Depuis toujours, Istanbul ensorcelle ses visiteurs. Plus envoûtante que jamais, elle se dévoile au fil de musées exceptionnels, d’étonnantes galeries d’art et de lieux historiques récemment restaurés. Petit tour d’horizon et dernières adresses à savourer. Notre deuxième article d’une série de trois.

« Istanbul as Far as the Eye Can See: Views across Five Centuries», une exposition extraordinaire au Exhibition Space Mesher

Un arrêt en tram ou une dizaine de minutes à pied, et vous voilà déjà face au Exhibition Space Mesher, inauguré en 2019. « Mesher » veut dire espace d’exposition en turc ottoman.  Des ateliers y sont organisés et des livres d’art régulièrement édités. Actuellement, on peut y voir la très belle exposition « Vues d’Istanbul sur cinq siècles » mise sur pied par les curatrices Ebru Esra Satici et Seyda Cetin. Plus d’une centaine de pièces uniques (appartenant à la collection privée d’Omer Koç) sont dévoilées au public, brassant cinq siècles d’histoire : du XVe siècle-quand Istanbul devint la capitale de l’Empire ottoman- jusqu’au premier quart du XXe siècle.

Les curatrices du Exhibition Space Mesher, Ebru Esra Satici et Seyda Cetin © Exhibition Space Mesher

Peintures, gravures, livres anciens, albums photographiques et autres objets offrent aux visiteurs des vues inédites d’Istanbul. Cette exposition remporte un grand succès grâce à la variété des souvenirs exposés et aux multiples supports utilisés. Ceux-ci ont été rapportés par des écrivains, par des soldats, ambassadeurs, capitaines de navires, photographes ou architectes. Grâce à ces œuvres immortalisées par ces voyageurs de passage à Constantinople dans un contexte politique ou militaire, La Ville se dévoile sous un regard occidental : vie sociale et multiculturalité, échanges diplomatiques, métamorphoses des quartiers au fil du temps. Dialogue Orient/Occident, celui-ci pose une réflexion très intéressante sur les visions d’un Orient vu par l’Occident.

Max Rabes (1868-1944), Le bateau SMY Hohenzollern II, transportant l’Empereur d’Allemagne en face du palais de Dolmabahçe, à l’occasion de la visite d’État de l’Empereur Guillaume II à Constantinople en 1898. Huile sur toile (80 x 125 cm) © Exhibition Space Mesher

Vue d’Istanbul depuis la Tour de Galata signée Henry Aston Barker (1774-1856), gravure de Philipp Franz von Gudenus peinte depuis la terrasse de l’Ambassade de Suède en 1753, photo panoramique que l’on doit à James Robertson (1854), cette exposition révèle une foule de détails passionnants sur la vie quotidienne d’alors. L’œuvre la plus ancienne date de 1493 tandis que la plus récente a été réalisée entre 1922 et 1924. Jusqu’au 29 septembre 2024.

Façade du Musée de Péra © photo Letizia Missir

Le Musée de Péra : un petit bijou face à la Corne d’Or

A voir aussi non loin du Musée Mesher : le Musée de Péra. Espace culturel où sont aussi organisés toute l’année ateliers, conférences, animations artistiques pour enfants et autres événements majeurs, ce lieu est, aujourd’hui, une référence dans le monde de l’art. L’actuelle exposition est dédiée aux peintures et photographies panoramiques d’Istanbul donnant un nouvel éclairage sur l’histoire de ce style de représentations. Elle permet d’étudier et de comprendre certains éléments et phénomènes historiques liés à la ville tels que les incendies ou les périodes d’industrialisation. Panoramic Gaze on Istanbul, a History. Jusqu’au 18 Août 2024.

Oeuvre de Tony Cragg à l’entrée du Musée d’Art Contemporain Istanbul Modern à Karakoy © photo Letizia Missir

A Karakoy, Galataport est une destination en soi !

Il y a une vingtaine d’années, s’inaugurait en grande pompe, à Karaköy, le musée d’art contemporain Istanbul Modern. Karaköy veut dire littéralement en turc « village noir ». Ce quartier portuaire, longtemps populaire de la rive européenne s’est, peu à peu, transformé pour devenir, aujourd’hui, l’un des endroits phare et branché de la ville. Sur plus d’un kilomètre, boutiques de luxe, galeries d’art, enseignes internationales de prestige et restaurants gastronomiques se succèdent face aux eaux intenses du Bosphore. Une promenade culturelle essentielle où l’on aime flâner pour contempler, éblouis de beauté, l’embouchure de la mer de Marmara et la Corne d’Or. Les énormes entrepôts et bâtiments anciens de douanes-datant de l’époque ottomane- ont été joliment restaurés et rénovés. Des événements culturels sont programmés sans relâche sur cette jetée rythmant le parcours « arty » des visiteurs curieux et passionnés, comme un festival de jazz.

Oeuvre de l’artiste turc Nurullah Berk (1906-1982) à l’Istanbul Modern © Musée Istanbul Modern

Non loin de là, l’Istanbul Modern, se veut un centre de dialogue artistique et d’échange culturel de premier plan. Novices ou experts s’y pressent et s’interrogent sur la création artistique et contemporaine turque. On s’extasie devant les prouesses architecturales de Renzo Piano à l’origine de ce lieu baigné de lumière s’intégrant parfaitement à son cadre maritime. Sa terrasse est l’un des endroits favoris de Bahadir Kaleagasi, Président de l’Institut du Bosphore. Homme de culture élégant et raffiné, j’eus la chance de le croiser, lors de mon passage stambouliote.

Bahadir Kaleagasi, président de l’Institut du Bosphore © DR

Pour Culturius, voici les coups de cœur de Bahadir Kaleagasi :

Les Musées 

Le Musée d’art moderne et contemporain Istanbul Modern et celui de Pera, que nous venons de voir. Le Musée Sakip Sabanci : installé dans un manoir datant de 1925, on peut y voir expositions permanentes et temporaires ainsi que des sculptures et calligraphies islamiques. Le Musée Rahmi M. Koç consacré à l’histoire des transports, de l’industrie et des communications, il est situé sur la Corne d’Or dans deux prestigieux bâtiments historiques. Et le Musée Mesher (voir plus haut).

Les galeries d’art et centres culturels

Le Centre d’art Feshane. Celui-ci a réouvert ses portes, en juin 2023, après 5 ans de restauration. Joyau architectural de la Corne d’Or, son histoire s’étend sur près de deux siècles.  Ses 8000 mètres carrés comprennent des espaces d’exposition temporaires, une bibliothèque et un café. Construite en 1833, Feshane était une usine textile à l’époque ottomane. Sa fonction première était de produire les chapeaux fez (chapeau rouge de forme cylindrique) portés par les dignitaires ottomans.

La Casa Botter © Pat Yale / X

Salt Galata. Cet espace artistique est situé dans une ancienne banque. A la fois galerie d’art, café et bibliothèque on prend un grand plaisir à y passer des heures…D’autant plus que s’y est installée, à l’étage, la célèbre librairie Robinson Crusoe 389.

Niché dans le joli quartier d’Asmalimescit, la Casa Botter (1900) est un trésor enchanteur qui fait partie des joyaux architecturaux d’Istanbul. Son histoire est liée au créateur de mode hollandais Jean Botter et à l’architecte visionnaire Raimondo D’Aronco à qui l’on doit d’autres étonnants bâtiments Art nouveau dans la ville. Istanbul concept. Organisation multidisciplinaire très dynamique, cette galerie organise expositions originales et rencontres insolites entre artistes locaux et étrangers.

Le centre Vitali Hakko Creative Industries Library © DR

Le centre Vitali Hakko Creative Industries Library. Vakko est un nom prestigieux et incontournable dans le domaine de la mode en Turquie. Considérant l’art et la mode indissociable, Cem Hakko, président du conseil d’administration de Vakko fonda ce lieu  pour honorer le fondateur de la marque Vitali Hakko. Un pari brillamment réussi grâce à cette magistrale bibliothèque au design impressionnant, figurant parmi les plus complètes de Turquie dans le domaine de l’art. Etudiants, auteurs, académiciens et touristes esthètes avertis s’y pressent toute l’année dans un calme divin.

La librairie Homer. Petite et très jolie librairie étalée sur 3 étages que l’on parcourt avec bonheur. Très belle diversité de livres en turc et en anglais. Les passionnés d’histoire, d’archéologie et d’antiquité seront ravis. Une halte incontournable à Beyoglu. Adresse : TomTom Yeni Carsi Cd. 52 / tel : +90 212.249.59.02


Lisez ici la première partie de ce reportage stambouliote ! Et aussi la suite et fin, avec le Bosphore, les hamams, les bonnes lectures et un fabuleux palace.