Pourquoi « Close » est l’un des plus beaux films belges sortis ces dernières années ?
4 ans après le succès de son film « Girl » le cinéaste Lukas Dhont est revenu l’année dernière avec « Close », une œuvre bouleversante, qui traite de l’enfance et de la culpabilité. Ce nouveau long métrage sera acclamé par la critique et le public et prouve que ce jeune réalisateur est définitivement parti pour devenir l’un des plus grands metteurs en scène belge.
Avant de nous plonger dans l’analyse de l’œuvre, il faut revenir sur la carrière de son metteur en scène. Lukas Dhont est un réalisateur et scénariste belge. II est diplômé de l’Académie Royale des Beaux-arts de Gand. À l’Université de Gand il étudie les arts audiovisuels et s’intéresse particulièrement à la fiction cinématographique. Mais la fiction n’est pas le seul domaine sur lequel il se penche, puisqu’il choisit un enseignement axé également sur les documentaires, surtout ceux relatifs à l’humain. Il a commencé sa carrière en réalisant quelques courts métrages. L’identité et la transformation sont ses thèmes de prédilection, toutes ses œuvres sont en rapport avec elles.
Girl, un premier long métrage en 2018
En 2018, il sort son premier film, « Girl », qui parle d’une danseuse trans. Il a eu beaucoup de succès et fut salué par la critique. Il fait partie de la sélection Un Certain Regard du Festival de Cannes 2018 où il reçoit la Caméra d’Or du meilleur premier film ainsi que la Queer Palm.
Dhont est actuellement considéré comme l’un des jeunes cinéastes belges les plus prometteurs. Le 19 décembre 2018, il a été annoncé que Lukas Dhont développait déjà la production de son deuxième film.
Il n’y a pas eu d’autres développements jusqu’au 23 juillet 2020, lorsque le cinéaste a mis en place un appel de casting pour les deux rôles principaux masculins, qui devaient être joués par des comédiens inexpérimentés. L’audition était ouverte aux Flamands et Francophones et Dhont a décidé de tourner son film en français après le casting. Le 20 octobre 2020, le titre du film a été dévoilé : « Close »
Un second film très réussi
Faire un deuxième film après le succès de son premier est une tâche compliquée, et tous les réalisateurs ne relèvent pas le défi. Mais Lukas Dhont y est arrivé parfaitement, « Close » a reçu un accueil encore plus favorable que « Girl », il a reçu le Grand Prix au Festival de Cannes 2022 et a été également salué par le public.
Avant de continuer, je tiens à préciser que beaucoup d’éléments de l’intrigue seront dévoilés dans cette analyse.
Le film raconte l’histoire d’une amitié très forte entre deux jeunes garçons de 13 ans, Léo et Rémi. À leur arrivée à l’école secondaire, leurs camarades pensent qu’ils sont en couple tellement ils sont proches. Cela va amener Léo à prendre de plus en plus ses distances avec Rémi. Rémi va se suicider et du coup Léo va énormément culpabiliser, car il se sent responsable de la mort de son ami.
Une œuvre qui n’a pas peur d’aborder des sujets difficiles
Le sujet traité par « Close » est très fort, c’est une œuvre qui nous parle de culpabilité.
Léo se retrouve confronté à un événement horrible, injuste et terriblement difficile à gérer, surtout pour son âge. On va le voir tenter de continuer sa vie, mais les remords le rongent, il se sent responsable du suicide de Rémi. Il se dit que s’il n’avait pas pris des petites distances, son ami serait encore là. Ce qui est puissant et intelligent c’est que, oui, Léo est responsable de la mort de son ami, c’est clairement à cause de lui qu’il s’est suicidé.
En revanche, et ça peut paraître paradoxal, le film ne nous le présente pas comme une mauvaise personne, absolument pas. Il culpabilise, c’est normal, mais il ne devrait pas car il n’a rien fait de mal. II ne pouvait pas s’attendre à ce que son ami fasse une chose pareille et surtout, il s’est rendu compte que son ami avait une attirance pour lui, ce que lui ne partage pas, malgré toute l’affection qu’il a pour Rémi.
Comment repousser quelqu’un qui est manifestement amoureux de vous et ce n’est pas réciproque même si vous l’appréciez beaucoup ? C’est normal qu’il prenne quelques distances. On pense notamment à une scène où Rémi se glisse dans le lit de Léo. Ce dernier ne veut pas que Rémi dorme avec lui, il lui demande de retourner dans son lit mais il refuse et ça devient presque une bagarre. Le film traite donc son sujet avec beaucoup de nuances.
Un film qui brille par son réalisme
C’est très réaliste, le fait que Léo ait une réelle responsabilité sur la mort de son ami mais qu’en même temps, on ne peut pas lui en vouloir, c’est vraiment intéressant, le film n’est pas manichéen. La performance des acteurs est magistrale, tous sont d’une incroyable justesse. Les acteurs enfants sont très impressionnants, ils parlent comme dans la vraie vie, on se sent très proches d’eux, comme si on était avec eux dans la scène.
Le jeune Eden Dambrine qui joue Léo est formidable dans ce rôle. Il est terriblement touchant et parvient à nous émouvoir avec seulement des regards. Le film traite son sujet avec beaucoup de sobriété, il y a assez peu de paroles. Tout fonctionne avec le non-dit, tout se base sur le jeu des comédiens.
On ressent parfaitement les émotions des personnages même s’ils ne les expriment pas verbalement et c’est ça qui est très fort. Le film n’a pas besoin d’en faire des tonnes pour nous toucher. Cependant le long métrage n’est pas non plus parfait, on aurait peut-être voulu en savoir un peu plus quand même, voir plus d’interactions entre Léo et la mère de Rémi. Le suicide de Rémi arrive également un peu trop vite dans l’intrigue, c’est légèrement trop brusque, même si Léo prend quelques distances, rien de réellement grave ne s’est produit dans le récit avant. Mais ce sont des petits détails, « Close » est une œuvre admirable, très belle et touchante. Le film traite son sujet avec beaucoup d’élégance, de réalisme et de justesse.
Cela fait plaisir de voir un film belge aussi réussi.
Bande-annonce Close (2022) VF :