Du 1er juillet au 29 septembre 2024, Astrid Ullens de Schooten Whettnall et sa Fondation A sont invités aux Rencontres d’Arles dans le cadre de Relectures, revisiter la photographie. Sous le commissariat de Urs Stahel, l’exposition Quand les images apprennent à parler présente quelques 650 tirages et 45 photographes, collectionnés ces 30 dernières années, nombreux et nombreuses devenus aujourd’hui des maîtres à penser de la photographie documentaire.

En couverture : Astrid Ullens de Schooten Whettnall © Rip Hopkins

Quand les images apprennent à parler

Urs Stahel, commissaire de l’exposition « Quand les images apprennent à parler » aux Rencontres de la Photographie d’Arles, explique :

« Les chiffres sont éloquents : quelque 5 500 photographies d’une centaine de photographes, rassemblées sur les trente dernières années. On peut en déduire que la Fondation A (Collection Astrid Ullens de Schooten) n’a pas fait la chasse aux joyaux, mais qu’elle a misé sur des manières de voir, des façons de penser, sur des approches. Ses collections se comprennent comme un projet de transmission culturelle qui soutient la photographie, l’observation et la compréhension du monde.

Urs Stahel, le commissaire de l’exposition © DR

Par cette structuration, la collection témoigne en même temps d’autre chose : aussi belle, aussi formidable même que puisse être en elle-même une photographie, elle en dit étonnamment peu sur le monde. Si l’on veut produire par le moyen de la photographie un langage visuel qui soit lisible, intelligible et communicable par tout un chacun, on est obligé d’adopter une façon de procéder précise, structurée, fondée sur un concept. C’est ainsi qu’on rencontre dans la collection de la Fondation A cette génération de photographes documentaires conceptualisants dont la démarche structurale nous permet d’acquérir des connaissances importantes sur le monde, la nature et la société, et sur la vie de certains êtres humains et créatures vivantes en particulier.

Self Portrait as Walking Woman with Bag, 1979 Lima, Peru / 2019 Los Angeles, CA, série 1979 Contact Negatives, par Tarrah Krajnak, 2019 © Tarrah Krajnak / Galerie Thomas Zander, Cologne

Depuis les années 1960, l’image isolée tombe rapidement en désuétude. Désormais, il s’agit d’« énoncer », de construire des phrases entières, de construire avec divers morceaux de représentations et d’images un bloc, un réseau, une grille, un nuage, un récit qui d’une part se rapprochent plus de la réalité dans toute sa complexité et qui d’autre part facilitent la compréhension des images et dès lors de la réalité elle-même.

Annie Hasz, Easton, Pennsylvania, Protesting the Iraq War, série Living With War – Portraits, par Judith Joy Ross, 2007 © Judith Joy Ross / Galerie Thomas Zander, Cologne

Ces documentaristes conceptualisés sont peut-être la dernière génération de photographes à avoir cette prétention. Car nous nous enfonçons de jour en jour un peu plus dans les limbes, c’est-à-dire dans des espaces qui ne sont plus perceptibles ni compréhensibles par les sens.

La Fondation A est en bonne voie de devenir un grand monument de cette culture visuelle qui pouvait encore se réclamer du visible. »

Les Rencontres d’Arles.


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