Vous aimez le paranormal, les fantômes, les objets qui volent tout seuls, la télépathie, l’hypnose, la lévitation, le fakirisme, les mystères de l’aura, et toute cette sorte de choses ?
Moi aussi. Et le Musée d’Histoire de la Médecine de Paris s’y intéresse aussi. Vous n’êtes donc pas aussi fou qu’il n’y paraît. Suivez-moi pour une consultation plus approfondie dans l’exposition: « Phénomènes, l’inexpliqué face à la science. »

Salle du Musée

C’est dans la grande salle d’exposition du Musée d’Histoire de la Médecine de Paris, dans le quartier de l’Odéon, que Philippe Baudouin, le commissaire de l’exposition, a rassemblé de nombreuses vitrines les unes plus étranges que les autres, consacrées à des phénomènes certes encore inexpliqués mais par contre bien documentés par des témoins dignes de foi, notamment des officiers de police ou de gendarmerie. Y sont exposées environ 140 photographies rares voire inédites qui documentent ces questions parapsychologiques.

Monsieur Baudouin est maître de conférences associé en Sciences de l’information et de la communication à l’Université Paris-Saclay. Il est aussi l’auteur d’une somme appelée Apparitions, mais aussi Les Archives de la France Hantée (Hoëbeke, 2021) ; Surnaturelles ou Une histoire visuelle des femmes médiums (Pyramyd, 2021). C’est un historien du spiritisme et des sciences occultes, grand collectionneur d’images d’archives amassées au fil des ans, un enquêteur qui enquête sur ces anciens enquêteurs, un sceptique qui aimerait y croire si seulement on pouvait lui apporter des preuves.

Poltergeist

Janet Hodgson projetée hors de son lit par une force invisible Photo ©Graham Morris

Mot allemand voulant dire « esprit frappeur » en français. Expression apparue au XVIème siècle notamment sous la plume de Martin Luther, même si Pline le Jeune en témoigne déjà dans l’Antiquité. Une force inconnue frappe les murs, parfois de manière très violente. Elle déplace ou renverse les objets, voire les meubles lourds de la maison, parfois même met le feu de manière spontanée. Mais bien sûr le plus impressionnant reste la grêle de pierres ou de projectiles tant à l’extérieur de la maison qu’à l’intérieur. 

Une piste envisagée est celle de la « vilaine petite fille » développée par Frank Podmore, un parapsychologue britannique. Souvent on constate la présence d’une jeune fille dans les maisons qui subissent des poltergeist. Il pense que soit c’est une farce montée par l’enfant, soit elle serait douée de pouvoirs psys particuliers. Pensons à la jeune Carrie, du roman de Stephen King et du film éponyme. L’Américain William G. Roll parle lui de psychokinèse récurrente et spontanée.

Une belle série de photos des années 1977/1978 du cas des « poltergeist de Enfield »  y est exposée, dans laquelle on voit une des filles de la maison, Janet Hodgson, projetée hors de son lit par une force mystérieuse. C’est sans doute le cas de hantise le plus documenté du XXème siècle. Cette jeune fille anglaise de la banlieue de Londres était aussi capable de xénoglossie, c’est-à-dire qu’elle était comme possédée par l’esprit de l’ancien propriétaire des lieux mort quelques années auparavant, et elle parlait avec une voix rauque et masculine lorsqu’elle était plongée dans un état second. Un film d’horreur, Conjuring 2, a été réalisé en 2016 sur cette incroyable histoire.

Pierre et Marie Curie au Pays des Médiums

En 1903 ils reçoivent le Prix Nobel de Physique aux côtés de Henri Becquerel pour leurs recherches sur la radioactivité spontanée. L’année suivante ils rejoignent le « Groupe d’Etude sur les Phénomènes Psychiques », plus exactement sur la médiumnité et la télékinésie. Ils étudient la médium Eusapia Palladino, une femme simple originaire des Pouilles, plutôt médium physique que médium spirite, davantage capable de bouger les objets que de parler avec les morts. Les Curie travaillent depuis longtemps sur la question des radiations invisibles, celles de la radioactivité bien sûr, qui sont capables de se propager, d’irradier autour d’elles.

Quelques années plus tôt on a découvert les rayons X, d’où une fascination bien compréhensible pour l’incompréhensible,  pour le caché révélé, les fluides, les rayons invisibles. C’est une époque de porosité entre les milieux scientifiques et occultes. Thomas Edison développe à la fin de sa vie un appareil destiné à enregistrer la voix des morts, on l’appellera plus tard le nécrophone.

Pierre Curie invente des appareils spécifiques pour mesurer les capacités d’Eusapia : lévitation, apparition de fleurs, empreintes de mains et de visages dans l’argile. Marie Curie, elle, est beaucoup plus sceptique et garde ses distances pour conserver son aura scientifique. Philippe Baudouin en parle notamment dans son ouvrage Apparitions.

Psychokinésie et torsion des métaux

Les expériences de l’Israélien Uri Geller sont bien connues du grand public dans les années 1970 et 1980. Il plie soi-disant les cuillères sur les plateaux de télévision par la force de la pensée, et ira jusqu’à prétendre en 1979 être capable de plier la Tour Eiffel ! Mystificateur et beau parleur, pliant les fourchettes mais refusant toujours de se plier lui-même à des expériences en laboratoire, ses aveux finaux de tricherie porteront un coup dur à la télékinésie. Et pourtant. Des adolescents français qui ont répondu à l’appel national lancé sur les ondes de Europe 1 en 1974 se sont adonnés aussi à ce genre de séances sous la surveillance d’expérimentateurs chevronnés de l’INSERM, l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale. En témoignent les couverts exposés dans une vitrine et les rapports d’expérience de l’époque qui n’ont décelé aucune fraude.

Photographies de l’aura

Electronographie de Dumitrescu

Selon le Français Charles Richet (1850-1935), Prix Nobel de Physiologie et Médecine en 1913, « L’aura, le corps astral, sont des expressions diverses pour exprimer un même phénomène, une radiation humaine. Il est possible que cette radiation existe, puisque tout est possible ; mais jusqu’à présent on n’a pu le démontrer. Le jour où elle sera enfin établie, sans doute alors on pourra la rattacher à tout ce qui a été dit par les anciens magnétiseurs ». 

Les recherches sur la photographie de l’aura ont été développées par les Russes Siméon et Valentine Kirlian qui mirent au point en 1939 un procédé photographique censé capter les rayonnements provenant des êtres vivants, humains mais aussi plantes par exemple. Ce que l’on appelle « l’effet Kirlian » permettrait de diagnostiquer l’état de santé en fonction des formes et couleurs de l’aura. Cette technique connaît un grand succès dans les milieux New Age depuis les années 1960/1970. L’artiste contemporaine Dorothée Elisa Baumann était d’ailleurs un samedi à l’exposition de Paris pour photographier gratuitement l’aura des visiteurs volontaires. Quand j’ai voulu m’inscrire sur la liste des volontaires cela faisait belle lurette que toutes les places avaient été réservées ! Il faut dire que le résultat est assez poétique et plaisant.

Il y aurait tant de passionnantes recherches à vous partager, comme les « électronographies » de la main du docteur roumain Ioan Florin Dumitrescu (1937-1999) qui rendraient visibles les radiations du corps humain et permettraient la détection de pathologies; les enquêtes à l’aide de la clairvoyance télépathique du détective Léon Couette (1913-2000) qui a recherché par exemple à retrouver le baron Empain enlevé en 1978 et qui déposait ses conclusions chez un huissier de justice afin qu’elles puissent être vérifiées après coup, certaines s’avérant étonnamment exactes ; les pierres tombées du ciel, dont certaines en France suivaient une malade mentale internée dans un hôpital partout où cette femme se déplaçait. Certaines pierres tombaient verticalement d’on ne sait où, et d’autres la suivaient horizontalement de manière inexplicable, devant de nombreux témoins du corps médical. 

Allez plutôt voir l’exposition jusqu’au 28 janvier et faites-vous votre propre opinion, vous pourriez être surpris !