Il existe à Bruxelles un cimetière désaffecté depuis 1958 où la végétation reprend ses droits sur les vielles pierres et les tombeaux qui s’entrouvrent. Le Dieweg, un décor digne d’un film de vampires, et pourtant tellement romantique.

Toutes les photos sont de Grégoire Tolstoï.

C’est par une matinée glaciale de janvier, alors qu’une fine poudreuse descend délicatement du ciel sombre sur les pierres grises des tombeaux, que mes pas m’ont portés parmi les sépulcres abandonnés d’une nécropole silencieuse.

Et pourtant, nous sommes en pleine ville, à Uccle plus exactement, au cimetière du Dieweg. Un lieu célèbre pour son charme suranné et légèrement inquiétant. Là tout n’est que calme et tranquillité. Une pause bienvenue loin de l’agitation des rues, un lieu de recueillement et de médiation : « Nous fûmes ce que vous êtes, vous serez ce que nous sommes… »

Le Dieweg, un cimetière d’épidémie

C’est suite à la terrible épidémie de choléra qui a sévit à Bruxelles en 1866 que les édiles ont dû ouvrir de nouveaux lieux de sépultures. C’est alors un lieu bucolique, le long du chemin du Dieweg, un terrain en pente avec vue sur la Forêt de Soignes toute proche. Las ! La fermeture d’autres cimetières bruxellois plus centraux, et l’expansion démographique dans la capitale, vont bientôt saturer ce beau cimetière proche des bois. Un nouveau cimetière s’ouvre en 1945 au Verrewinkel, et le Dieweg tombe en disgrâce. Il est officiellement désaffecté en 1958, et classé en 1997.

Un cimetière vivant malgré tout

Il est encore possible de vous y faire enterrer si votre famille est déjà propriétaire d’une concession. Rare sont les exceptions, comme celle en faveur du plus célèbre résident des lieux : Hergé. Sa tombe très sobre rappelle l’adage : aux grands hommes, une pierre et un nom. Sa veuve Fanny y a romantiquement déjà gravé son nom et sa date de naissance, laissant la date suivante en suspens.

Mais les petites bêtes sont nombreuses à avoir élu domicile dans cet endroit quiet. Outre les oiseaux, rongeurs et petits animaux, on y a dénombré plus de deux cents espèces de plantes, ce qui est un véritable refuge de biodiversité sur ces trois hectares préservés.

Juifs et Chrétiens unis dans la mort

Une particularité de ce cimetière est d’y voir se côtoyer les tombes des familles juives et des familles chrétiennes. Il est d’usage pour les Juifs d’avoir des cimetières séparés, mais cette tradition n’est pas respectée en ce lieu. Beaucoup de représentants des plus grandes familles juives de Belgique, banquiers et philanthropes, y sont enterrés ; et aussi de nombreuses familles chrétiennes actives en politique ou dans les arts aux XIXe et XXe siècles.

Je suis un mort encore vivant

Jacques Brel, la Chanson de Van Horst

Un mort qu’on abandonne est mort deux fois

Marie Lefranc, Ô Canada

Mort : échéance de fin de moi

Anonyme

Aimer, la meilleure préparation à la mort

Marcel Jouhandeau

La mort rend égales toutes les choses

Claudien

Instruire un imbécile, autant soigner un mort

Proverbe russe

Si nombre de gens ont peur de la mort, la mort ne craint personne

Pierre Dac

Puisque la mort est la paix éternelle, si tu veux la paix, fais le mort

Jean L’Anselme

Cimetière du Dieweg : Dieweg 95, 1180 Uccle, Bruxelles.


Une envie de prolonger cette visite sépulcrale ? Et si nous rendions visite à la « vampiresse du cimetière du Père-Lachaise ? »