« Speak no evil »: un remake inutile ?
Il est très compliqué pour moi de réellement définir mon opinion sur ce « Speak no evil » version 2024, tant je suis partagé. Pour ceux qui ne le sauraient pas, il s’agit du remake américain du film d’horreur danois du même nom, sorti deux ans plus tôt. Avant de nous concentrer sur celui-ci, revenons sur l’œuvre d’origine.
J’ai été grandement marqué par la première version de « Speak no evil ». Le long métrage est terriblement efficace dans ce qu’il fait et déroute par son nihilisme. Il parvient avec brio à créer une ambiance étouffante, qui devient de plus en plus anxiogène, jusqu’à un acte final qui m’a tout simplement glacé le sang. Peu de films d’épouvantes sont arrivés à me prendre aux tripes et à me mettre mal à l’aise de cette manière.
James McAvoy et Aisling Franciosi © Blumhouse Productions
Il s’agit d’une œuvre remarquable, car totalement maîtrisée, mais également à ne pas mettre dans toutes les mains, car elle est choquante et cruelle. L’intrigue se concentrait sur un couple de Danois ayant sympathisé avec un couple de Hollandais en vacances. Suite à cela, ils vont être invités par ces derniers à passer un week-end dans leur maison aux Pays-Bas. Sauf que ce séjour, qui s’annonçait comme idyllique, va vite prendre une tournure très sombre, car les Hollandais vont avoir un comportement très étrange et inquiétant… Je ne vous en dis pas plus.
Une nouvelle version qui n’apporte pas grand-chose
Parlons du remake maintenant. Je dois dire que j’ai été agacé lorsqu’il a été annoncé, car j’avais peur qu’il trahisse ce qui faisait le sel du film d’origine. Je n’aime vraiment pas cette manie qu’ont les Américains de refaire les succès étrangers à leur sauce, au lieu de simplement lire des sous-titres. La première question que je me pose donc est quelle est son utilité ? Pourquoi mettre en scène une nouvelle version d’une œuvre aussi récente et qualitative ? Quelle est la valeur ajoutée ?
Une œuvre qui ne parvient pas à atteindre la force de l’original
N’ayons pas peur de dire les mots, ce remake est très anecdotique et n’arrive pas à la cheville de son modèle. Il ne fait que reprendre la même intrigue, mais en rendant le tout plus aseptisé. L’une des craintes que j’avais par rapport à ce remake s’est confirmée. Il s’agit globalement de la même histoire, mais en nettement moins perturbante et malsaine. Le retentissement sur le spectateur n’est donc absolument pas aussi puissant.
Le film original danois de 2022, avec les acteurs Morten Burian et Siedsel Siem Koch © Profile Pictures
Sans vouloir trop en révéler, seul le troisième acte est réellement différent et il est, sans surprises, beaucoup moins violent. Lorsque j’avais vu la première version, j’avais imaginé une fin comme celle de son remake. C’est justement parce qu’il ne m’a pas donné ce que j’attendais, que j’en garde un souvenir aussi intense.
Un film qui n’est malgré tout pas dénué de qualités
Alors, malgré ces reproches, pourquoi ai-je tout de même de l’affection pour ce « Speak no evil » de 2024 ? (Il y a évidemment le fait que j’ai eu le plaisir de le découvrir au cinéma, en très bonne compagnie, mais ça, c’est purement subjectif). Grâce aux comédiens et aux personnages. Le casting est le seul élément où le remake surpasse l’original.
Mackenzie Davis et Scoot McNairy © Blumhouse Productions
Les acteurs sont tous fabuleux, James McAvoy crève l’écran, il est impérial dans la peau de ce personnage extravagant et inquiétant. L’actrice Mackenzie Davis est assez magistrale aussi dans le rôle de cette mère de famille battante et attachante. Le déroulé de l’intrigue est sensiblement le même que celui de l’original, si on met de côté la fin, mais les personnages diffèrent. Ce remake perd en ambiance, mais gagne en développement de ses protagonistes et antagonistes.
James McAvoy et Aisling Franciosi © Blumhouse Productions
Ils sont tous intéressants, très bien écrits et ont des personnalités solides. Cela fait qu’on parvient quand même à être impliqué dans l’intrigue. Le film va également corriger les quelques petites facilités de son modèle. On justifie mieux pourquoi le couple ne s’en va pas, tout en ne trahissant pas le message de l’œuvre d’origine, qui est qu’il ne faut pas laisser la politesse nous faire accepter l’inacceptable.
Un film que je suis parvenu à apprécier, tout en étant conscient de ses lacunes
Vous l’aurez compris, le bilan sur ce « Speak no evil » version 2024 est assez mitigé. D’un côté, j’ai très peu de sympathie pour ce genre de projets, qui sont pour moi inutiles, comme vous l’avez lu, j’ai beaucoup de choses à reprocher à ce remake, je vous recommande de voir en priorité l’original. Néanmoins, cette version de 2024 parvient à avoir quelques qualités propres à elle-même malgré tout. Ça n’en fait en aucun cas un grand film d’horreur comme son modèle, mais on parvient toutefois à passer un bon moment en l’observant et ce n’est déjà pas si mal.
Bande-Annonce (FR) :