Après une absence en 2020 et une édition décalée durant l’été 2021, la 17e édition reprend son trône du 17 au 28 mai 2022. Le festival fait son retour en force, avec des anciens maîtres et des nouveaux auteurs mais surtout une forte présence belge.

La compétition officielle

Tout en présentant des cinéastes habitués de la croisette et déjà primés auparavant, la compétition officielle introduit également des nouveaux venus ayant fait leurs armes dans les sections annexes du festival, comme le veut la tradition cannoise.

Ainsi, les maîtres déjà primés qu’on ne présente plus tels que David Cronenberg, Claire Denis, les frères Dardenne, Arnaud Desplechin, Cristian Mungiu, Ruben Ostlund, Hirokazu Kore-Eda, James Gray, Park Chan-Wook, Kelly Reichardt et Jerzy Skolimowski viennent rivaliser avec les challengers Valeria Bruni Tedeschi, Albert Serra, Tarik Saleh, Felix van Groeningen, Léonore Serraille, Mario Martone, Lukas Dhont, Ali Abbasi et Saeed Roustayi qui viennent réclamer leur dû.

Or, le palmarès dépendra énormément de la sensibilité du jury qui cette année est présidé par l’acteur français engagé, Vincent Lindon, aidé des acteurs Rebecca Hall, Deepika Padukone, Noomi Rapace, Jasmine Trinca mais également les réalisateurs Asghar Farhadi, Ladj Ly, Jeff Nichols et Joachim Trier.

Le film noir

Si David Cronenberg (Prix spécial du jury en 1996 pour Crash) opère un retour aux origines de son genre fétiche, le body horror, avec un film fantastique sur un artiste qui pratique le body art mais au-delà de l’imaginable, avec Crimes of the Future, après une période plus psychologique. Peut-être été motivé par la dernière Palme d’or pour un film d’horreur autour des mutations corporelles, Titane de Julie Ducournau, le maître revient à ce qui à fait sa gloire. 

Un autre film noir, Walad Min Al Janna (Boy from Heaven) 4e film de Tarik Saleh, grand spécialiste de l’intrigue politique égyptienne avec Le Caire Confidentiel de 2017 (Grand prix du jury à Sundance), s’immisce cette année dans la bataille de succession que vont se livrer les élites pour le poste de l’autorité religieuse du pays. 

Ce polar du moyen-orient est accompagné d’un autre film noir iranien, Holy Spider d’Ali Abbasi, qui après une incursion dans le fantastique suédois Border en 2018 (Prix Un certain regard à Cannes), tente une offense avec le film à serial killer dans le Téhéran de 2001.

Proche de cet univers inquiétant, celui du sud-coréen Park « Old boy » Chan-Wook (Prix du jury exaequo à Cannes en 2013 pour Thirst) débarque avec Decision to leave, une histoire d’amour atypique entre une veuve et le détective qui enquête sur la mort mystérieuse du mari de la femme. Le spécialiste du film à intrigues complexes et de vengeance coréen, questionne à nouveau la société et la morale de son pays avec ce polar étrange et sadique.

Crimes of the Future – kunstencentrum BUDA
Crimes of the Future de David Cronenberg

Le film historique

En terme d’histoire d’amour différente, il devra aussi en démordre avec la française Claire Denis qui vient présenter une romance sur fond d’histoire avec un H avec la relation entre une journaliste et un homme mystérieux en plein conflit politique dans le Nicaragua des années 80s avec Stars at Noon

Parlons-en du film historique, très présent sur la croisette cette année, avec Zhena Chaikovskogo de l’opposant au régime russe, Kirill Serebrennikov, qui est également une histoire d’amour celle du musicien Piotr Tchaikovski et de sa femme dans la russie impérialiste du XIXe siècle. Le cinéaste nous a déjà habitués à la révision historique de son pays avec Leto présenté à Cannes en 2018 (prix Cannes Soundtrack).

Avec une autre histoire, Les Amandiers, celle de l’école de théâtre des Amandiers de Nanterre dans les années 80, l’actrice-réalisatrice Valéria Bruni Tedeschi (Prix spécial du jury 2007 pour son film Les Actrices) évoque le parcours des jeunes acteurs à une époque qu’elle a bien connue.

L’italien Mario Martone, habitué des films historiques italiens, revient cette année sur les dernières décennies de Naples avec Nostalgia qui combine également des éléments du polar au portrait de ville à la Nanni Moretti.

Les Amandiers - Valeria Bruni Tedeschi - Fiche film
Les Amandiers de Valeria Bruni Tedeschi

Le catalan Albert Serra (Prix spécial du jury d’Un certain regard à Cannes 2019 pour Liberté) également connu pour ses films historiques à intrigues décalées, examine cette-fois, la société française sur l’île de Tahiti avec Pacifiction autour de la panique de la reprise des essais nucléaires par l’hexagone. 

Avec Triangle of Sadness, Ruben Ostlund (Palme d’or de 2017 pour The Square), tout aussi improbable, abandonne le portrait de la Suède contemporaine pour une intrigue délirante sur une croisière de luxe prise dans une tempête et un empoisonnement alimentaire sous la houlette d’un capitaine démentiel.

Jamais deux sans trois, pour l’inclassable EO du vétéran polonais Jerzy Skolimowski (Grand prix du jury à Cannes en 1978 pour Le cri du sorcier) avec l’errance d’un âne et ses différentes rencontres avec les humains.

Le film belge

Close, deuxième film du belge Lukas Dhont, après Girl de 2018, qui avait remporté la Caméra d’or, traite également de relations familiales complexes et de l’amitié entre adolescents.

L’actrice belge Charlotte Vandermeersch et Felix Van Groeningen (prix Art et Essai 2009 à Cannes avec La merditude des choses), enfant terrible des portraits de famille éclatés du cinéma flamand, après une incursion aux Etats-Unis avec My beautiful boy de 2018, changent de pays avec Le Otto Montagne, sur la relation poreuse entre deux familles dans l’Italie des années des dernières décennies.

La Belgique sera également présente une troisième fois par les frères Dardenne (Palme d’or en 1999 pour Rosetta et 2005 pour L’Enfant) qui reviennent avec Tori et Lokita sur un terrain qu’ils connaissent le mieux: celui des immigrés en exil en Belgique. C’est aussi peut-être un retour aux fondamentaux de leurs thématiques, en référence à La Promesse.

TORI ET LOKITA - Festival de Cannes 2022
Tori et Lokita de Jean-Pierre et Luc Dardenne 

Autre variante sur le thème de l’immigration en Europe, Un petit frère, deuxième film de la française Léonor Serraille (Caméra d’or à Cannes en 2017 pour Jeune femme) en y ajoutant le thème de la famille recomposée durant les années 80 dans la banlieue parisienne.

Peut-être un hommage aux Dardenne que celui du japonais Hirokazu Kore-Eda (Palme d’or 2018 avec Une affaire de famille) qui sort de son pays pour faire une incursion en Corée avec Broker (Les bonnes étoiles) autour d’une famille qui tente de vendre son enfant, qui nous rappelle L’Enfant des deux frères belges.

La compétition officielle est assez homogène dans ses thèmes. Oscillant entre le polar, le film historique et la famille, la lutte pour la Palme d’or 2022 se joue sur les petites variations liées à la personnalité des différents auteurs davantage qu’à une thématique spécifique. 

Soulignons la présence de 3 films de réalisateurs belges dans cette édition qui marque le retour du festival à son calendrier traditionnel après 2 années de pandémie.

Mais le festival de Cannes ce n’est pas seulement la compétition officielle.

Hors-compétition

Invités en avant-première mondiale, les films hors-compétition sont l’occasion de voir avant tout le monde les grosses productions n’ayant pas besoin de prix pour être promus.

On peut compter sur l’ouverture du festival par Coupez! De Michel Hazanavicius avec les acteurs Bérénice Bejo et Romain Duris, dans une comédie déjantée et un hommage au cinéma, remake du film japonais de zombies Cut of the dead de Shin’ichirō Ueda (2017).

Seront également hors-compétition, les films des deux Toms : Top Gun: Maverick de Joseph Kosinski avec Tom Cruise, sans parler d’Elvis de Baz Luhrmann avec Tom Hanks.

Avec Novembre, Cédric Jimenez accompagné de l’acteur Jean Dujardin, revient après son exploration de la police marseillaise dans BAC Nord de 2021, à l’exploration de la police de la capitale durant les attentats parisiens du 15 novembre 2015.

 

Elvis' Trailer: See Austin Butler's Incredible Transformation – Hollywood Life
Elvis de Baz Luhrmann

Sur une note plus légère Nicolas Bedos (OSS 117: Alerte Rouge en Afrique Noire) revient à la comédie romantique avec Mascarade, tandis que Louis Garrel traite de manière comique de la romance entre un détenu et une mère de soixante ans sous le regard affolé de son fils dans L’innocent.

À retenir également : le réalisateur iconique de la saga Mad Max vient présenter sa nouvelle comédie Trois mille ans à t’attendre avec Tilda Swinton et Idris Elba en génie sortant d’une bouteille.

C’est donc un grand cru que cette édition vient présenter à nouveau sur la croisette, ce mois de mai 2022. Préparez vos rétines pendant deux semaines du 17 au 28 mai 2022.

Pour découvrir toute la programmation c’est par ici : https://www.festival-cannes.com/fr/festival/programmation/