Diane de Beauvau, un vent de liberté, un oiseau de nuit
L’histoire a vu surgir de nombreuses excentriques d’ascendance princière plus que douteuse, comment ne pas penser à Anna Anderson qui se fit passer pour Anastasia Romanova, l’unique survivante des Tsars de Russie, à la comtesse Jeanne de La Motte prétendument Valois, ou encore à cette femme d’une grande beauté qui rayonnait dans les salons européens au siècle des lumières sous le nom de « Princesse Vladimir » et dont l’identité reste un mystère. Dans le cas de Diane de Beauvau c’est le contraire, puisque c’est d’une véritable princesse qui joue les excentriques en écumant les boîtes underground dont il s’agit !
Diane de Beauvau Craon est la fille de Marc de Beauvau Craon, 7ème prince du nom, et de Maria Cristina Patiño de Borbon. Elle a pour grand père, Antenor Patiño, le fils de Simon Patiño qu’on surnommait alors le « Rockefeller des Andes ». Si elle se décide aujourd’hui à prendre la plume, c’est pour revenir sur l’étonnante tournure qu’elle a décidé de faire prendre à sa vie pourtant toute tracée.
A 18 ans, elle décide de partir avec son ami belge Thierry Beherman, pour les Amériques. Si son histoire d’amour avec Thierry Beherman fut brève et passagère, New York fut pour elle une passion qui ne la quittera jamais plus. Sa famille accepte qu’elle s’y établisse définitivement à la condition qu’elle y trouve du travail. Elle collabore donc avec le couturier Roy Halston qui la paye alors en bijoux de chez Tiffany, ce qui convient parfaitement à Diane. Les diamants ne sont-ils pas éternels ?
C’est là que sa vie, la vie qu’elle avait choisi de vivre, commença. Elle s’y créa une nouvelle famille, une famille de cœur bien entendu, et surtout très différente de celle qu’elle avait reçue au berceau. Parmi ses membres : Andy Warhol, Roy Halston, Margaux Hemingway (petite fille du célèbre écrivain) ou encore Diana Vreeland (directrice du journal Harper’s Bazaar) tous fascinés par cette authentique aristocrate venue d’Europe qui allie naturel et protocole.
Le caractère libre de Diane, son brin de folie assorti à sa profonde gentillesse et à la bonne éducation qu’elle a reçue, lui permettent de se faire adopter par tous les milieux. Elle se lie alors avec des artistes tels que Karl Lagerfeld, Mick Jagger ou John Lennon, des personnalités comme la princesse Lalla Aïcha (la sœur du roi Hassan ll du Maroc), mais aussi avec des muses comme Jacques de Bascher ou Loulou de la Falaise échoués sur terre dans le seul but de servir de source d’inspiration aux créateurs de leur époque. Elle-même peut prétendre à ce titre de muse puisqu’elle insuffla à ses nombreux amis des créations digne de ce nom.
Un jour où elle devait se rendre à une soirée de gala, elle opta pour une veste de peintre en bâtiment. Andy Warhol sidéré par cette tenue, s’est mis avec son ami Robert Rauschenberg, à transformer le blanc de travail en une œuvre unique. Une œuvre unique qu’elle perdra aussitôt au Studio 54 laissée négligemment sur un fauteuil.
Quand on évoque Diane on ne peut passer à côté de sa vie nocturne, elle qui comme ces femmes-oiseaux évoquées par Homère dans l’Odyssée, navigue entre la ville qui ne dort jamais et la Ville Lumière.
La nuit est le moment merveilleux où les masques tombent, où les frontières s’effondrent, où tous les excès sont possibles. Les proches de la princesse s’accordent à dire que malgré ses nombreuses incartades, elle est celle qui a le plus de sang bleu dans la famille. Dédier sa vie à la fête est typiquement aristocratique, comme une sorte d’ultime sursaut de la société de cour à notre époque actuelle. La danse, divertissement éminemment politique, fut conçu par Catherine de Médicis et Balthasar de Beaujoyeux et avait pour vocation de former le courtisan idéal.
En écumant les boîtes de nuit et les clubs, Diane est au fond la digne héritière de son ancêtre Henri II de Beauvau Craon, élevé au rang de marquis par le « Roi danse ».
Une vie pleine de surprise et de rebondissement à découvrir dans son livre : « Sans départir », par Diane de Beauvau-Craon, éd. Grasset, mai 2022, 320 pages, 22 euros
Découvrez un livre d’une autre descendante des Bourbons, L’Ambition, d’Amélie de Bourbon-Parme.