Un petit garçon roux à côté d’un vélo trop grand pour lui dans une rue de coron à Courcelles-lès-Lens ; cette photo de John Bulmer est devenue virale sur les réseaux il y a quelques mois après que La Voix du Nord ait réussi à identifier l’enfant alors sexagénaire. C’est cet émouvant cliché qui m’a conduite le week-end dernier à la Cité des Électriciens de Bruay La Buissière pour découvrir « Coronation Street », le superbe photo-reportage réalisé par John Bulmer en 1966.Mais j’ai découvert bien plus qu’une simple exposition, je suis entrée dans un havre de paix où j’ai rencontré des êtres passionnés et passionnants. Venez le temps d’un week-end dans cette petite bulle de culture et de tradition pour profiter d’un moment de plaisir en couleur.

La Cité des Électriciens

Un lieu de vie

Implantée au cœur du bassin minier inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco, cette cité minière est la plus ancienne cité réhabilitée. Avec la mémoire du lieu comme fil rouge, l’architecte Philippe Prost et son équipe ont restauré l’habitat traditionnel du coron mais aussi l’esprit des jardins de mineurs. Ainsi, la brique rouge est mise en valeur par un badigeon à la chaux qui s’harmonise complètement avec les tuiles vernissées au cœur d’une déclinaison de jardins potagers, pédagogique et même artistique.

Dans le barreau central, les couches de papier peint témoignent des occupations successives des logements et les prénoms inscrits sur les vitres rappellent celles et ceux qui ont travaillé, aimé et souffert aussi entre ces murs. Le jardin dit « des artistes » est divisé en plate-bandes qui voient pousser des légumes et des fruits issus des pays des mineurs immigrés au fil de l’évolution de l’exploitation minière, vingt-neuf nationalités sont ainsi représentées.

La vocation de ce coron alternatif est participative, les jardins sont entretenus par les jardiniers médiateurs de la cité mais aussi par les habitants bénévoles qui perpétuent les valeurs de solidarité, de transmission et de respect mutuel des mineurs.

Un lieu d’expression

La cité accueille en résidence de nombreux artistes qui exposent leurs travaux dans « le coron le plus arty de la région ». Les sculptures de Cyril Zarcone et l’installation « Original Flower Power » de Nicolas Bamer habillent les jardins, Philippe Baudelocque et Naïké Louchart ont installé chez Jeanne et chez René, l’un « ses lignes serpentines » de peinture et l’autre « ses compositions florales » de tissu pendant qu’Emmanuel Denis installe La Requinquée, un troquet « d’époque » chez Charlemagne.

Les entrelacs de Philippe Baudelocque

Samira El Ayachi, auteure de Le ventre des hommes, que j’aurai bientôt le plaisir de rencontrer pour vous, est entrée dans les pensées de plusieurs mineurs. Elle nous les livre chez Albert en commentaires de photographies extraites des collections du Centre historique minier de Lewarde.

« Coronation street »

Un anglais dans la cité

C’est pour le Sunday Time Magazine que John Bulmer vient photographier les cités des mines dans le nord de la France. Photographe au Daily Express, il réalise de nombreux reportages en association avec Paris-Match. Habitué des paysages urbains et miniers, celui qui a photographié le Nord industriel de l’Angleterre, transmet la poésie qui se dégage du peuple travailleur et digne du Nord de la France qui le regarde droit dans l’objectif.

Il a écrit la chronique d’une vie en cité minière à travers des scènes de la vie quotidienne du coron et des portraits de mineurs, de ménagères et d’enfants. Une sélection de vingt-neuf clichés permet de retrouver l’ambiance de la cité dans les années 60 et chaque photographie est un instantané qui , grâce à la couleur, témoigne du dynamisme et de l’énergie de ses habitants.

Galerie

Un visiteur a reconnu cette femme balayant son trottoir dans la brume du petit matin. La propreté de sa maison était une fierté pour la femme du mineur qui « briquait » aussi la façade, le trottoir et même le caniveau ! Le garde qui arpentait rues et « voyettes » veillait à ce que les jardins et les « carins » (appentis de jardin) soient bien tenus.

Les logements étaient exigus pour des familles comprenant  souvent plusieurs enfants dont la salle de jeu était la cité toute entière. À l’heure du goûter, une tartine suffit à satisfaire un apprenti héros masqué. S’il s’agit du reste du « briquet » du père, « le pain d’alouette », c’est encore meilleur !

 La vie au coron est faite de petits bonheurs simples en famille et l’on prend volontiers la pose pour le photographe anglais.

Le soleil se couche derrière le terril et embrase le carreau de fosse pour sublimer la dentelle des chevalets.

« Un week-end din ch’coron »

« Les gardiens » de la cité

Il règne dans la Cité des Électriciens une atmosphère conviviale et une bonne humeur contagieuse à l’image des acteurs qui m’ont accueillie : Olivier Thierry, le directeur ; Sabrina Hadid, responsable de la communication et Clément Vantournhoudt, agent d’accueil. En ce week-end de la Pentecôte, même si « les vacances à Gardincourt battaient leur plein » et qu’ils étaient très occupés, chacun a pris son temps pour m’accueillir, m’orienter et répondre à mes questions, je les en remercie !

J’irai dormir chez vous…

Tous m’ont vanté le confort des cinq gîtes du site. Chez Rosalie, Léon, Alice, Marie-Jeanne et Jacob, vous vous sentirez chez vous. Dans un décor vintage, vous profiterez pleinement de la vie au coron avec vue sur les jardins. Vous serez sur place pour profiter des animations du moment, des expositions en cours, des visites de la cité et des ateliers…Peut-être croiserez-vous un des artistes en résidence qui prendra plaisir à évoquer son travail. 

Consultez vite le programme en ligne pour organiser votre visite. 

Je reviendrai bientôt à la Cité des Électriciens car il paraît qu’un auteur du territoire devrait commencer une résidence d’écriture autour d’une exposition de « canevas de mineur » récoltés auprès de dizaine de familles du bassin…Mais promis, on en reparlera !