2023 va se terminer bientôt et l’heure des rétrospectives va sonner, que ce soient des photos d’actualités, les meilleures bêtises de Cyril Hanouna de l’année, des compilations des évènements occultes sur YouTube. Beaucoup adorent contempler l’année écoulée. Alors, pour les mélomanes, pourquoi ne pas proposer un bilan musical de l’année 2023 ?

Etat des lieux

Il est vrai qu’il est très difficile de rester objectif par rapport aux gouts musicaux qui sont très personnels. En grande majorité influencés par notre culture, notre environnement familial et notre personnalité.

De plus, il existe une variété infinie d’artistes de tous bords, comme par exemple l’artiste grand public Taylor Swift qui a battu tous les records de l’année avec la réédition de son album «1989 ». Bien sûr Taylor Swift est une artiste très bien défendue dans les grands médias et s’installe durablement comme la nouvelle reine de la pop, qui se prouve statistiquement par rapport à ses ventes et sa popularité d’écoute en streaming. Consulter les chiffres réels des ventes indiquent réellement la popularité d’un artiste .

Taylor Swift © AFP

Les grands médias vous parlent beaucoup de tel ou tel artiste pour impressionner, mais beaucoup de ces artistes ( Angèle n’a pas atteint les records de « Brol »  avec son album « 95 » ) ne tiennent pas des ventes face à la prédominance du rap ( peu représenté dans les grands médias ) dans les ventes albums francophone avec des artistes tel que Hamza, Damso, Luidji, PNL, Ninho, Lomepal, Vald, PLK, Orelsan… qui restent leaders . Les rappeurs, que cela plaise ou pas, sont les nouvelles rockstars, avec des frasques qui rappellent les provocations dans le rock des années 70, au moment de son apogée.

On peut également souligner la venue de Pierre de Maere dont l’attitude a divisé les réseaux sociaux par son comportement et ses origines de fils à papa. Sans oublier les sorties habituelles de Renaud, Florent Pagny, Vianney, Eddy De Pretto et Grand Corps Malade qui ne transcendent pas les précédentes mais qui ravissent leur public. Dans les artistes pop francophones, c’est certainement Aya Nakamura qui bat des records mondiaux et qui propose une évolution dans sa production avec « DNK » .

Pierre de Maere © Wikipedia Commons

Exception francophone

Après un tour de la scène francophone qui est obligatoire pour rappeler le slogan diffusé par le Ministère de la Culture française « Tu vis en France alors tu chantes en français »  pour défendre également l’exception culturelle française en musique face à l’influence des musiques anglophones. Une nouvelle mouture de la politique de l’exception française instaurée dans le cinéma français dans les années 1960. Politique culturelle qui a fonctionné puisque les artistes francophones ont réussi à faire leur trou dans le paysage musical. La Belgique francophone, qui est sous une très grande influence française, poursuit cette tendance avec un peu plus de place accordée à des sonorités internationales.

Bad Bunny © ROB GRABOWSKI/INVISION/AP

D’ailleurs beaucoup d’artistes ont fait trembler les charts internationaux comme Bad Bunny ou le nigérian Burna Boy, car oui l’Afrique commence également à se frayer une place importante dans la musique mondiale avec des courants comme l’afrobeats et des appropriations du Hip Hop et des musiques électroniques. Je vous laisse l’excellente vidéo de Hyconiq Mag qui va vous en apprendre un peu plus sur cette mouvance à surveiller de très près, et qui se développe en parallèle à la montée économique de plusieurs pays africains.

Tout s’accélère

La musique tourne beaucoup en travaillant, et ne suit pas forcément les tendances du marché francophone. Le streaming peut être une libération géographique pour les personnes qui n’ont pas forcément envie de se farcir les grosses sorties, ni les titres joués en radio. Et c’est dans cet espace-là que j’ai pu entendre les choses les plus novatrices, d’une autre facture que ce que les médias proposent.

Angèle © Wikipedia Commons

Beaucoup se plaignent que c’était mieux avant leurs 27 ans, âge qui correspond à l’arrêt de la découverte des nouveaux artistes et nouveaux genres suite à l’entrée dans la vie active qui provoque une paralysie musicale observée chez beaucoup.

Honnêtement, 2023 reste encore très riche musicalement avec bien plus de morceaux enregistrés en une seule année que dans les années 70 et 80 réunies. Bref, multiplication des références qui vont de pair avec une accélération de la société, des technologies et des moyens de diffusion. Voyez Netflix, à peine que vous ayez terminé une série, vous avez une multitude de nouvelles séries à voir.

Ou encore les records de sorties musicales et livresques qui font perdre la tête, jusqu’à noyer parmi la multitude de références des artistes qui pourraient être intéressants à suivre. Pour les utilisateurs de Apple Music, s’ils consultent les différents onglets musicaux, on peut quantifier les sorties à des milliers de nouveaux titres, et cela chaque semaine. Le danger c’est que l’on peut même arriver à « consommer »  des artistes de qualité comme un BigMac et ensuite passer à autre chose .

James Holden © Wikipedia Commons

Il devient dès lors très difficile de s’attacher à des noms en particulier, j’observe également la même tendance dans le cinéma, sur Netflix, et dans l’édition. Si vous voulez en savoir plus, je peux vous conseiller l’excellent livre de Hartmut Rosa « Aliénation et accélération », qui aborde une thématique qui est très peu étayée publiquement et touche tous les secteurs, dont également celui de la culture.

C’est l’heure des résultats

Heureusement que parmi ce fait qui peut faire trembler, on peut encore écouter des choses en boucle, s’attacher à des artistes. Drake, qui bat tous les records d’écoutes dans le monde, a encore sorti un nouvel album « For all the dogs »  qui dans cinq ans passera encore dans mes oreilles, comme tous ses anciens albums.

Drake © Photo via champagnepapi/Instagram

Preuve que l’on peut conserver une colonne vertébrale en matière de goûts malgré le flux des nouvelles sorties. Toujours aussi bon, mais les goûts restent personnels et subjectifs. On peut bien sûr critiquer mes choix, mais « Le goût n’est-il pas le dégoût du goût des autres » comme le dit le sociologue Pierre Bourdieu ?

Beaucoup vont placer le dernier opus de Lana Del Rey ou le dernier Blur dans leurs préférences, alors qu’ils ne correspondant pas à mes propres habitudes d’écoute. Allez, je vous dresse ma playlist de ce qui m’a plu cette année. Contrairement à ce que racontent, si vous jeter un coup d’œil en dehors des gros médias, voire vous vous coupez de cet accès musical-là, il y a moyen, quels que soient vos goûts, de découvrir des nouvelles pépites.

Bien sûr il s’agit d’une sélection alliant le R&B, l’alternatif, le Hip hop, l’électronique et quelques ovnis. Si 2023 devait se résumer à un titre, ce serait celui de Ice Spice « Deli » certainement le plus utilisé sur Instagram que ce soit par des artiste, influenceurs et autres. Sûrement le titre se rapportant le plus à l’accélération par le beat entêtant, des paroles se basant sur la compétition entre individus et l’élimination de ceux qui ne seraient pas aptes à gagner (pensez à l’allégorie sociale de « Squid Game»). Voici ici le clip que certains pourront trouver vulgaire.

Lana del Rey en 2019 © Wikipedia Commons

Allez, encore un dernier coup pour la route ?

Je laisse également en lien le site de Resident Advisor qui est une référence dans le domaine des musiques électroniques, et dévoilera d’ici peu sa liste des meilleurs albums et ep électro, attendue également par les amateurs de bass. Ainsi que la liste des meilleurs albums de l’année selon la version américaine de Rolling Stone que je recommande.

Bilan musical 2023, ma sélection personnelle :

-Drake “For all the dogs”

-Victoria Monet “JAGUAR II” 

-Travis scott “Utopia”

-Gecs 100 “10,000 gecs”

-Young father “Heavy Heavy” 

-Four set “Live at Alexandra Palace London, 24th May 2023” 

-Danny Brown “Quaranta”

-André 3000 «New blue sun»

-Die Türen “Kapitalismus blues band”

-Amaarae “Fontain Baby”

-Freeze Corleone « ADC »

-Lil Yachty «Let’s start here” 

-Josh Caffe «Poppa zesque”

-Tirzah « trip9love…??? »

-James Holden « Imagine This is A High Dimensional Space Of All Possibilities” 

-Skinny Pelembe “Hardly the Same Snake” 

-Nabihah Iqbal « Dreamer”

-Mc Yallah « Yallah Beibe” 

-Die Selektion « Zeuge aus licht”  

-Mike Dean « 4:23” 

-JpegMafia & Danny Brown « Scaring the hoes” 

-Luidji «Saison 00»

-Yves Tumor «Praise a Lord who chews but Which Does Not Consume”

-Yaeji “With a Hammer”

-SZA “SOS”

-Burna Boy «I told them…»


Retrouvez Mechaa fact, qui a réalisé l’illustration de cet article, sur Instagram.

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