I Am Everything : Little Richard, le mythe et l’homme
Pionnier légendaire du Rock and Roll, Little Richard bénéficie d’un grand regain d’intérêt. Le film I Am Everything de Lisa Cortés pose un regard nouveau sur cet immense personnage totalement hors norme.
La genèse de ce film
Présenté au Sundance Film Festival en janvier 2023, les droits de distribution de ce film, une production CNN, ont été immédiatement achetés par Magnolia Pictures. Il a été distribué en salles en avril, le 21 aux USA et le 28 en Angleterre – et également en Hollande.
Il est réalisé par la documentariste et productrice afro-américaine Lisa Cortés, dont c’est la troisième réalisation. Et grâce aux organisations Empreinte(S) et Kinograph, une grande première bruxelloise a eu lieu à Flagey, le 20 octobre !
Avec une présentation de la responsable d’Empreinte(S), Sylvie Traisnel. Cette organisation qui s’évertue à présenter des documentaires musicaux, avec divers partenaires dont Flagey. I Am Everything est leur cinquantième présentation à ce jour !
Little Richard, la légende décryptée
Son documentaire s’attache à nous montrer les méandres de la vie et de la carrière de cette légende du Rock and Roll. Le principe est assez usuel : des images d’archives de l’artiste, qui chante ou parle lors d’émissions TV. Et de copieuses interviews d’intervenants de tous bords et de toutes générations.
On démarre en août 1972, lors d’une émission de la BBC Late Night Line-up, soit la veille d’un fameux show de pionniers du rock avec lui et Haley, Jerry Lee Lewis, Chuck Berry. Il s’est tenu à Wembley et fit l’objet d’un film resté fameux.
Puis on suit la vie de Richard Penniman, né à Macon, Géorgie le 4 décembre 1932. Dans une famille très pauvre de douze enfants.
Une personnalité tourmentée
Le futur Little Richard est à la fois un personnage flamboyant, totalement hors norme et en réalité, profondément tourmenté. Comme pour d’autres artistes, tel un Michael Jackson, les racines de cette split personality sont sans doute à chercher dans une relation très conflictuelle avec son père.
Richard est efféminé et montre à la puberté des tendances homosexuelles que son père, rigoriste, ne supporte pas. Il se voit chassé de la maison familiale !
Le père lui-même n’est pas exempt de contradictions puisque, bien que pasteur, il possède un night-club et vend des boissons alcoolisées de contrebande. Le jeune Richard accompagne un medicine show ambulant, un charlatan vendant de l’huile de serpent miracle.
1947, la première scène
Mais c’est dans sa ville natale de Macon, au Civic Auditorium où il travaille, qu’il goûte pour la première fois les capiteux effluves de la popularité d’un soir lorsque la sensationnelle Sister Rosetta Tharpe, l’ayant entendu chanter, l’invite à monter sur scène, où elle se produit.
Il chante un grand succès de cette pionnière du rock and roll, que l’on commence enfin à reconnaître comme telle ces dernières années : Strange Things Happening Every Day. Nous sommes en 1947. Nous avons droit à quelques archives très courtes de l’artiste. On apprend qu’il tire ses fameux «whoo hoo !», ses interjections vocales qui sont comme sa marque fabrique, de la grande Marion Williams.
I Am Everything a le mérite de révéler d’autres influences masculines de Richard, qui se rend compte qu’il est fait pour le spectacle : Billy Wright, à qui il emprunte son look dont la fine moustache et la coiffure en pompadour, ou Eskew Reeder dit Esquerita (voir plus bas). Sans oublier Louis Jordan. On voit de très courts passages de ces grands artistes.
La carrière discographique débute en 1951 sur le prestigieux label RCA. Et ensuite, court passage chez les disques Peacock (sans mention de cela dans le film) avec deux singles sans succès et départ en colère pour raisons financières, déjà.
Little Richard, un chanteur de rhythm and blues qui s’est parfois produit dans des productions de drag -en robe -ne s’impose pas encore et connaît un creux de vague : il fait la plonge pour un établissement de la ligne Greyhound de sa ville natale Macon.
Et Little Richard rappelle qu’il n’a même pas le droit de manger dans l’établissement dont il fait la vaisselle !
1955, le big bang !
Au creux de la vague, deux artistes sont les messagers du destin pour lui. D’abord le futur Esquerita, le dénommé Eskew Reeder, gay comme Richard, qui lui apprend à jouer du piano et à développer son style reconnaissable entre mille. Puis Loyd Price, déjà très connu, qui lui conseille de contacter le label Specialty.
Première session d’enregistrement à New Orleans avec l’explosif Tutti Frutti -un coup de maître ! Mais le titre original, faisant référence au sexe anal, se voit «lissé» par une autrice de chansons noire, Dorothy La Bostrie.
Un très beau point : Lisa Cortés a exhumé une interview de cette personne, décédée le 4 novembre 2007. Et un procédé qui apparaît souvent : on voit des explosions d’étoiles, de poussières d’étoiles, de lentilles d’argent kalédoscopiques, etc. Tout cela pour donner une image d’explosion cosmique, ce que fut dès sa parution en octobre 1955 Tutti Frutti.
Le fossé entre Blancs et Noirs dans le monde du spectacle
Richard s’est souvent plaint d’être mis sur le côté par le show- business de par sa couleur de peau. Une pratique courante à cette époque, maintes fois dénoncée, est expliquée dans le film.
Des succès de rythm and blues noir sont repris par des artistes blancs et blanches. Des talking heads, de jeunes chercheurs et chercheuses et historiens-historiennes de musique et ethnomusicologie font partie du défilé ininterrompu des témoins.
Noirs en général sauf Billy Vera. Et le marché blanc est plus lucratif que celui des Noirs.
Une intervenante, Zandria Robinson, remarque que, plutôt que d’appropriation culturelle, il s’agit plutôt d’oblitération : observation intéressante. Exemple archiconnu : le jeune rocker très doux et crooner à succès Pat Boone livre une version insipide de Tutti Frutti…triomphe, bien qu’enregistrée contre son gré !
On voit Elvis et sa propre version, très convaincante, lors d’un Stage Show (TV) de Tommy Dorsey de février 1956. Richard exprime son indignation dans une interview : Boone a vendu plus de Tutti Frutti que lui.
Ostracisation ou non ?
Il est important de s’attarder un peu sur cette question cruciale. En fait, l’imposture était trop criante et elle n’a pas duré. Oui, Little Richard a été écarté sous certains aspects : on ne l’a pas vu dans les grands shows TV lors des années cinquante.
Il ne vient chez le fameux Dick Clark (par exemple) qu’en 1964. Celui-ci présente le très fameux show TV American Bandstand où des teenagers blancs dansent sur les succès du jour.
Et en 1964, Richard, moins exubérant que d’habitude en interview, exprime sa satisfaction… de ce que les Beatles reprennent ses chansons ! Indignation à géométrie variable, donc.
Alan Freed, un nom essentiel
Le film ne montre que très peu le très grand DJ mythique Alan Freed -son nom signifie «libéré», et une chercheuse rappelle tout de même, brièvement, son rôle pour populariser le terme «rock and roll». Alan Freed, un Blanc -et c’est cela qui est remarquable – a sapé et même cassé la pratique détestable de siphonner les grands talents noirs -Little Richard et d’innombrables autres.
Cela pour policer et « blanchir » leurs œuvres à destination du public blanc. Freed, dans ses shows radio à Cleveland puis (à partir de juillet 1954) à New York, donne la préférence aux originaux noirs.
Un important point de bascule
Là où la télévision nationale ostracise Little Richard pour des raisons pas vraiment claires -des Bo Diddley, Chuck Berry et autres Fats Domino y apparaissent- le cinéma le reconnaît pleinement. Un témoignage éclairant : celui du cinéaste John Waters, dont la fine moustache est un hommage au chanteur !
À Baltimore, où il passe sa jeunesse, il dit que tous les jeunes Blancs écoutent de préférences les trois stations de radio noires…même les racistes !
Un point de bascule essentiel -et ce n’est pas le seul -est le film de 1956 The Girl Can’t Help It.
Non seulement un Richard sensationnel, impérial, y chante, mais il a l’honneur de la chanson-titre (un hommage à la star du film, Jayne Mansfield). Et peu après, un autre : le film Don’t Knock The Rock où la reconnaissance continue. Film qui est tourné à la gloire de Bill Haley, dans la foulée immédiate du film Rock Around The Clock, où Alan Freed apparaît déjà.
Dans Don’t Knock The Rock, Little Richard interprète ses deux premiers 45 tours de Specialty : Tutti Frutti et Long Tall Sally. Les deux stars du film sont censées être Bill Haley et le fade et oublié Alan Dale.
Mais de l’avis général, Little Richard fait la plus forte impression, alors qu’Haley -la première star du rock, est encore au sommet de sa gloire. Un extrait historique essentiel montre Richard chantant Long Tall Sally.
Si vous le regardez et attendez la minute 19, on voit une scène qui est un magnifique symbole. Assis à une table, Alan Freed et Haley battent la mesure au son de Little Richard, et Haley semble le plus enthousiaste !
Ironie de l’histoire : dans ce film, Bill Haley chante notamment Rip It Up, devant des teenagers dansants déchaînés. Une grande création de Richard mais qui obtient une revanche éclatante dans le même film, en chantant lui-même les deux classiques précités !
L’affiche belge témoigne de ce changement par rapport à l’américaine.
Sur l’affichette belge (et le titre français Rock and Roll Festival, resté inusité), Richard occupe une grande place ! Et des photos promotionnelles montrent Haley et Richard ensemble, avec ou sans le DJ visionnaire (et chef d’orchestre) Alan Freed.
Un vrai moment d’histoire !
Question reconnaissance, l’hebdo des professionnels du disque Cash Box lui décerne en 1956 le Triple Crown Award pour Long Tall Sally. Les reprises, notamment par des Blancs, qui suivirent (à commencer par Elvis) ne lui font aucun tort, dorénavant.
Cette phrase qu’on entend dans le film : «Ce n’est pas Elvis, c’est Little Richard» peut être discuté : Elvis qui aurait phagocyté Richard, en quelque sorte. Des nuances importantes doivent être apportées, au-delà des slogans.
Lorsque Tutti Frutti paraît en octobre 1955, Elvis a déjà derrière lui une carrière touchant à son terme de vedette, encore régionale, de rockabilly, chez Sun Records. Dans un style sans rapport avec le rock and roll noir furieux de Little Richard. Quelques reprises noires mais aucune de Richard.
Puis en 1956, Elvis reprend Tutti Frutti, le crée à la TV en février 1956 dans le Stage Show de Tommy Dorsey mais ses succès de hit-parade sont le plus souvent des créations originales, avec exceptions.
Une différence essentielle entre le statut des deux stars : Elvis et ses apparitions télévisées dont Richard est privé. Et Elvis tenant le rôle principal dans tous ses films, ce que personne ne propose au chanteur-pianiste. Là on peut parler de différence de traitement et d’injustice.
On insiste très fort sur l’homosexualité de Little Richard… Elle est inconnue à l’époque et on devrait même parler aujourd’hui de bisexualité. Témoignage bienvenu de sa…petite amie de l’époque, Lee Angel qui en ce temps-là était d’une beauté bluffante.
Angel fait remarquer avec espièglerie que les propos divers tenus en interview par la star doivent être pris avec du recul ! Little Richard a été marié avec Ernestine Campbell, lors de sa retraite religieuse dont question plus loin.
Hollywood et la grande vie
Malgré le contrat léonin signé avec Specialty, et grâce à ses shows avec son groupe The Upsetters, Little Richard réalise l’injonction chantée par lui dans les temps difficiles (1952) : Get Rich Quick ! Il acquiert une somptueuse villa à Hollywood dès 1956, quelques mois à peine après la sortie de Tutti Frutti.
Les tubes se sont enchaînés avec Long Tall Sally, Rip It Up et tous les autres.
Remarque en passant : l’imposture Pat Boone lui a rapporté beaucoup d’argent malgré lui, en tant que cosignataire du titre.
Avec un Belge à Hollywood !
Dans le film, il montre sa belle villa. Un reportage belge absolument unique en son genre paraît en deux parties dans le mensuel belge flamand Song Parade, en mars et avril 1957 : Little Richard thuis !
On ne peut s’y attarder dans le cadre de cette critique mais on peut reprendre la description du somptueux cadre de vie de notre homme. Sans décrire ici son intérieur, on reprend la phrase de J-C Snoeys, le correspondant à Hollywood.
Qui a eu la chance inouïe d’assister à la première hollywoodienne du film The Girl Can’t Help It (La Blonde et Moi, chez nous). «Tout est vraiment un rêve comme on ne le voit que dans les films d’Hollywood.» Sa manager est une jeune femme de vingt ans Cheri Landry (pas dans le film).
Il possède deux voitures de luxe : une Cadillac blanche et dorée, une Mercury blanche et rose et une camionnette pour le transport des musiciens et du matériel. Il sort avec des filles (…exclusivement, on est en 1957) lorsqu’il a le temps.
Intéressant : l’article précise qu’il est très croyant et qu’il chante dans le chœur de son Église (sans préciser) chaque fois qu’il se trouve à Hollywood. Un très bref point de vue d’époque sur celui qui, en Belgique, est un roi des juke-box avec ses disques publiés par le label Ronnex, très connu de tous les amateurs qui me lisent !
Octobre 1957 : le crash
On ne peut que regretter que Little Richard, à qui on n’a pas donné tout ce qu’il mérite certes, a tout de même flingué une carrière alors au zénith.
Octobre 1957 : lors d’une tournée australienne avec Eddie Cochran, Gene Vincent et « une Elvis » au féminin : Alis Lesley, Richard voyage en avion entre Melbourne et Sydney et il voit des boules rouges aux réacteurs.
L’accident est évident et il s’imagine que des anges ont soutenu l’avion (!). Lors de sa prestation à Sydney, il voit des boules de feu : un message divin lui enjoignant de cesser de chanter de la musique profane.
En réalité, le lancement du Sputnik russe… Cette tournée, Dylan en a choisi une photo fameuse pour illustrer son dernier livre !
Première période religieuse : 1957-1962
Il devient étudiant en théologie à Huntsville, Alabama et il épouse la secrétaire Ernestine Campbell ou Anderson (deux noms circulent !). On présente ce mariage comme la raison de son départ du Oakwood College mais il se serait livré à de l’exhibitionnisme face à un de ses camarades…
Il enregistre du gospel, notamment sous la direction de Quincy Jones. Il est -pas pour les ventes – The King Of The Gospel Singers.
On voit la pochette de l’album -autre label : Mercury- mais pas de témoignage de Quincy Jones.
1962, retour au rock and roll en Europe
1962 est une année cruciale. Il participe à une tournée anglaise avec notamment Sam Cooke.
On se demande bien entendu quel show serait offert : du rock ou du gospel ? Stupeur et joie générale : retour flamboyant au vrai Rock and Roll ! Il le chante comme un prêcheur baptiste déchaîné, un holy roller.
Eh oui, on trouve un évident fil rouge entre les holy rollers religieux et les rockers profanes. Plus de pompadour à l’époque : un look classieux et sobre, avec cheveux courts et toujours la petite moustache.
Un des témoignages les plus marquants : celui de Tony Newman, le batteur du groupe anglais qui l’accompagne : the Sounds Incorporated. On est totalement sous le charme.
Même si Tom Jones est lui aussi très enthousiaste, c’est le bien moins connu Newman qui, en décrivant ses sensations inouïes éprouvées lors de ses shows (We were rocking in the fifth dimension !)
Rencontre historique le 12 octobre 1962 au Tower de New Brighton (pas Brighton). Little Richard y donne un concert hors tournée, produit par le promoteur de Liverpool : Brian Epstein. Celui-ci lui demande de poser pour une photo avec ses poulains : the Beatles ! Ce qui donne une photo iconique, visible dans le film.
Avec un commentaire erroné de Richard : non, leur premier disque était bel et bien sorti, mais une semaine plus tôt seulement -le 5 octobre. Témoignage ancien de Paul McCartney, qui semble dater des années 70.
1963 : suite du renouveau en Europe
Autre tournée anglaise en octobre 1963. Témoignage de Mick Jagger qui a vu Little Richard une trentaine de fois dans cette tournée. Les vedettes : Bo Diddley et the Everly Brothers, et les Stones, un groupe prometteur pas encore starifié.
Mick explique que scéniquement, les groupes anglais étaient assez raides et que Richard lui donne l’envie de se donner à fond, sans réserve. Même si la frénésie de Little Richard est inégalable.
Un point à ajouter : cette tournée a démarré sans Little Richard ! Elle ne marche pas suffisamment, et le promoteur l’appelle en catastrophe… Il déboule le 5 octobre à Watford : rock and roll à foison et triomphe.
À partir de là, la tournée est sauvée…alors qu’à la fin de la première tournée anglaise, il avait juré d’arrêter le rock and roll. Little Richard est l’artiste le plus torturé et le plus contradictoire qui soit et I Am Everything le prouve à profusion.
La suite
Pour la suite de sa carrière, le film avance à toute allure. On regrette un peu un tel apport de témoignages dont certains un peu superflus alors qu’aucun extrait musical n’est présenté en entier. Parmi ces derniers, des bouts minuscules de sa prestation à l’Olympia de Paris du 13 novembre 1966.
Un goût de trop peu…
Des reprises actuelles, pour les besoins du film, de titres de lui par de jeunes artistes tombent à plat. On insiste fort sur l’influence immense de Little Richard sur les artistes, leur manière d’être décomplexée et cassant les codes anciens.
Cela peut être McCartney qui dans ses titres frénétiques pousse des cris à la Little Richard, lui qui une quinzaine d’années auparavant les avait repris de Marion Williams…transmission toujours.
L’allure scénique de Prince, d’Elton John… Nile Rodgers dit que Bowie voulait que l’album Let’s Dance sonne comme Little Richard, une idole à lui !
En passant, Elvis et Little Richard avaient en commun une dévotion totale pour leur maman, outre leurs penchants religieux et leurs incursions dans le gospel. Le film ne s’étend pas sur la collaboration Little Richard-Hendrix : on entend juste une mention du nom de ce dernier.
Little Richard chante du rock and roll tout au long des années soixante, notamment sur le label Vee-Jay.
Nous sommes au milieu des années soixante et Richard garde son look encore sobre -ce qui allait changer ! Puis avec le grand Johnny Guitar Watson à la guitare sur un mémorable album en public enregistré à l’Okeh Club de Hollywood (1967).
Suivi par ses tentatives en tant que chanteur soul mais des James Brown et Otis Redding ont pris sa place…
Deux géants qui chantaient comme Little Richard à leurs tout débuts ! Pas content du tout d’être supplanté, et par des Noirs cette fois…
Néanmoins il chante I Can’t Turn You Loose en l’honneur d’Otis Redding -avec de longues tirades enflammées dont il a le secret -lorsque le soulman entre enfin au Rock and Roll Of Fame, en 1989. Un extrait de cela fait partie du documentaire.
L’année précédente, il honore à sa manière un Best New Artist aux Grammys : un certain Jody Watley (qui s’en souvient ?). Richard fanfaronne : «Le meilleur artiste, c’est…moi !»
Années 70
Il enregistre pour le label Reprise créé par… Sinatra en 1970 et les années de débauches, orgies et drogues dures commencent. Un batteur de la grande époque, Charles Connor révèle avoir un jour couché dans une baignoire chez Little Richard : les chambres étant remplies d’hommes nus !
4 mai 1982, un coming out à l’envers au Late Show, le show TV de David Letterman. Il rejette l’homosexualité pour raisons religieuses et une autre déclaration révèle une abstinence sexuelle de quatorze ans.
Little Richard est devenu une sorte d’amuseur public, un bon client comme on dit. Il amuse la galerie avec ses « I am the beautiful Little Richard» et ses « Shut up !» répétés sans trêve ni repos !
Mais moins de choses sérieuses, des disques qui ne font pas mouche et souffrent de l’inévitable comparaison avec les grandes années. En 1986, son succès Great Gosh’A Mighty tiré du film Down And Out In Beverly Hills.
Honneurs présents ou absents
En 1997, on voit Little Richard recevoir le prestigieux Merit Award aux American Music Awards. Il a les larmes aux yeux, comme si c’était sa première reconnaissance de haut niveau… Mais il y en a eu d’autres.
Une des principales : en 1986, il fait partie des tout premiers artistes distingués au Rock And Roll Hall Of Fame, à Cleveland, là où Alan Freed a déclenché tant de choses… Little Richard s’endort au volant : accident, et il ne peut assister à sa consécration !
On le voit revenir périodiquement en Europe, Angleterre mais également en France,en Hollande et chez nous également (la première en 1975, Forest National) !
Je garde un souvenir très intense des quelques occasions où j’ai pu voir le Maître à l’œuvre, y compris une rencontre-éclair aux Diamond Awards mais il faut conclure… Sinon voici un titre favori de votre serviteur : son plus gros succès en Angleterre, début 1959.
Baby Face.
Un ancien titre de Tin Pan Alley, chanté notamment par Al Jolson…qui était un protagoniste du blackface à maintes reprises !
Comme une revanche : je pense qu’au-delà de sa sexualité, on y trouve l’essentiel : cette incroyable explosion dionysiaque de vie, de talent XXL, presque monstrueux, inexplicable…
The Fabulous Little Richard, en effet !
Courez voir I Am Everything les 29 octobre et 9 et 18 novembre à Flagey !
Vous aimez le rock and roll ? Lisez sur Culturius la vie d’une autre légende: Vince Taylor.
Little Richard, Long Tall Sally (1955) colorisé :