véritable révélation : Kahil El’Zabar Quartet . « En provenance de Chicago, où il fonde dans les années 70 l’Ethnic Heritage Ensemble, le percussionniste chanteur Kahil El’Zabar, avec ses formations successives, nous offre depuis des décennies toutes les nuances de la « Great Black Music », du blues au rhythm and blues, de la soul au gospel jusqu’au spiritual jazz… les racines africaines sont représentées et explorées. » Je tiens ces précisions d’un grand mélomane assis à mes côtés.
Dès les premières notes, comme s’ils jouaient déjà depuis des heures, le quatuor uni s’embrase, avec un Kahil El’Zabar souriant, hurlant, grimaçant de joie derrière ses cymbales. Une véritable osmose entre Isaiah Collier au saxophone baryton, Corey Wilkes à la trompette et le magicien du clavier Justin Dillard. « Le son est la puissance qui provient des vibrations. La musique est une force de guérison. Mon intention la plus sincère, ici et pour tous mes projets, est de faire de l’art efficace qui devient utile et inspirant pour les autres » nous dit Kahil El’Zabar.
Le public nombreux du festival ne s’y est pas trompé, c’est une ovation debout qui a accompagné le final de cette prestation. Dans la chaleur de l’été marseillais, sous un ciel étoilé de mille constellations, comme un ange passe, une brise fraîche est entrée dans le Fort Saint-Jean…