« La route des Indes » le chef d’œuvre méconnu du réalisateur de « Lawrence d’Arabie »
En 1984, quatorze ans après son avant-dernier long métrage, le cinéaste David Lean revient à la réalisation pour son ultime film, « La route des Indes. » Le metteur en scène semble renouer avec le genre qui a fait sa gloire, la fresque historique ambitieuse et grandiose, en nous plongeant dans l’Inde coloniale des années vingt.
« La route des Indes » est en réalité une œuvre plus modeste et plus intime qu’un « Lawrence d’Arabie » ou qu’un « Docteur Jivago », c’est peut-être pour ça qu’elle a moins marqué les esprits. C’est dommage, car il s’agit d’un très grand film, très différent de ceux cités au-dessus, mais tout aussi réussi. Au lieu de nous livrer, une nouvelle fois, un récit spectaculaire et épique, Lean préfère nous immerger au cœur de la société indienne de l’époque, il met en scène une véritable étude de société.
© EMI Films
Une représentation réaliste et subtile de cette époque coloniale
La première heure et demie ne possède pas réellement d’intrigue, on suit deux Anglaises en voyage en Inde, qui découvrent le pays et les habitants. Très choquées par les inégalités entre Anglais et Indiens, elles vont décider de légèrement se détacher de leur haute société et de se mêler à la population. Elles vont se lier d’amitié avec Aziz, un docteur.
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Le réalisateur nous dresse un portrait de cette société, vu par les yeux de ces personnages. Les inégalités sociales nous sont excellemment retranscrites, on nous montre vraiment le mépris qu’avaient les Anglais pour les Indiens. La force de l’œuvre c’est qu’elle n’est pas manichéenne, elle est très réaliste, rien n’est tout blanc ou tout noir.
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Tous les Anglais ne sont pas racistes et irrespectueux, certains veulent justement s’ouvrir à la population indienne, comme ces deux femmes, mais il n’y a pas qu’elles. À l’inverse, tous les Indiens ne sont pas tendres entre eux, on sent certaines tensions. C’est ce qui fait que l’environnement dans lequel nous sommes plongés est très fort et nuancé.
Des personnages forts et complexes
Les protagonistes sont très bien décrits et surtout très humains, ils évoluent beaucoup tout le long du film. On voit qu’ils doutent énormément, qu’ils ne savent pas qu’elle est leur place dans cette société. L’amitié entre cet Indien et ces deux Anglaises est très touchante et assez triste, Aziz est un personnage extrêmement attachant et doux, il est heureux d’avoir fait leur rencontre, mais n’est jamais sûr, à cause des différences de classes sociales, de ma manière de se comporter en leur compagnie. Les deux femmes, elles, sont constamment tiraillées entre leur milieu très fermé et leur envie de découvrir le pays.
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Lors de la dernière heure, le film change radicalement de style et devient un drame judiciaire. Cette dernière partie est extrêmement puissante, c’est le point culminant de l’œuvre. C’est à ce moment que les injustices et les inégalités sociales sont à leur maximum, avec cet Indien accusé à tort d’un crime qu’il n’a pas commis et qu’on souhaite condamner absolument et cette victime que l’on force presque à témoigner contre un innocent.
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« La route des Indes », un grand film injustement oublié
En conclusion, avec « La route des Indes », David Lean termine sa carrière en beauté en nous offrant un film intelligent, complexe et brillamment écrit. Il dresse un portrait très juste et nuancé de la société en Inde coloniale de l’époque. Le long métrage mériterait d’avoir bien plus de reconnaissance, car il n’a rien à envier aux autres chefs-d’œuvre du cinéaste.
Bande-annonce en FR (ARTE) :
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