Écrivain de grand talent, auteur de 32 ouvrages, Michel de Grèce était l’homme le plus aimable et le plus charmant du Monde. Ses livres parlent de l’Histoire qu’il aimait tant et à laquelle il a souvent participé, de sa famille qu’il respectait et connaissait bien, et sur laquelle il portait un regard souvent amusé, et des fantômes auxquels il vouait une tendre passion. Il les a rejoints ce dimanche 28 juillet.

Illustration : portrait du prince Michel de Grèce, couverture du livre « Mémoires Insolites » © XO Éditions

Le mieux pour présenter le prince Michel de Grèce à ceux qui ne le connaîtraient pas est de le laisser se présenter lui-même, comme il le fait dans son autobiographie Mémoires Insolites. « Lorsqu’on me demande d’expliquer mes origines familiales, ma réponse est standard : mon père était grec, ma mère française, mon grand-père danois, ma grand-mère russe et l’autre grand-mère à moitié espagnole. En effet, mon père, Christophe de Grèce, était, comme son nom l’indique, grec. Cependant son propre père, le roi Georges Ier, n’était pas grec de naissance. Deuxième fils du prince héritier du Danemark, ce Danois s’était engagé dans la marine danoise.

Le prince Michel de Grèce est entré dans la Lumière © Prince Michel de Grèce

Il avait dix-huit ans lorsqu’une délégation de Grecs était venue lui demander de régner sur leur pays. Il avait accepté, il était parti pour la Grèce, et il était devenu grec. Il avait épousé une nièce du tsar, Olga de Russie. Quant à ma mère, Françoise, elle appartenait à la maison de France, mais sa grand-mère maternelle était une infante d’Espagne. À quoi je peux ajouter que j’ai du sang brésilien par une arrière-arrière-grand-mère, fille de l’empereur du Brésil, et énormément de sang allemand par des princesses de Mecklembourg, de Saxe, de Hesse, épouses d’ancêtres. »

Les parents de Michel: le prince Christophe de Grèce (1888-1940), peint par László en 1919, et la princesse Françoise de France (1902-1953), au début des années 1920 © Wikipedia Commons

Puisant à la source de cette illustre ascendance, il aimait en raconter les bonheurs et les malheurs, toujours avec humour. Très attaché à ce passé à la fois historique et mythique, Michel de Grèce croyait fermement à l’existence des fantômes. Il disait les côtoyer fréquemment et ne pas en avoir peur. C’était comme une seconde famille ou des amis d’Outre-Tombe. Conteur hors pair, le prince aimait raconter de nombreuses histoires mystérieuses qui lui étaient arrivées personnellement, ou que des personnes ouvertes à ce sujet comme lui, lui avaient rapportées. Devenu une référence en la matière, j’ai fait appel à ses lumières pour qu’il me raconte des histoires de fantômes russes qu’il a bien voulu partager avec moi, car nous avions cette passion en commun.

Les fantômes passionnaient Michel de Grèce © Plon

Sa bibliographie de 32 livres comprend, entre autres, des mémoires comme Mémoires Insolites (2004), des livres sur l’histoire du monde ottoman comme La Nuit du Sérail (1982), La Bouboulina (1993) ou Le Dernier Sultan (1991), l’histoire de France avec par exemple L’Ogre, quand Napoléon faisait trembler l’Europe (1986) ou de Belgique dans L’Impératrice des Adieux (1998) qui raconte l’histoire de l’infortunée princesse Charlotte de Belgique, Impératrice du Mexique, ou encore l’histoire de Russie avec La Nuit Blanche de Saint-Pétersbourg (2000), l’histoire d’un amour vrai et malheureux entre le grand-duc Nicolas Constantinovitch de Russie et une jeune Américaine. Et bien sûr les histoires bizarres comme dans Ces Femmes de l’Au-delà (1995),  Le Ruban noir de Lady Beresford et autres histoires inquiétantes (2005), ou encore Mes Aventuriers Excentriques (2021), son avant-dernier livre.

Michel de Grèce chez lui à Paris © Ulf Andersen / Aurimages.

Tout ce qui sortait du train-train ennuyeux de la vie éveillait en lui l’intérêt, comme une salutaire récréation par rapport à la banalité des obligations de l’existence. Et cela malgré que sa vie ne fut pas banale. Né à Rome en 1939, son père meurt alors que Michel n’a qu’un an. Sa mère quitte l’Europe envahie par les nazis et se réfugie au Maroc où le petit Michel de Grèce vivra son enfance. Revenus en France où il est inscrit au collège Stanislas à Paris, sa mère meurt en 1953 alors qu’il n’a que quatorze ans. Désormais orphelin, enfant unique, il est recueilli par la famille de sa mère, le comte et la comtesse de Paris. Il fait aussi de fréquents séjours en Grèce auprès de la Famille Royale.

Quelques livres de la longue biographie du prince littéraire © Wikipedia Commons

Diplômé de Sciences Po Paris, Michel part en Grèce faire son service militaire dans les garde-côtes et prendre une part plus active à la vie monarchique. Mais il tombe amoureux d’une belle jeune fille, Marina Karélla, fille d’un industriel grec. Comme elle n’est pas issue d’une famille royale il lui faudra choisir : le Trône ou l’Amour. C’est mal connaître Michel de Grèce qui n’hésitera pas. Il choisira bien sûr l’amour de la belle Marina et renoncera à sa place dans la ligne de succession au Trône.

Le mariage des deux M : Marina et Michel, 1965 © Point de Vue

Lors de la dictature des colonels en Grèce, le gouvernement lui proposera la Couronne, mais en homme de conviction Michel refusera et quittera son pays pour Paris et New-York. Le couple aura deux filles : la princesse Alexandra de Grèce qui épousera Nicolas Mirzayantz, et la princesse Olga de Grèce qui épousera le prince Aimone de Savoie-Aoste. C’est entouré de cette famille unie que Michel de Grèce est décédé dimanche à Athènes à l’âge de 85 ans. Ses funérailles sont prévues le 1er août à Athènes dans l’église des Saints-Théodores, et seront suivies de l’inhumation dans le cimetière de Tatoï, nécropole de la dynastie grecque, au Nord de la capitale, un splendide domaine de 3000 hectares de forêts, aujourd’hui propriété de l’État grec.

Le prince Michel de Grèce (1939-2024) © RTL

Le site du prince Michel de Grèce regorge d’histoires merveilleuses et fantômatiques. Visitez-le !


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