La « salle carrée » du Musée de Mariemont accueille actuellement, et ce jusqu’au 2 juin 2024, l’exposition « Les Amis de Mariemont. Histoire d’une passion ». Celle-ci met en exergue près d’un siècle d’une œuvre collective sans laquelle le musée ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui. Une exposition pour rendre hommage à 90 ans de dévouement.

Cette exposition, c’est aussi l’histoire d’hommes et de femmes qui depuis 90 ans sont liés par une passion commune : celle du domaine et du Musée de Mariemont. Cette exposition raconte les moments forts, les gestes fondateurs et les figures emblématiques du Cercle Royal des Amis de Mariemont, au travers différentes pièces dont certaines sont montrées au public pour la première fois.

Le « Cercle Royal des Amis de Mariemont » compte plus de 1250 membres, ce qui en fait une des associations culturelles et muséales les plus importantes en termes d’adhérents du pays.

Le grand mécène Raoul Warocqué © DR

Créé en 1934, le Cercle participe activement à l’enrichissement des collections du musée, poursuivant l’œuvre du fondateur de Mariemont, mais garantit aussi la pérennité de l’esprit de ce grand mécène qu’était Raoul Warocqué. Que ce soient des pièces de bronze, d’or ou de marbre, des estampes japonaises, des porcelaines de Tournai ou des terres cuites gallo-romaines, les acquisitions et dons du Cercle offrent un vaste panorama des nombreuses cultures du Monde.

L’histoire du musée et de son cercle sont intimement mêlées

L’histoire des « Amis de Mariemont » débute en juillet 1934 lorsque le Rotary Club du Centre se rassemble au restaurant Le Mairesse à Mariemont.

Pour donner suite à cette réunion, le rotarien Camille Deberghe propose plusieurs idées pour faire connaître et apprécier les richesses du domaine et y amener le plus de visiteurs possible. Il sera le principal artisan du développement des premières années du « Cercle des Amis de Mariemont ». A cette époque, Schellinck, secrétaire et bibliothécaire de Raoul Warocqué, très fidèle à l’esprit de l’ancien propriétaire des lieux, a quitté son poste de conservateur du musée.

Projet de création des Amis de Mariemont © DR

En 1934, Paul Faider prend la tête du Musée Royal de Mariemont. Très vite, il y décèle le potentiel artistique et historique d’un certain nombre de chefs d’œuvre contenus dans les collections.

Quant à Camille Deberghe, il va devenir le premier président du « Cercle des Amis de Mariemont », qui a été fondé la même année.

Il vient de se fonder une association qui a pris pour nom « Les Amis de Mariemont » et qui s’est donné pour but d’attirer l’attention du public sur ce domaine.

Rapidement, les Amis obtiennent le droit d’organiser des manifestations (comme des concerts) au sein du parc du domaine, ainsi que l’entrée gratuite au musée pour les membres.

Lors de l’inauguration du Mémorial Warocqué, Camille Deberghe orchestre la première véritable campagne de presse en faveur de Mariemont. Désormais, la notoriété du domaine et du musée est bien assurée et le rôle des Amis s’est affirmé comme une aide prépondérante au succès du musée.

Mariemont au XIXè siècle © DR

Le conservateur Paul Faider, avec l’aide de son épouse, a réalisé des améliorations considérables au niveau de la mise en valeur des collections, ce qui draine un nombre de visiteurs de plus en plus important. En 1938, le musée enregistre 40 000 visiteurs, entrées payantes, gratuites et groupes scolaires confondus.

L’activité des Amis va, durant les années qui suivent, se poursuivre dans deux directions : d’une part la promotion du musée et d’autre part, la mise en place progressive d’une politique de dons en faveur du musée.

Raoul Warocqué, en son temps l’homme le plus riche de Belgique © L’Echo

Cette belle synergie va aboutir à une fréquentation de plus en plus importante de l’établissement, malheureusement la Seconde Guerre Mondiale va mettre un frein au nombre de visiteurs. En 1940, le décès de Paul Faider est un autre coup dur pour Mariemont et fait renaître la crainte que les plus belles pièces du musée soient captées par des établissements plus prestigieux.

Soutenue par les Amis, Germaine Faider prend la suite de son mari à la tête du château-musée. Rapidement, elle montre son intérêt pour le tourisme.

Le 3 octobre 1944, Camille Deberghe est assassiné par un opposant politique, ce qui marquera un tournant dans la vie des Amis de Mariemont.

C’est Charles Tisthoud qui lui succède en tant que président. Quelques semaines auparavant, Germaine Faider avait, elle, accepté le poste de vice-présidente des Amis.

Une association déjà très active dans les années 1930 © DR

En 1946, Germaine Faider a réussi à convaincre les Amis de financer un véritable service pédagogique. C’est dans ce cadre que Mademoiselle Haulot, responsable de ce service, organise les premières visites pour les non-voyants, leur permettant de toucher les différents objets des collections. Autre projet mené à bien, intéresser les milieux ouvriers du Centre à ce joyau exceptionnel de leur région.

Au fil des années, une certaine vitesse de croisière semble avoir été trouvée à Mariemont dont la vie est rythmée par les projets scientifiques, les inaugurations de salles, les acquisitions, les actions en vue de préserver l’intégrité du domaine ou développer les réseaux touristiques à destination de celui-ci, les conférences etc.

Le grand incendie de Noël 1960 © DR

Hiver 1960

En mai 1960, les amis comptent 333 membres, et le musée n’a jamais été aussi prospère. La santé financière des Amis est excellente, malheureusement, la région du Centre connait une situation économique de plus en plus précaire et les grosses souscriptions ont tendance à diminuer. C’est dans cette ambiance morose qu’à Noël 1960, le feu ravage une grande partie du château de Mariemont.

La famille Faider sur place pendant les fêtes, ainsi que l’action des habitants, permet d’éviter le pire, l’essentiel des collections est sauvé, mais Germaine Faider a tout perdu.

Les grands musées du pays envoient du personnel pour aider à sécuriser les collections. Les Amis gratifient les surveillants du musée pour leur dévouement pendant l’incendie, et la plupart des administrateurs se cotisent pour aider Germaine Faider qui avait sacrifié ses propres biens pour sauver les collections. Ce qui a encore, bien entendu, resserré les liens entre la conservatrice et le Cercle.

Les Amis de Mariemont dans les années 60 © DR

Rapidement, le projet d’un nouveau musée voit le jour. L’ancien château, trop endommagé, ne pourra plus accueillir les collections et Germaine Faider parvient à imposer tant aux autorités qu’aux amis, l’idée d’un musée moderne, intégré au domaine. Rapidement, les Amis financent la maquette et la première pierre du nouveau bâtiment est posée symboliquement le 16 avril 1967, à l’occasion du 50ème anniversaire du décès de Raoul Warocqué.

En 1968, Germaine Faider prend sa retraite après plus de 30 ans au service de Mariemont. Les Amis seront très actifs pour la préparation de sa fête de départ, et entreprennent les démarches afin qu’elle obtienne le titre de Commandeur de l’Ordre de Léopold.

C’est Guy Donnay qui lui succède, et les amis appuieront plusieurs démarches afin qu’il soit nommé définitivement, ce qui sera fait en 1973.

Le 2 mai 1976, Charles Tisthoud cède la place à un nouveau président pour les Amis, le docteur Charles Hubinont, qui demande à son prédécesseur de siéger en tant que président d’honneur.

Le contexte social a beaucoup changé dans la région ; le démantèlement des industries lourdes et la hausse du chômage entraînent la paupérisation du Centre. Le domaine de Mariemont devient le poumon vert d’une région marquée par son passé charbonnier et industriel.

Les Cahiers de Mariemont, une publication de qualité, depuis 1970 © DR

La fréquentation du musée fluctue entre 30.000 et 50.000 visiteurs par an, les publications scientifiques se poursuivent, « Les cahiers de Mariemont » largement financés par les Amis paraissent depuis 1970.

L’évolution du musée va pourtant d’une certaine manière, affecter ses relations avec ceux-ci. Profitant du nouveau musée, Guy Donnay essaie d’obtenir une revalorisation du statut de Mariemont, ce qui sera chose faite en 1978. Il bénéficie alors d’un apport de personnel. L’équipe du conservateur est composée de 6 conservateurs et une telle équipe permet d’organiser les choses de façon différente.

Une certaine prise de distance avec les Amis dans les années 80, et ceux-ci vont, à partir de ce moment-là, recentrer leurs activités sur la politique d’acquisition, tout en poursuivant des opérations régulières, telles que le soutien aux « Cahiers de Mariemont », ou la prise en charge de certains catalogues et monographies, mais aussi en intervenant de façon ponctuelle pour étoffer l’équipe du musée.

En 1987, les Amis de Mariemont deviennent « Le Cercle Royal des Amis de Mariemont », qualificatif honorifique, témoin de l’excellente réputation morale et financière de l’association.

Début des années 90, le conservateur Guy Donnay se retire, pendant les opérations de désamiantage des bâtiments, et Patrice Dartevelle, directeur du Service du Patrimoine de la Communauté Française, assure l’intérim avec brio. Quant aux Amis, ils restent d’un incroyable dynamisme, lançant des campagnes de recrutement de nouveaux membres.

A partir des années 2000, le musée se dote d’un service marketing. Et de nombreux visiteurs rejoignent les Amis.

En 2002, un directeur, François Mairesse, et une directrice scientifique, Marie-Cécile Bruwier, sont nommés à la tête de Mariemont, soutenus par les Amis.

En 2007, Philippe Fontaine succède à Jacques Hubinont.

La Salle Carrée © DR

Les Amis sont prêts pour de nouveaux défis. En plus de l’enrichissement des collections, les Amis participent à l’achat de matériel ou d’équipement, tels que des vitrines spécialisées avec contrôle hydrométrique, ou encore du mobilier scénographique modulable répondant aux exigences muséologiques les plus innovantes.

Des volontaires bénévoles participent à des missions d’archivage, de numérisation ou au rayonnage au sein de la bibliothèque.Le soutien des Amis est loin de se limiter au matériel et au financier, aux acquisitions ou aux restaurations. Lorsque les circonstances l’ont exigé, l’association et ses représentants n’ont pas hésité à se mobiliser pour plaider la cause de Mariemont.

Collections permanentes © DR

Une exposition en deux parcours

Présentée à travers deux parcours, l’exposition « Les Amis de Mariemont, Histoire d’une passion » expose symboliquement 90 œuvres.

Parcours 1 : Salle Carrée

Située au -1, la Salle Carrée propose trois espaces thématiques. Le premier espace présente l’histoire du Cercle. On y découvre des documents d’archives relatant les réunions fondatrices, les portraits des hommes qui ont assuré la présidence de l’association, des albums, cahiers et cartes postales qui illustrent quelques temps forts dans la création du Cercle. Une vidéo d’archives retrace également la construction du nouveau musée suite à l’incendie de 1960. Un épisode particulièrement marquant qui montre (et démontre) les liens unissant les Amis au Musée. Aux côtés de ces documents historiques, est également exposée une sélection de dessins à la mine de plomb d’Émile Puttaert ainsi qu’une sélection des 358 aquarelles originales de « Nos Gloires » des albums Historia de Jean-Léon Huens.

Hiroshige © DR

Le deuxième espace de l’exposition est entièrement dédié aux pièces des collections. Illustrant chacune des sections du Musée, il reprend des œuvres emblématiques parmi les acquisitions et les dons des Amis. Sont ainsi exposés une vaste collection de porcelaines de Tournai, une sélection de fibules gallo-romaines et trésors monétaires, une amphore antique, un cratère, un péliké à figures rouges ou encore deux récentes acquisitions : un relief et une statuette en bois polychrome, tous deux ptolémaïques. Parmi les pièces rarement exposées : les reliures, gravures et volumes illustrés issus de la Réserve précieuse ou encore la série d’estampes japonaises des Restaurants réputés d’Edo d’Utagawa Hiroshige de la collection de Gustave Jonas.

Parcours 2 : Collections permanentes

L’exposition-focus se prolonge à travers le parcours dédié aux collections permanentes de Mariemont. Œuvres emblématiques des dons en faveur du Musée, une vingtaine de pièces sont mises en exergue dans les différentes vitrines. Parmi elles, plusieurs éléments de la spectaculaire donation Boël-D’oultremont, un tableau de Jan Breughel II dit le Jeune et Hendrik Van Baelen ou encore la Mater de Bavay dont l’acquisition tenait tant à cœur à Raoul Warocqué. Cette pièce, qui lui avait échappé, a rejoint les collections en 1947 après un long périple. À noter également que six de ces œuvres ont nouvellement rejoint l’audioguide de nos collections.

Les Amis de Mariemont. Histoire d’une passion

Dates : 16 décembre 2023 – 02 juin 2024

Adresse : 100 Chaussée de Mariemont, 7140 Morlanwelz, Belgique.

Heures d’ouverture : Musée ouvert du mardi au dimanche de 10h – 17h (décembre à mars) /

10h – 18h (avril à juin) / Dernière entrée 45 minutes avant la fermeture.

Domaine ouvert du lundi au dimanche de 8 à 18h (décembre à mars) / 8h à 19h (avril à juin)

Pour plus d’informations, visitez le site du Musée de Mariemont.


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