« Le Comte de Monte-Cristo », Vengeance! Vengeance! Vengeance !
Le chef d’œuvre d’Alexandre Dumas, ou l’art culinaire de la vengeance, un plat qui se mange très froid, voire glacial. Ce qui ne l’empêche pas d’être extrêmement digeste. Le comte de Monte-Cristo : un très beau film lumineusement sombre à découvrir maintenant dans les salles obscures.
L’histoire
Tout commence bien pour Edmond Dantès. Jeune homme capable et courageux, il sauve une belle blonde de la noyade. Le capitaine du bateau aurait préféré la voir périr que de prendre un risque sur la cargaison qu‘il transporte. Son patron ne lui en sera pas gré ; renvoyé pour lâcheté, c’est Edmond Dantès qui sera nommé capitaine à sa place. Une belle situation pour ce garçon de petite extraction, fils de domestiques de la famille des comtes de Morcerf. Cette nouvelle position sociale va lui permettre de réaliser son rêve : épouser la belle Mercédès de Morcerf, la jolie cousine de son ami le comte Fernand de Morcerf, le fils de la famille pour laquelle son père travaille. Ils s’aiment d’un bel amour qui va au-delà des conventions. La vie sourit donc à ce jeune homme qui profite des changements dans la société française et de la démocratisation des rapports sociaux. Nous sommes en 1814 et l’ère bourgeoise de la Restauration est en marche. Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ?
Pierre Niney est un Comte de Monte-Cristo bluffant © Chapter 2 / Pathé Films
Ce beau conte de fées va hélas vite tourner au cauchemar. La jalousie du l’ancien capitaine évincé le fera dénoncer Edmond Dantès auprès des nouvelles autorités monarchistes comme un espion à la solde de Napoléon. C’est totalement faux, mais le procureur de Villefort fera semblant de le croire pour protéger sa sœur, la jolie blonde que Edmond a sauvé de la noyade, et qui elle est une véritable espionne. Fernand de Morcerf venu aider son ami Edmond finira par l’accabler lui aussi, dans l’espoir de briser le mariage en cours de sa jolie cousine Mercédès qu’il voudrait lui-même épouser. Tout et tous conspirent contre le naïf Edmond Dantès qui va se retrouver prisonnier au large de Marseille, dans la terrible forteresse du Château d’If, au fond d’un épouvantable cul de basse fosse.
En prison avec l’abbé Faria © Chapter 2 / Pathé Films
S’ensuivent quatorze ans de réclusion très dure. A croire que jamais il ne reverra le jour. Et pourtant, l’espoir réapparaît même quand on ne l’espère plus. Et avec lui le secret d’une immense fortune venue de l’Ordre des Templiers. Sans divulgâcher la suite pour ceux qui n’auraient pas lu le roman d’Alexandre Dumas, qu’il vous suffise de savoir qu’Edmond Dantès revient, et qu’il n’est pas content. Une seule idée le hante après avoir tout perdu : la vengeance !
Une vengeance ourdie de longue date © Chapter 2 / Pathé Films
Le film
Les réalisateurs Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte nous avaient déjà régalés l’an dernier avec deux films, adaptations des Trois Mousquetaires : d’Artagnan et Milady.
Il récidivent avec cette nouvelle adaptation d’un des romans iconiques d’Alexandre Dumas, Le Comte de Monte-Cristo. Toujours soutenus dans leur démarche par le producteur Dimitri Rassam, le fils de l’actrice Carole Bouquet, et mari de Charlotte Casiraghi dont il s’est séparé récemment. Le budget du film, 43 millions d’euros, est le plus gros budget de l’année pour un film français. La production n’a pas lésiné, notamment sur les 350 costumes d’époque qui rendent le tournage très crédible.
Pierre Niney prêt à tout © Chapter 2 / Pathé Films
L’idée des réalisateurs a été de tailler ce film spécialement pour Pierre Niney, vu par exemple dans Yves Saint Laurent (2014) ou OSS 117, Alerte rouge en Afrique noire (2019). Ils le voulaient lui, et personne d’autre, dans le rôle d’Edmond Dantès. L’acteur français de trente-cinq ans possède en effet les qualités requises pour incarner à la fois un jeune homme et un homme dans la quarantaine vieilli par les épreuves de l’incarcération.
© Chapter 2 / Pathé Films
Les décors sont admirables, authentiques, loin d’un bling bling hollywoodien faussement ancien. Le film est tourné dans de magnifiques lieux d’époque, comme le château de l’Engarran près de Montpellier qui est la jolie demeure des Moncerf, ou le château d’If évidemment, au large de Marseille, où Edmond Dantès est supposé être emprisonné, qui existe toujours, et où les scènes de son enfermement ont été réellement tournées. Ou encore le port l’île de Malte qui représente admirablement celui de Marseille au début du XIXè siècle.
L’amour, la violence, la mort © Chapter 2 / Pathé Films
Quant au château du Comte de Monte-Cristo dans le film, il est issu de l’assemblage de plusieurs lieux existants qui en font ensemble un endroit féérique. La base en est le château d’Aubiry dans les Pyrénées-Orientales, avec des scènes tournées au château de Ferrières pour les scènes d’extérieur, au château de Dampont pour une chambre, à la cathédrale de Meaux pour la salle de répétition, ou encore à la Bourse de Paris pour le décor du salon. Le toit de l’édifice rappelle la basilique Sainte-Sophie de Constantinople.
Le Comte de Monte-Cristo © Chapter 2 / Pathé Films
Le film fait d’ailleurs de nombreuses allusions à l’Orient, notamment à la Valachie dont Pierre Niney et l’actrice Anamarie Vartolomei manient souvent la langue, le roumain. Edmond Dantès se fait passer pour un comte aux origines orientales, dont le look en manteau de cuir noir et chapeau haut de forme n’est pas sans rappeler celui du Dracula de Francis Ford Coppola. Crédibles, le père de Pierre Niney est d’origine juive égyptienne, et Anamaria Vartolomei est née en Roumanie.
Anaïs Demoustier dans le rôle de Mercédès de Moncerf © Chapter 2 / Pathé Films
Les scènes de tempête du début ont été tournées à Bruxelles (Vilvoorde) dans les studios Lites qui sont le plus grand bassin de cinéma au monde. Des ballons énormes et très lourds sortent et reviennent dans l’eau pour créer des vagues, d’immenses ventilateurs soufflent un vent de tempête. C’est tellement réaliste que Pierre Niney avoue avoir bu la tasse plusieurs fois pendant le tournage.
Bastien Bouillon, Anaïs Demoustier et Pierre Niney © Chapter 2 / Pathé Films
Le film est présenté à Cannes, hors-compétition. C’est sûrement mieux ainsi car il aurait raflé beaucoup trop de prix. Le public dans la salle de cinéma bruxelloise où je l’ai vu ne s’y est d’ailleurs pas trompé, qui a longuement applaudit à la fin, chose assez rare que pour être soulignée.
Les gagnants seront les perdants © Chapter 2 / Pathé Films
« Toute la sagesse humaine est dans ces deux mots : attendre et espérer. » Le Comte de Monte-Cristo
Les origines : un fait divers réel
Lorsque Alexandre Dumas publie son livre sous forme de feuilleton entre 1844 et 1846, il s’inspire pour l’écrire d’une histoire vraie arrivée en 1807. C’est l’histoire d’un petit cordonnier de Nîmes, François Picaud, qui monte à Paris pour tenter sa chance. Il y rencontre la jolie Marguerite Vigoroux, jeune femme riche. Il s’ouvre de sa bonne fortune à un « ami » cafetier, Mathieu Loupiau, qui aime lui aussi secrètement Marguerite. Ce dernier va comploter avec deux comparses et dénoncera François Picaud comme étant soi-disant un agent à la solde des Anglais. Emprisonné pendant sept ans pour un crime qu’il n’a pas commis, il rencontrera durant sa captivité un riche abbé italien, prisonnier comme lui, qui en fera son légataire universel.
De bonnes têtes de traîtres : Patrick Mille, Laurent Lafitte et Bastien Bouillon © Chapter 2 / Pathé Films
Libéré, Picaud va prendre possession de cet héritage, change de nom, et ourdit une terrible vengeance. Marguerite l’a attendu deux ans, puis a épousé Loupiau. Picaud va assassiner tous les traîtres qui ont participé à sa chute, ruiner le mariage de la fille de Marguerite, condamner son fils à la prison et enfin mettre le feu au café. Une fois Marguerite morte de chagrin, il tuera de ses propres mains le traître Loupiau. Enfin il fait envoyer aux galères le dernier comparse de Loupiau. Mais ce comparse réussi à s’évader, revient tuer Picaud, et confesse toute l’affaire à un prêtre, de qui la police tient toute l’affaire. Une incroyable histoire en effet, digne d’un roman.
Et quel roman ! Et quel film ! Allez voir Le Comte de Monte-Cristo au cinéma !
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