L’exposition originale des collages d’Émelyne Duval sur le thème de la Franc-Maçonnerie au Musée belge de la Franc-Maçonnerie fait décoller le thème maçonnique vers la dérision.

Quelle ne fut la surprise d’Antonio Nardone lorsqu’il a vu débarquer dans sa galerie une jeune femme dont il défend le travail depuis cinq ans et qui lui a présenté ses nouvelles œuvres, des collages amusants et tellement créatifs sur le thème de la Franc-Maçonnerie. « Tu connais ? Ca t’intéresse ? » lui demanda-t-elle ingénument, ignorant que son interlocuteur galeriste, en plus d’être un curateur et organisateur d’expositions itinérantes, a aussi repensé la scénographie du Musée belge de la Franc-Maçonnerie. « Frappez et on vous ouvrira », paraît-il. La chance était avec Émelyne Duval ce jour-là, et la voici exposée avec 60 de ses collages aux cimaises du musée de la Rue de Laeken à Bruxelles jusqu’au 20 juillet 2024.

Maître de l’échiquier, et Maîtresse Devisse, 2024 © Émelyne Duval / Musée belge de la Franc-Maçonnerie

Émelyne Duval est une artiste belge qui ne connaît pas le monde mystérieux de la Franc-Maçonnerie. Elle glane des revues anciennes, des photos démodées, toute sorte d’éléments du passé qui lui permettront de laisser libre cours à sa créativité au travers de collages, son mode d’expression favori. C’est en tombant sur des images maçonniques que l’idée de développer une série sur ce sujet l’a saisie. Des images interpellantes et abscondes comme un traité d’alchimie ! Des tabliers brodés, des gants blancs, des sautoirs couverts de symboles, des décorations inconnues, des postures hiératiques, tout un monde caché et suranné qui se prend un peu au sérieux. Qu’à cela ne tienne, Émelyne va vous dépoussiérer tout cela en quelques coups de ciseaux et avec quelques tubes de colle. Avec finesse et poésie aussi.

De Maître il devient Maîtresse, 2024 © Émelyne Duval / Musée belge de la Franc-Maçonnerie

Son humour décalé sur leur Ordre, un peu dans le genre des Monty Pythons, a beaucoup plu aux Francs-Maçons belges qui ont accepté ces œuvres profanes dans leur musée. Il faut dire que la Belgique est la patrie de l’autodérision, et les Maçons ne font pas exception à la règle, eux qui revendiquent que l’ouverture d’esprit n’est pas une fracture du crâne. Le titre de l’exposition a été trouvé par Antonio Nardone lui-même. Pas sûr qu’en France ce genre de traitement du thème maçonnique ne reçoive le même accueil amusé. Question de génération aussi, les vieilles barbes sont souvent moins enclines à l’autodérision, les jeunes générations sont plus irrespectueuses des conventions. Cela a toujours été le cas, et « chez ces gens-là, Monsieur », on n’est pas différents des autres, comme dirait Brel. Mais ces images-là «sont belles comme des soleils ». De très jolis textes écrits par des Frères et des Sœurs les accompagnent, sur le thème du Maître ou de la Maîtresse.

Il existe encore, et Et qu’en vos Loges adviennent, 2024. © Émelyne Duval / Musée belge de la Franc-Maçonnerie

L’exposition se déroule sur les murs d’un musée qui mérite une visite. Si vous voulez découvrir le monde étrange de la Franc-Maçonnerie, celle-ci s’expose toute l’année ronde dans ce musée petit par la taille mais grand par la qualité des objets exposés. Vous pénétrerez par une porte pas trop basse, et sous une voûte étoilée, dans des salles mystérieuses et intrigantes. C’est dans la pénombre et le silence que ces secrets se dévoilent, un peu. Tout est exposé sous les yeux étonnés des visiteurs, mais le non-initié gagnera à être un peu guidé ou à chercher à s’instruire. Les salles sombres, mais pas humides, vous donneront un avant-goût du monde maçonnique, mais pas la clef des symboles qui s’offrent à vous. Cette clef n’est-elle finalement pas en chacun de nous ? Ou bien sommes-nous les serrures ?

Le Musée belge de la Franc-Maçonnerie vous accueille au 73 Rue de Laeken, 1000 Bruxelles, près de la Place De Brouckère. Ouvert aussi le lundi, jour de fermeture de la plupart des musées !


Le thème maçonnique vous intéresse? Voyez l’exposition sur les rites égyptiens à Paris.